Depuis déjà une bonne période, c’est difficile d’avoir plus de deux journées consécutives de soleil. On marche continuellement nos champs de long en large sans nécessairement trouver les conditions gagnantes pour effectuer le semis. Jeudi dernier, le soleil était à nouveau de retour avec encore une fois des perspectives météo nous indiquant de nouveaux épisodes de pluie à plus ou moins court terme.
Une autre belle journée vendredi et pourtant notre sol évolue très lentement pendant que certains autour commencent à brasser un peu de sol ici et là. Et c’est généralement pendant cette période cruciale, dans une fenêtre serrée de prise de décision, que nous avons une période de doute par rapport à notre façon de travailler. Je devrais peut-être dire « de ne pas travailler » notre sol ou du moins le moins possible.
C’est probablement le plus gros piège d’essayer de suivre les dates d’intervention d’une technique plus conventionnelle, comparativement à une technique en mode semis direct. On ajoute un cran de difficulté supplémentaire si on doit gérer une bonne quantité de résidus. On doit planifier nos interventions en observant ce qui se retrouve sous nos bottines sur notre sol en essayant de comprendre et de favoriser l’évolution du système en place au lieu de se sentir en retard en regardant les surfaces se travailler tout autour.
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Faire le plein pendant que j’essaie de faire le vide
Je me suis permis une petite escapade à un endroit où j’espérais ne pas trop voir de champs en culture. Question de faire le plein d’énergie en oubliant le plus possible les tracas.
Plus jeune, ça nous est arrivé de tomber dans le piège. Aujourd’hui, on a maintenant l’expérience et on finit quand même par avoir des périodes de doute et on se dit : coup donc est-ce qu’on est allé trop loin? Trop vite? Déconnecté? Oui une santé du sol, oui une augmentation de notre matière organique en plus du carbone qu’on ajoute. Cérébralement, on sait exactement ce que ces techniques nous rapportent.
Aujourd’hui, ce n’est que de la théorie! L’excitation, le stress, la volonté d’aller aux champs est un réflexe ou un besoin aussi fort qu’un castor qui capote s’il entend de l’eau s’écouler près de SON barrage. Je ronge mon frein, mon bruxisme nocturne est à son maximum! C’est moi qui réveille mon réveil matin tellement l’adrénaline est dans le tapis. Je sais que je dois me contenir, que les faux départs sont impitoyables dans ce genre de système qu’on a mis en place. Ça « m’énarve » de constater que mes observations m’indiquent qu’il faudrait que la pluie prévue se repousse plus loin que dimanche même lundi. On est « faite »!

On a quand même plusieurs aménagements différents : couvert défolié, non défolié, des endroits sans couvert, même un 30 hectares de sol en travail minimum (chisel), certains sols légers, d’autres plus lourds, même notre secteur de sol qu’on considère parfait (on n’a jamais de sol parfait).
Dans tous ces endroits, on oublie les semis plus profonds que 4-5 cm, même pas possible de faire le canola à 2 cm. Présentement, on ne choisit pas la culture ni le type de couvert, on choisit le champ qui peut nous offrir un sol prêt à semer avec la perspective de réussite la plus élevée dans une fenêtre de 24-48 heures.
Une fois identifié, on essaie de forcer les choses avec un équipement qu’on a modifié qui nous permet de brasser les tiges tout en me permettant de me faire brasser moi aussi afin de laisser une chance au soleil et au vent d’atteindre plus facilement la surface du sol. On observe une certaine différence en fin de journée et ça me permet de me joindre à la famille afin de souligner la fête des mères.

Dimanche matin, Dame météo semble avoir écouté mes demandes et ça s’annonce beau. Je me sens aussi réconforté de lire des observations d’autres agriculteurs qui ont les mêmes inquiétudes que moi. Tout en précisant qu’on n’avait pas eu une vraie présence du soleil dans les dernières semaines en plus des vents qui viennent souvent de l’est.
Pas gagnant les vents de l’est! Et voilà que l’arrivé du soleil se confirme. Un peu de chaleur en plus et Dame météo nous donne notre lundi en prime. Tout est là! Les conditions se sont grandement améliorées. Notre passage de picoteuse nous aura permis d’avancer d’une journée notre date de semis sans bouleverser aucun ver de terre. Nos autres secteurs se sont transformés sous l’effet des 24 heures de soleil additionnelles. Le seul intrant manquant jusqu’à présent. On a seulement à apprendre à s’en servir et surtout éviter de trop serré les dents dans la nuit! Profession agriculteur.
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