Genève (Suisse), 22 octobre 2005 – L’Union européenne, divisée par l’offensive française sur l’agriculture, a dix jours pour convaincre ses partenaires de l’OMC d’accepter un compromis sur la baisse des barrières douanières dans le monde et éviter l’échec de la prochaine conférence ministérielle de Hong Kong.
Le commissaire européen Peter Mandelson s’est retrouvé dans une position délicate durant la semaine écoulée face à ses partenaires du « Club des cinq » (Australie, Brésil, Etats-Unis, Inde, UE), qui cherchent en petit comité à faire aboutir les négociations entreprises sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Ces derniers lui réclament de s’engager à réduire les droits de douane agricoles de l’UE au-delà des 20% à 50% de baisse offerte jusqu’à présent par Bruxelles. Les Etats-Unis réclament ainsi une réduction comprise entre 55% et 90%.
Dans le même temps, M. Mandelson se retrouve sous la pression de la France, première bénéficiaire de la politique agricole commune (PAC), qui lui a demandé en vain de ne plus discuter d’agriculture à l’OMC.
Ces pressions en sens contraires ont provoqué un blocage du cycle de négociations lancé à Doha, la capitale du Qatar, en 2001. Ce « cycle de Doha » doit en principe être bouclé aux deux-tiers lors de la conférence de l’OMC à Hong Kong du 13 au 18 décembre.
La précédente édition, qui s’était déroulée en septembre 2003 à Cancun, avait viré à un stérile affrontement Nord-Sud sur l’agriculture, les pays en développement exigeant des pays développés la fin des subventions agricoles qui pèsent sur les prix mondiaux.
« Nous risquons un autre Cancun s’il n’y a pas de mouvement rapidement », a averti le représentant américain pour le Commerce, Rob Portman, qui juge qu’un accord sur les droits de douane agricoles est un préalable urgent pour débloquer tout le reste de la négociation.
« Le processus est actuellement en soins intensifs. Le médecin attendra encore une dizaine de jours avant de décider ou non de débrancher la machine », a averti vendredi Crawford Falconer, le responsable de la négociation agricole à l’OMC.
Selon ses partenaires, Bruxelles devrait présenter dans le courant de la semaine une nouvelle offre de baisse des droits de douane lors d’une téléconférence entre M. Mandelson et ses quatre homologues du Club des cinq. Mais ce rendez-vous n’a pas été confirmé de source officielle européenne.
Le commissaire européen, que Paris soupçonne de vouloir brader la PAC, a dû se résoudre mardi à se voir coiffer d’un groupe d’experts des 25 pays membres qui supervisent toute nouvelle offre éventuelle.
M. Mandelson estime que l’UE est la seule à avoir fait des concessions depuis le début des négociations et exige des progrès sur les autres sujets que sont les services et les produits industriels.
Les Européens ne sont pas tout à fait seuls. Dénonçant la « chasse à l’UE », le groupe des pays importateurs nets de produits agricoles (G10: Japon, Corée du Sud, Suisse…) a menacé vendredi de rejeter les négociations en cours s’il n’obtient pas le droit de laisser certains produits davantage à l’abri de la concurrence internationale.
La tension croissante peut signifier que les protagonistes cherchent à impressionner leurs adversaires avant l’ultime compromis.
A l’OMC, les décisions se prennent habituellement « dans une cocotte-minute », se rassure le ministre australien du Commerce, Mark Vaile. « Je reste optimiste qu’on arrivera à avancer ».
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Source : AFP