Le panier d’épicerie est payé pour l’année

Publié: 12 février 2005

Québec (Québec), 8 février 2005 – Depuis le 5 février au Québec et depuis le 8 février au Canada, nous avons gagné suffisamment d’argent pour payer toutes nos factures d’épicerie de l’année. C’est la Journée canadienne d’affranchissement des dépenses alimentaires. Il n’aura fallu que 39 jours au ménage canadien moyen, et 36 jours au ménage québécois, pour s’affranchir de ses dépenses alimentaires de l’année, alors qu’il continuera à payer jusqu’au 13 février pour se véhiculer, jusqu’au 26 février pour se loger et jusqu’au 30 juin pour payer ses impôts.

« Si les consommateurs ont de bonnes raisons de se réjouir, les producteurs agricoles, pour leur part, sont fort inquiets », de lancer M. Laurent Pellerin, président de l’Union des producteurs agricoles (UPA). Réunis en conférence de presse ce matin, M. Pellerin et plusieurs représentants du monde agricole ont profité de cette journée de « réjouissance » pour rappeler que, s’il en coûte de moins en moins cher pour se nourrir, il en reste également de moins en moins pour rémunérer le labeur des agriculteurs.

« La situation des producteurs agricoles s’est détériorée ces dernières années », ont dénoncé d’un même souffle le président de l’UPA ainsi que MM. Denis Couture, président de la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec, Langis Croft, président de la Fédération des producteurs d’agneaux et moutons du Québec, Robert Babeu, président de la Fédération des producteurs de pommes du Québec, Pierre Lemieux, président de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec et Claude Corbeil, président de la Fédération des producteurs de porcs du Québec.

« Alors que les attentes de plus en plus élevées de la société en matière d’environnement, de traçabilité et d’innocuité se répercutent sur les coûts de production en agriculture au Québec, on nous demande de concurrencer avec des entreprises étrangères, largement subventionnées, et dont les contraintes réglementaires ne sont d’aucune commune mesure avec les nôtres, souligne les porte-parole. Nous avons réussi à nous adapter et à répondre à la demande. Mais force nous est de constater que les agriculteurs, année après année, ont de la difficulté à aller chercher leur part dans le marché. »

Chiffres à l’appui, les représentants du secteur agricole ont réitéré qu’un très grand nombre d’entre eux ne couvrent même pas leurs coûts de production. Par exemple, il en coûte 0,49 $ pour produire un kilo de pommes fraîches, alors que le producteur en reçoit seulement 0,45 $. Sur les 2,99 $ que coûte ce même sac à l’épicerie, 2,54 $ (soit 85 %) passent dans la poche des intermédiaires, et ce, pour un produit qui subit très peu de transformation. Dans le cas du porc, le prix versé à la ferme est de 1,90 $ le kilogramme, tandis que le coût de production est de 1,93 $. Quant à l’agneau, le prix payé au producteur est en moyenne 7,01 $ le kilo alors que son coût de production est de 14,66 $.

Aujourd’hui, le monde agricole interpelle les acteurs de la chaîne agroalimentaire et l’ensemble de la société, gouvernements et consommateurs, afin de promouvoir une agriculture québécoise basée sur le maintien des fermes familiales. L’UPA et ses affiliés proposent quelques pistes de solution afin de rétablir un juste équilibre dans le marché tout en maintenant une offre de produits de qualité, à prix compétitifs. La mise en marché collective des produits agricoles, dont la gestion de l’offre, l’accroissement de la demande pour les produits québécois, une répartition plus équitable des marges entre les différents maillons de la chaîne, le développement de produits de niche et à valeur ajoutée, sont quelques unes des stratégies que les agriculteurs continueront de mettre de l’avant dans les prochains mois.

Quelques chiffres
Rappelons qu’en 2002 les ménages québécois consacraient en moyenne 9,83 % de leur revenu familial après impôt à l’alimentation, soit 5 249 $, alors que cette dépense représentait 20 ans plus tôt 13 % du revenu familial (3 337 $). La proportion des dépenses allouées au logement quant à elle, est demeurée stable à 15 % au cours de la même période et celle des dépenses allouées au transport augmentait de 11 % à 12 %.

En valeur absolue, les dépenses consacrées à l’alimentation, exprimées en dollars constants, ont diminué de 17 % (1 000 $) entre 1982 et 2002. Pour ce qui est du logement et du transport, les dépenses ont augmenté de 1 000 $, soit des augmentations respectives de 14 % et de 20 % durant cette même période. Finalement, le revenu des ménages en dollars constants a connu une augmentation de 13 %. C’est donc dire que les dépenses consacrées au logement et au transport ont subi une augmentation plus forte que le revenu des ménages. Il est clair que les producteurs agricoles n’ont pu bénéficier des gains d’efficacité qu’ils ont réalisés au fil des ans. En effet, si on observe les prix des produits agricoles obtenus à la ferme (en $ constant), ceux-ci ont tous diminué depuis 20 ans.

Site(s) extérieur(s) cité(s) dans cet article :

Union des producteurs agricoles (UPA)
http://www.upa.qc.ca/

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