Une année d’apprentissage

Je n’oublie pas 2020. C’est une saison à l’école de l’agriculture

Publié: 10 novembre 2020

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Une année d’apprentissage

J’écris mon texte mardi matin. Si Gertrude tient le coup aujourd’hui, quand vous lirez ces lignes, on aura enfin terminé notre dernière récolte 2020.

Une année de M… comme disait mon père. Une année de misère, oublie ça et passe à autre chose. C’est quoi une année de misère? Ben, ça débute avec une survie ordinaire de notre blé d’hiver dans lequel on n’a pas tiré mieux que 5.2 tm/ha. Notre blé de printemps on n’en parle pas il a dépéri sous nos yeux avant de nous offrir une maigre récolte de 3 tm/ha. Nos petits pois verts ont rapporté un chèque de 8000$ quand ça nous coûte 10 000$ de semence seulement. Coté légumineuse, c’est mieux. Nos haricots roses et notre soya nous ont donné des rendements dans la moyenne et finalement le maïs-grain qui nous donne un rendement 30 % en bas de nos moyennes en 15 ans.

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Je me suis permis une petite escapade à un endroit où j’espérais ne pas trop voir de champs en culture. Question de faire le plein d’énergie en oubliant le plus possible les tracas.

Ajoutons l’époque Covid, un accident de parcours, mon oncle de 98 ans qui nous quitte discrètement au beau milieu de son jardin sous une température de 38 degrés Celsius. Il me manque, mon fils me manque, ma fille me manque, mes sorties, mes amis, mon ancienne vie, ma blonde tant qu’à y être. Plus rien de pareil. Au moins on se rattrape avec Léo et notre nouvelle maman dans la famille. Une année m… moche qu’on veut oublier.

On veut finir parce qu’on n’a plus le pouvoir de changer quoi que ce soit. Nos parcelles de variétés ne nous donnent aucune piste de nouveau prospect, nos tests d’évaluation ne donnent rien. Ma belle bande riveraine est en train de se faire envahir par de la bardane. J’ai dépassé les limites de ma réduction des pesticides et je me ramasse avec un champ d’essais pas très convainquant. On veut oublier cette saison de M, mais on va la voir revenir dans nos résultats financiers.  Le pire de tout ça ce n’est pas la mauvaise récolte. On est capable de vivre avec ça. C’est le doute qui nous chatouille…on est tu sur la bonne trail? Quand on développe de nouvelles façons de travailler hors de la moyenne on se retrouve avec le fardeau financier et les efforts additionnels à fournir pour tracer une nouvelle façon de travailler, à nos frais, sur notre bras, comme on dit.

Je suis convaincu que ce n’est pas notre système de culture le problème, c’est plutôt la façon qu’on s’y prépare et qu’on intervient dedans. Tsé, t’as beau mettre les meilleurs chalumeaux  au meilleur endroit stratégique sur ton érable, mais s’il n’y a pas de sève qui circule t’es dans la « schnoutte ». Trente-huit millimètres de pluie en plus de trois mois… c’est un peu la même chose. Donc, je n’oublie pas 2020. C’est une saison à l’école de l’agriculture! Une autre saison d’apprentissage. En fait, c’est ça le plus beau de notre profession. On s’améliore continuellement. Au moins on récolte du maïs-grain au beau soleil en t-shirt. Les couverts végétaux sont encore bien vigoureux, nos intercalaires nous surprennent et notre blé d’hiver 2021 est plein de promesse. Cultiver l’avenir! Profession Agriculteur

 

 

À PROPOS DE L'AUTEUR

Paul Caplette

Paul Caplette

Agriculteur et collaborateur

Paul Caplette est passionné d’agriculture. Sur la ferme qu’il gère avec son frère en Montérégie-Est, il se plaît à se mettre au défi et à expérimenter de nouvelles techniques. C’est avec enthousiasme qu’il partage ses résultats sur son blogue Profession agriculteur.