Depuis la tempête de mardi dernier, les producteurs ont tenté de récolter ce qui restait dans les champs mais plusieurs se sont butés à de nombreuses difficultés : plants versés, épis au sol, dommages par la sauvagine, bris mécaniques en raison de la neige, un séchage difficile, etc.
Le dernier rapport de la Financière agricole sur les cultures au Québec confirme la situation catastrophique sur le terrain.
- Les températures froides ainsi que les précipitations de pluie et de neige ont continué de retarder l’avancement des travaux.
- Les fortes précipitations du 31 octobre, combinées aux vents violents du 1er novembre, ont engendré la verse des plants de maïs-grain dans plusieurs champs de la plupart des régions.
- Des gelées mortelles ont eu lieu partout sur le territoire québécois.
- Des précipitations de neige créant une accumulation au sol ont ralenti les travaux.
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En date du 12 novembre, 26% des champs de maïs-grain étaient récoltés. Le chiffre était de 91% pour le soya. Les régions qui avaient le moins progressé étaient l’Outaouais (3%), l’Abitibi-Témiscamingue (5%), Lanaudière (12%), Laurentides –Laval (12%), Montérégie-secteur Saint-Jean-sur-Richelieu (18%).
Dans son rapport, la Financière agricole indiquait au sujet de la récolte de maïs-grain qu’elle était lente et difficile « dans la majorité des régions dû aux récentes précipitations et de la verse causée par les forts vents avec un « taux d’humidité élevé et poids spécifique faible par endroits. La Financière agricole suit la situation de près« , pouvait-on lire ensuite. « La Financière agricole a demandé à ses conseillers en région de demeurer vigilant quant à la situation en cours, soit l’impact de la neige sur la récolte du maïs-grain et du soya, afin de bien circonscrire la situation et d’y répondre avec diligence, au besoin », fait savoir Cynthia Byrne, responsable des relations aux médias à la Financière.
La situation est telle que la détresse s’empare de plusieurs producteurs qui espéraient rattraper une saison difficile avec les récoltes et voient cet espoir s’envoler, malgré les efforts. La tâche est d’autant plus décourageante que le travail qui sera fait ne permettra pas de renflouer les coffres pour plusieurs. La qualité n’est pas en effet au rendez-vous dans la majorité des cas.
Nathalie Leblanc, productrice de porcs et de grandes cultures à Saint-Hugues est aux premières loges pour témoigner des difficultés vécues sur le terrain. En plus de leur propre récolte qui n’est pas terminée, ils offrent du travail à forfait. « C’est du jamais vu. C’est la première fois en 45 ans qu’on vit une situation pareille ». Les problèmes se font sentir à chaque étape de la récolte, de la moissonneuse batteuse qui brise, au séchoir qui gèle ou encore au niveau du transport qui se trouve bloqué par les va et vient en raison des livraisons qui se font refuser à cause de la qualité. « Tout le monde est à bout!. »
Selon un groupe Facebook qu’elle fréquente (Machinerie agricole), tout le monde se préparait cette nuit (vendredi) à travailler, sans savoir toutefois si les transporteurs seraient en mesure au matin de livrer dans les centre de grains. Ayant travaillé leur lot d’heures supplémentaires dans la dernière semaine, plusieurs camionneurs ne peuvent plus travailler. « C’est toute la logistique qui ne fonctionne pas », se désole la productrice. Elle a pu constater que la situation se répète d’une ferme à l’autre, en Montérégie comme ailleurs, puisqu’elle commercialise des semences. Chaque famille de producteur a son histoire d’horreur pour cette année 2019 où les difficultés se sont succédé sans temps mort. Si de son côté elle pense pouvoir se tirer financièrement de cette année, elle craint pour plusieurs autres agriculteurs qui pourraient faire faillite, vivre un burn out ou encore se suicider.
Mme Leblanc lance d’ailleurs un message à l’ensemble des acteurs de l’industrie agricole. Elle plaide pour une approche compréhensive de la part des banques et du gouvernement pour trouver des solutions et venir en aide aux agriculteurs dans cette période exceptionnelle. La productrice incite aussi ses congénères à demander de l’aide et chercher des solutions qui pourraient leur être plus accessible qu’ils ne pourraient le penser. Elle-même a trouvé un réconfort en échangeant sur les réseaux sociaux où trucs et entraide sont souvent au rendez-vous. Mme Leblanc encourage d’ailleurs à faire de même s’ils le peuvent puisque l’isolement est souvent le pire ennemi des producteurs dans ces situations. Elle anticipe sinon que l’année 2020 pourrait voir de nombreux producteurs lancer la serviette et vendre leur ferme, ou pire.
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Plusieurs services d’aide sont disponibles si un proche ou vous-même ressentez de la détresse. Selon plusieurs organisme de prévention du suicide, si des idées suicidaires surgissent, même brièvement, il s’agit d’un signal d’alarme.
Ce signal d’alarme signifie une détresse psychologique grandissante, que les moyens habituels pour gérer les difficultés ne suffisent plus et qu’elle doit aller chercher une aide extérieure. Ce signal d’alarme doit être pris au sérieux. Une aide extérieure aidera cette personne à identifier des façons pour diminuer la souffrance.
Au cœur des familles agricoles : 450 768-6995
Travailleur de rang : [email protected]
Chaudières-Appalaches : Si vous éprouvez des difficultés d’ordre psychologique ou émotionnel, communiquez avec la travailleuse de rang Nancy Langevin par téléphone au 450 768-6995 ou par courriel à l’une des adresses suivantes : [email protected]
Le Programme d’aide pour agriculteurs (PAPA), offre un accès sans frais à des répondants capables d’orienter les personnes vivant des situations difficiles vers les bonnes ressources 24h sur 24h, sept jours sur sept : 1 888 687-9197
Centre de prévention du suicide et l’Association québécoise de prévention du suicide : Si l’un de vos proches ou vous-même êtes en détresse, n’hésitez pas à consulter, à demander soutien, aide et assistance. Vous pouvez appeler sans frais, partout au Québec, au 1 866 APPELLE (277-3553).
Signes de détresse psychologique