Agriculture et changements climatiques

L’agroenvironnement, la santé des sols et la qualité de l'eau, c'est l'affaire de tous.

Publié: 7 septembre 2022

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Nous avons installé des cultures courtes et semé un couvert végétal contenant des légumineuses qui captent l'azote de l'air grâce à leur nodules (usine végétale de transformation). Cet azote sera disponible pour la culture suivante. À noter que chaque unité d’azote organique dégage cinq fois moins de GES que le l’azote commercial.

En cette période d’élections, les partis politiques étalent leurs objectifs de réduction des gaz à effet de serre. Ils sont rendus avec des objectifs de réduction de 50%, selon certains. J’ai l’impression que ça fait tellement longtemps qu’on en parle, mais qu’en général, les résultats ne sont pas là. Ça ressemble à quelqu’un qui présente un plan d’affaires à son créancier et qu’il ne le réalise pas. Arrive un moment où les objectifs de récupération sont tellement élevés qu’on est tenté de jeter la serviette et d’abandonner le projet.

Un peu frustré qu’on se contente de promettre des investissements pour de nouveaux projets, comme si le fait de créer quelque chose de nouveau était signe de corriger une situation qui, à la base, se règle graduellement en changeant notre façon de vivre et de travailler. Certains trouvent même le moyen de régler le cas de l’agriculture en 59 mots en mentionnant, bien sûr au passage, qu’il faut s’orienter sur un modèle biologique. Comme si le fait d’adopter un mode de production allait régler automatiquement les problèmes supposément causés par l’agriculture.

Pourtant, sur notre ferme, on a réduit de 32% nos gaz à effet de serre, réduit de 35% nos pesticides tout en réussissant à augmenter de 50% notre capacité de nourrir nos gens sur une base annuelle. Notre façon de travailler nous a permis d’augmenter nos niveaux de matière organique qui nous permettent de capter tellement de carbone qu’on fait rouler tous les citoyens de notre petite municipalité carboneutre. Notre ferme n’est pourtant pas certifiée biologique…

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En fait, on ne peut pas réussir une agriculture résiliente en se concentrant sur un item à faire ou à ne pas faire. C’est plutôt le résultat global du système de production qui nous permet d’obtenir des bénéfices environnementaux de grande valeur. Nos techniques améliorent la qualité de l’eau. Nos bandes riveraines bonifiées élargies nous permettent de nourrir et d’abriter la faune sauvage, les oiseaux et nos insectes pollinisateurs. On s’occupe même de la préservation des espaces d’oiseaux et insectes en péril (goglu des prés, hirondelle, bourdons terricoles et autres espèces).

Tout ça, sans compter nos 500 tonnes de vers de terre à nourrir, qui, eux, travaillent le sol sans carburant tout en traçant la voie à une multitude de micro-organismes. J’ai toujours mentionné que l’agriculture faisait partie des solutions pour réduire les GES. Participer à notre effort de citoyen pour mettre l’épaule à la roue dans l’objectif de réduire nos GES tout en nourrissant nos citoyens. Le plus frustrant, c’est de constater qu’on a reçu aucun soutien financier pour ce qu’on a déjà réussi à réduire pendant qu’on promet des investissements majeurs pour des projets valables, mais encore sur les planches à dessin.

L’agroenvironnement, la santé des sols et la qualité de l’eau, c’est l’affaire de tous. Ça mérite d’être soutenu, reconnu et compensé à la hauteur de nos performances qu’on réalise déjà dans l’ombre. Et ça se résume en un ensemble de facteurs bien loin du bio seulement ou des pets de vaches. Pour cette raison qu’on en fait NOTRE affaire. Profession agriculteur.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Paul Caplette

Paul Caplette

Agriculteur et collaborateur

Paul Caplette est passionné d’agriculture. Sur la ferme qu’il gère avec son frère en Montérégie-Est, il se plaît à se mettre au défi et à expérimenter de nouvelles techniques. C’est avec enthousiasme qu’il partage ses résultats sur son blogue Profession agriculteur.