DES DONNÉES À PRENDRE AVEC UN GRAIN DE SEL

Les comparaisons d’hybrides risquent d’être difficiles cette année.

Publié: 26 novembre 2019

Chaque quart de ligne d’amidon exige 100 degrés-jours.

Au moment d’écrire ces lignes, début octobre, il est clair que le maïs accuse un retard. Peu de champs sont rendus au point noir alors que certaines régions ont déjà subi un premier gel mortel. « Les producteurs doivent s’attendre à ce que leurs données de récolte soient très particulières cette année, prévient l’agronome Cynthia Lajoie. Cela risque d’être difficile de s’appuyer sur ces données pour prendre des décisions pour l’an prochain. »
La spécialiste signale que trois embûches attendent le producteur dans l’interprétation de ses données. Une première porte sur la précision du capteur de rendement.?« Il faut être conscient que lorsqu’il y a de grandes différences entre deux champs en termes d’humidité et de poids spécifique, les données du capteur risquent de ne pas dire la vérité quand on passe d’un champ à l’autre, signale-t-elle. La règle d’or est que si l’humidité du grain varie de plus de 4%, on devrait faire systématiquement une calibration. »

Un test réalisé par Pioneer en conditions de champ illustre bien ce point. On a constaté qu’un écart d’humidité de 5 % par rapport au point de calibration entraînait une erreur de 6 % dans l’évaluation du rendement. Avec un écart de 9 %, l’erreur gonflait à 12 %. « De la même façon, ajoute Cynthia Lajoie, on devrait aussi recalibrer quand le poids spécifique varie beaucoup. »
Une deuxième embûche surgira quand on voudra comprendre pourquoi certains hybrides ont mieux performé. « Quand un maïs se rend à seulement la demi-ligne de lait, il subit une perte de rendement de 10 %, indique Cynthia Lajoie. Sans compter qu’il possède un poids spécifique plus faible. »
« Il s’ajoute un autre facteur possible de distorsion, poursuit-elle. Prenons l’exemple de deux hybrides de maturité égale, mais où l’un des deux a une floraison plus tardive, qui est compensée par le fait qu’il sèche plus vite au champ. C’est clair qu’il sera physiologiquement moins avancé puisqu’on n’est pas rendu à l’étape du séchage. »
Troisième embûche signalée par l’agronome : l’année avantagera les hybrides hâtifs qui ont pu se rendre à maturité et qui afficheront de ce fait un bon poids spécifique. « De toute façon, à quoi bon comparer l’hybride de 2550 UTM à celui de 2700 UTM qu’il est venu remplacer en juin ? », interroge-t-elle. «À moins qu’on ait l’intention de resemer le 2550 UTM l’an prochain, mais ce ne serait pas nécessairement un bon choix, s’empresse-t-elle d’ajouter. Il est rare que le maïs soit aussi en retard. Si on sème entre le 3 et le 18mai, il n’y a pas de raison de remplacer un hybride de 2700 UTM par un 2550. On ne devrait pas changer ce qu’on fait depuis toujours. »
S’il y a une leçon à tirer de cette saison exceptionnelle, estime la spécialiste, c’est celle-ci : « Certains producteurs ont conservé les mêmes hybrides même s’ils les semaient tardivement en pensant qu’on aurait un mois de septembre chaud comme en 2018, dit-elle. Or, septembre s’est avéré juste moyen au point de vue des degrés-jours. »
« Il faut garder à l’esprit qu’un retard d’une semaine de la floraison à la fin de juillet, quand il fait chaud et humide et qu’on accumule entre 20 et 24 degrés- jours par jour, c’est peut-être l’équivalent de trois semaines en septembre, souligne-t-elle. C’est difficile à rattraper. Pour chaque quart de ligne d’amidon, on a besoin de 100 degrés-jours. »