Les changements climatiques selon Pascal Yiacouvakis

Il y a des variations d'année en année, mais la tendance haussière est claire

Publié: 23 janvier 2023

Le météorologue Pascal Yiacouvakis au Salon de l'agriculture

Le météorologue a débuté sa conférence présenté le 19 janvier au Salon de l’agriculture en se disant heureux de s’adresser à un auditoire aussi passionné que lui par la météo, mais pour des raisons différentes. Loin de se décrire comme un expert en agriculture, le but de sa présentation était en fait de présenter les plus récentes études concernant les changements climatiques et le contexte dans lequel elles étaient menées.

Le réchauffement de la planète s’accélère et c’est un fait. Si la planète a gagné 1,8 Celsius entre 1880 et 1960, elle en a gagné presque autant en l’espace de 30 ans, soit depuis 1980. Et à ce rythme, le climat se réchauffera de deux Celsius d’ici 2050 au Québec.

Première chose à clarifier selon le météorologue, il ne faut pas anticiper des années successives de hausses continues. Il y a des variations d’année en année, mais la tendance haussière est claire. « Ce n’est pas parce qu’il y a eu des records de chaleur qu’il va y en avoir l’année prochaine », dit Pascal Yiacouvakis. Les changements ne se produisent pas non plus au même rythme partout sur la planète. Ils sont plus prononcés près des pôles puisque les glaces fondent et perturbent ainsi davantage le climat.

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Il ne faut pas non plus confondre prévisions à court terme et celles à long terme, comme celles utilisées pour démontrer le réchauffement climatique. « Il y a des gens qui disent : comment on peut se fier aux prévisions sur des années, alors qu’on n’est pas capable de prévoir la météo dans trois jours? C’est qu’on ne se réfère pas aux mêmes données, on n’est pas dans le détail », explique-t-il. Les prévisions à court terme se concentrent sur des localités et certains facteurs, alors que le rôle des prévisions à long terme est de développer des modèles afin de dégager des tendances. Des agences publiques, comme le National Oceanic and Athmospheric Association aux États-Unis, disposent d’importantes ressources, telles que de l’équipement de pointe et des experts, pour déchiffrer le climat. Des modèles extrêmement complexes compilent des milliers de données de manière tridimensionnelle à l’aide de logiciels ultra performants.

Les changements à prévoir

Le météorologue, qui compte plus de 30 ans d’expérience, se dit surpris par la rapidité des changements climatiques. « Des patinoires extérieures prêtes seulement au 15 janvier, je n’ai jamais vu ça », déclare-t-il. L’hiver 2023 est aussi un bon exemple de l’impact du réchauffement puisqu’en plein coeur de l’hiver, les températures frisent le point de congélation et les grands froids se font encore attendre.

Les vents du nord-est, qui avaient tendance à apporter de l’air froid et sec, se font rares. Ils cèdent leur place aux vents du sud-ouest gorgés de chaleur et d’humidité remontant du golfe du Mexique.

La disparition de la neige et de la couverture neigeuse signifie aussi que les températures se réchauffent. La blancheur de la neige offre un écran et réfléchit la lumière, ce qu’on peut constater quand la neige fond en mars et provoque la remontée du mercure. S’il y a moins de neige en hiver, ces derniers deviendront plus chauds.

Pascal Yiacouvakis a utilisé les données de l’organisme Ouranos pour présenter des modèles pour quelques régions. La région de Montréal devrait connaître beaucoup plus de canicules, définies par trois journées consécutives au-dessus des 30 degrés Celsius. Au lieu d’une dizaine en général, on devrait compter de 15 à 17 jours de 30 degrés, tandis que le mercure grimperait, d’une moyenne de 25 à 26 degrés, à 27 à 28 degrés. Pour la Montérégie, les journées de 30 degrés monteraient de 13 à 16 jours par été. Cela s’accompagne en hiver d’une diminution de 10% de la neige , mais d’une augmentation de la pluie durant cette saison.

L’expert a expliqué que bien que toutes les saisons subiront des changements, le printemps connaîtra le plus de variations. La pluie devrait être 10% plus importante qu’aujourd’hui, alors que le changement ne serait que de 2,5% en été et de 5 à 10% en hiver. Avec un aussi faible taux à l’été, M. Yiacouvakis s’attend à ce que les étés soient beaucoup plus secs avec des précipitations plus soutenues et ponctuelles.

Les changements climatiques signifient aussi des variations en température, comme des gels tardifs au printemps, des périodes fraîches en plein été ou des redoux d’hiver plus accentués. La consolation au tableau est que la période de croissance devrait s’allonger et que les automnes auront tendance à être plus doux avec des gels mortels plus tard en saison.

De même, il se peut que les perturbations climatiques, telles que El Nino ou La Nina, s’accentuent sous l’influence des changements climatiques. Bien qu’ils aient moins d’impacts sous nos latitudes que dans d’autres endroits dans le monde , il ne faut pas non plus les négliger, selon le météorologue, qui rappelle que la crise du verglas de 1998 au Québec a eu lieu lors d’un El Nino le plus fort des trente dernières années.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Céline Normandin

Céline Normandin

Journaliste

Céline Normandin est journaliste spécialisée en agriculture et économie. Elle collabore également au Bulletin des agriculteurs.