Ma dernière présentation

Publié: 15 avril 2025

Un réel privilège de faire partie du groupe des conférenciers de cet événement.

Le 9 avril 2025, ça me paraissait tellement loin. Paul serait-tu disponible pour nous faire une conférence sur ton cheminement par rapport à l’agriculture de précision? Euh! Je prends le temps de vérifier l’objectif et surtout j’explique bien que je ne suis pas nécessairement le plus hi-tech de la gang! La date me chicote aussi. L’agenda est serré le 9 avril pour un agriculteur qui fait du blé d’hiver.

On finit par s’entendre sur certains points que je pourrais partager en conférence. Ça m’intéresse. J’accepte en me disant que c’est certainement ma dernière présentation de l’année et que j’ai amplement de temps pour pondre quelque chose d’intéressant. Le temps file et arrive les étapes de préparation de la conférence qui doivent être fournies bien avant la date ultime.

Étant donné que ce n’est pas un sujet que j’ai l’habitude de traiter, je cherche une façon d’illustrer notre cheminement. J’ai dû travailler un peu plus fort que d’habitude pour trouver un fil conducteur qui pourrait se tenir. Ensuite, je dois illustrer et bâtir les phrases clés en espérant que les gens vont pouvoir les retenir.

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Je passe de la fameuse page blanche du début de la création à l’effervescence d’idées et d’images accompagnées du texte qui entre dans la présentation. Je me retrouve à l’étape inverse où je dois enlever du matériel afin d’entrer dans un temps précis. C’est la partie la plus difficile. Garder des phrases courtes reliées à chacune des images présentées sans rien ajouter, sinon le temps file vite sur un stage à l’avant.

Sur place les conférenciers sont très intéressants et compétents. J’ai un stress intérieur qui augmente au fur et à mesure que mon tour approche. Une fois à l’arrière avec le micro-casque installé, je tombe dans ma bulle et j’arrive à l’avant sans penser à fuir la salle. Le départ est toujours en mode ajustement de ton et une fois que c’est réussi, je parcours la conférence, les mots me viennent automatiquement pendant que le minuteur descend. Je suis dans les temps et on m’affiche déjà qu’il me reste deux minutes que je respecte sans rien bousculer. Voilà c’est fait!

On me demande souvent pourquoi je mets du temps dans ce genre de projet. Bein parce que ça m’allume et que je me souviens plus jeunes avoir été inspirés par certains agriculteurs qui partageaient un p’tit bout de leur expérience. Aujourd’hui, je me retrouve en position d’avoir ce privilège encore un peu irréel… quand je me souviens de l’anxiété, de la transpiration et des blancs de mémoire que je pouvais ressentir pour une banale prestation orale de cinq minutes quand j’étais au secondaire.

Sans oublier les rires et les moqueries des étudiants de la classe qui me voyaient rougir de honte. C’était l’enfer pour moi! Je me contentais de longer les murs, de dîner rapidement et de monter à la bibliothèque afin d’avancer dans mes travaux ou d’étudier pour mes examens. C’était l’endroit le plus silencieux où je pouvais réussir à me concentrer.

Mes copains me disaient : capotes pas Caplette! Tu t’en vas étudier en agriculture… comme si je me dirigeais vers une profession qui ne nécessitait pas de connaissances approfondies. J’ai finalement fait partie des 95 étudiants choisis sur les 200 inscriptions. Je me suis fait de nouveaux collègues de classe qui carburaient aux mêmes aspirations que moi.

J’ai pris confiance graduellement et j’ai pu commencer à m’ouvrir et à faire ici et là de petites présentations. Jusqu’au jour où je me suis retrouvé sur le stage à l’auditorium de l’ITAQ. Pendant que je faisais ma présentation, j’avais spotté mon maître de stage qui réagissait avec un autre agriculteur juste à côté. J’étais inconfortable en me disant est-ce qu’ils rient de ce que je suis en train de présenter?

J’ai bien réussi et immédiatement après la sortie de l’auditorium, mon maître de stage s’est approché de moi et m’a dit avec un grand sourire : « woin Paul. Félicitation! » accompagné d’un rire contagieux. L’élève qui donne une leçon à son maître de stage! Ce fut une étape importante dans mon cheminement de confiance.

Alors, même si je stress toujours un peu avant une présentation, j’arrive à sortir le maximum de ce que je peux donner pour ensuite revenir à la maison crevé comme si j’avais fait une journée de 20 heures.

C’était donc ma dernière présentation de l’année. Je retourne au champ bien « crinqué »! Avec un sentiment de fierté. Je suis loin de la gêne de mon adolescence et maintenant je ne suis pas gêné de le dire haut et fort : Profession agriculteur.

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À PROPOS DE L'AUTEUR

Paul Caplette

Paul Caplette

Agriculteur et collaborateur

Paul Caplette est passionné d’agriculture. Sur la ferme qu’il gère avec son frère en Montérégie-Est, il se plaît à se mettre au défi et à expérimenter de nouvelles techniques. C’est avec enthousiasme qu’il partage ses résultats sur son blogue Profession agriculteur.