Le sol à la rescousse contre les changements climatiques

Publié: 5 avril 2022

Le sol à la rescousse contre les changements climatiques

Une des meilleures solutions pour contrer les changements climatiques se trouverait-elle à portée de main? Selon le Conseil canadien de conservation des sols (CCCS) et le Conseil canadien du compost (CCC), la réponse est oui et consiste à mettre à contribution le sol, cet important capteur de carbone et dont le potentiel n’est pas utilisé à sa juste valeur. Pour y arriver, il suffit d’adopter quelques mesures de conservation pour protéger les sols. La situation est toutefois critique et demande une intervention immédiate, ont fait savoir les groupes lors d’une annonce faite en virtuel, en invoquant les dernières données sur les changements climatiques.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur les changements climatiques (GIEC) a en effet confirmé lundi ce qui est en jeu pour la planète dans son dernier rapport: des changements doivent être apportés dès maintenant pour limiter la hausse des températures au-delà de 1,5 degré d’ici 2050, sans quoi l’objectif sera impossible à atteindre. Déjà, des dégâts et des dommages importants ont eu lieu. Les émissions de gaz à effet de serre (GES) doivent atteindre leur sommet au plus tard en 2025 pour ensuite être réduites de plus de 43 % en 2030, d’où l’urgence d’agir.

L’avis est partagé par le CCCS et le CCC pour qui le temps est venu de passer à l’action. Une feuille de route appelée Changements climatique: une feuille de route pour le Canada, interpelle tous les intervenant ayant un rôle et un impact sur la conservation des sols, que ce soit les producteurs agricoles, les propriétaires, les jardiniers et tous les leviers de gouvernement. Il faut selon les deux organismes faire appel à un héros méconnu, le sol. Celui-ci a le pouvoir de réduire le carbone relâché dans l’atmosphère en le captant.

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Le potentiel du sol, les meilleures méthodes pour capter le carbone et les effets bénéfiques pour le sol ont été confirmés par des experts. En tant qu’émetteur de 10% des GES au Canada, l’agriculture peut contribuer de manière importante à les réduire. L’adoption de deux pratiques de conservation des sols peut avoir un impact important à eux seuls.

Les experts sont unanimes sur la manière d’aider les sols, indique Glenn Munroe, expert en santé des sols au CCC. Il faut soutenir la vie des micro-organismes dans le sol qui décomposent les résidus eux-même transformés au préalable par les vers de terre. Les pratiques culturales traditionnelles font toutefois la vie dure à ces organismes qui sont la manifestation d’un sol en santé.

M. Munroe affirme qu’il faut appliquer cinq principes pour arriver à une bonne vie bactérienne dans le sol.

. Il faut garder les racines vivantes le plus longtemps possible.

. Il ne faut pas déranger le sol.

. Il faut maximiser les intrants afin de donner un coup de pouce au sol.

. Il faut encourager la biodiversité, autant au-dessus qu’en dessous du sol, puisque les deux s’influencent.

. Il faut aussi garder le sol couvert le plus longtemps puisque cela prévient l’érosion par le vent et l’eau.

Les effets bénéfiques sont nombreux à augmenter la captation du carbone dans le sol, selon les deux associations. La fertilité du sol est augmenté, ainsi que la qualité de l’eau. La résilience du sol s’améliore face aux chocs météos. La biodiversité s’en trouve également haussée. La ferme voit également sa profitabilité supportée, ce qui est appuyé par un meilleur potentiel à faire face aux changements climatiques.

Pour Tim Tokarchuk, directeur général du CCCS, il est impératif de voir tous les intervenants prendre un leadership sur le rôle des sols à contrer les changements climatiques, ce qui doit s’accompagner de politiques en faveur d’interventions ciblées en ce sens et de financement. Le défi principal réside toutefois dans le transfert des connaissances, la plus importante lacune dans le secteur agricole, selon lui. « Il faut faire connaître ce que les sols peuvent faire, faire connaître cette expertise et mettre ça dans les mains de ceux qui peuvent faire une différence. »

Développer ces méthodes culturales demande toutefois de changer ses habitudes, ce qui veut dire changer également son niveau de risque. C’est pourquoi il faut procéder aux changements de la bonne manière, le faire de manière raisonnable tout en agissant selon la science, ajoute M. Munroe.

Si les producteurs n’avaient que deux méthodes à adopter pour avoir le pus d’impact, il leur suffirait de moins travailler le sol et de garder le plus de résidus possible dans le sol afin de retourner le carbone dans le sol. « Une méthode pour y arriver est d’utiliser les cultures de couverture puisqu’elles gardent dans le sol les bonnes choses qu’on veut conserver. »

Un pionnier dans la conservation des sols et récompensé à de nombreuses reprises, le producteur ontarien Don Lobb, a fait savoir qu’il était possible de changer la manière de faire l’agriculture. « On est tous responsables de s’informer sur le rôle du carbone et l’impact des GES. Le choix nous appartient. Sinon, comment pourra-t-on expliquer aux générations futures notre inaction? « 

À PROPOS DE L'AUTEUR

Céline Normandin

Céline Normandin

Journaliste

Céline Normandin est journaliste spécialisée en agriculture et économie. Elle collabore également au Bulletin des agriculteurs.