Jongler avec les coûts qui augmentent

Nos dépenses en fertilisation ont augmenté de 60%, alors qu’on a diminué nos quantités appliquées

Publié: 12 mars 2024

Jongler avec les coûts qui augmentent

Le climat financier est morose par les temps qui courent. Le marché des grains est en chute libre depuis plusieurs mois déjà et nous voilà rendu tellement bas que la nouvelle mode semble d’essayer de prévoir les plus bas niveaux à venir. Le même phénomène se répète quand les marchés s’emballent! C’est un jeu qui se fait dans les deux sens.

Ça fait tout de même plus de 600 jours qu’on s’y prépare. De mon côté, j’essaie de visualiser la différence dans notre coût de production des dernières années versus l’année qui s’en vient à grand pas. J’essaie de comparer mes objectifs de marge dans nos coûts de production 2018-2021 avec nos réalisations 2022-2023, pour mieux anticiper 2024.

J’aime bien partir à l’envers. Je place toutes nos obligations financières additionnées des frais fixes. Ça me donne une idée de la marge à viser dans nos coûts variables pour satisfaire l’ensemble de nos objectifs aux champs. Ensuite, je place trois zones d’objectifs de marge bénéficiaire, question de me donner une cible flexible dans le temps et la saison. Par exemple : une marge « survie au coût », une à 8% et une autre à 20%. Les pourcentages peuvent varier dépendamment de notre situation historique.

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Faire le plein pendant que j’essaie de faire le vide

Je me suis permis une petite escapade à un endroit où j’espérais ne pas trop voir de champs en culture. Question de faire le plein d’énergie en oubliant le plus possible les tracas.

Donc quand j’évalue mes performances culture par culture, j’essaie toujours de voir les trois niveaux de prix de vente que commande mon système de production. Je réalise que notre défi 2024 additionnel se situe dans certains postes de dépenses qui montent énormément, tout en ayant réussi à faire, en général, une meilleure gestion.

Pour mes comparaisons, je prends notre moyenne des cinq dernières années que je compare aux résultats 2023. Ça évite ainsi de comparer nos résultats rapprochés avec soit une année trop bonne ou trop basse.

Du côté des frais variables, nos dépenses en fertilisation ont augmenté de 60%. Comme si c’était un poste hors de contrôle, alors qu’on a diminué nos quantités appliquées comparativement à notre moyenne des cinq dernières années. Aussi 12% pour la facture des pesticides, et ce, même si on a réduit les quantités. Même chose du côté du prix des semences. Ensuite, on ajoute 15% d’augmentation en entretien des équipements, 54% d’augmentation sur les taxes municipales, 21% en électricité, 28% sur nos assurances de ferme, 34 % sur le crédit à court terme.

Avez-vous remarqué? Il y a eu plusieurs hausses dans les secteurs qui touchent l’énergie, voire les changements climatiques. Ça représente une charge additionnelle sur chaque hectare en culture. Tellement que notre raisonnement de laisser des zones non semées prends de la valeur.

Wow! Pas de panique! Je ne suis pas en train de dire qu’on ne sèmera pas nos terres. Par contre, les contours du petit boisé qui produisent à peine 10 tm/ha. Quand on regarde notre carte de rendement, ça devient une dépense nette versus laisser pousser du trèfle qui, lui, nourrit les pollinisateurs. Alors qu’est-ce qu’on fait? Du côté assurance, on a augmenté nos niveaux de franchises. Donc on supporte plus de risque, mais au final, la facture monte quand même.

Côté fertilisation, on évalue le coût d’opportunité. On maximise nos fumiers organiques tout en continuant de travailler des stratégies avec nos couverts végétaux en prenant soin d’apprendre à travailler avec des cultures moins exigeantes. Les taxes, on n’y comprend pas grand-chose. J’ai toujours l’impression qu’on s’en est fait passer une petite vite quand on a pris de l’argent destiné à l’agriculture qui au final finance les municipalités.

Oui, on aura des prix plus bas que les dernières années, mais, au moins, on a identifié des cibles à atteindre pour garder notre système efficace. Pas mal plus concret que d’essayer de prédire le niveau le plus bas des marchés à venir.

Profession agriculteur

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À PROPOS DE L'AUTEUR

Paul Caplette

Paul Caplette

Agriculteur et collaborateur

Paul Caplette est passionné d’agriculture. Sur la ferme qu’il gère avec son frère en Montérégie-Est, il se plaît à se mettre au défi et à expérimenter de nouvelles techniques. C’est avec enthousiasme qu’il partage ses résultats sur son blogue Profession agriculteur.