Genève (Suisse), 26 mars 2004 – Les 146 pays membres de l’OMC espèrent relancer avant l’été leurs négociations cruciales sur l’agriculture, ont-ils indiqué à Genève, au terme d’une semaine d’intenses tractations qui leur a redonné un certain optimisme.
Le gouvernement chinois a annoncé par ailleurs qu’il était « d’accord pour des consultations » avec les Etats-Unis qui ont porté plainte contre la Chine devant l’OMC pour discrimination contre leurs exportations de micro-processeurs.
Un peu plus de six mois après l’échec de la conférence de l’Organisation mondiale du commerce à Cancun (Mexique), qui avait buté sur le dossier agricole, les négociateurs ont prévu de se revoir à quatre reprises d’ici la pause du mois d’août pour se mettre d’accord sur « le cadre » de leurs discussions.
Pour la plupart des délégations, il ne serait pas nécessaire qu’un tel accord entre dans le détail des chiffres, par exemple en ce qui concerne le niveau de réduction des subventions agricoles, a déclaré le président du groupe de négociations sur l’agriculture, l’ambassadeur de Nouvelle-Zélande Tim Groser.
L’agriculture est au coeur du cycle de négociations lancé à Doha (Qatar) fin 2001. Ce cycle, qui vise à libéraliser le commerce mondial tout en aidant au développement des pays pauvres, doit en principe être bouclé à la fin de l’année, mais les pays membres ont raté jusqu’à présent toutes les échéances qu’ils s’étaient fixées.
Le climat semble en tout cas avoir changé par rapport à Cancun, qui avait viré à l’affrontement Nord-Sud, les pays en développement exigeant que les pays riches éliminent leurs subventions agricoles avant toute discussion sur les autres dossiers.
M. Groser s’est félicité de ce que les discussions soient « passées au mode de l’écoute ». « Mais la phase de résolution des problèmes reste devant nous », a-t-il averti.
Jeudi, le négociateur américain Allen Johnson a appelé à profiter de la « fenêtre » ouverte pour négocier avant l’été, après quoi les Etats-Unis seront accaparés par l’élection présidentielle de novembre et l’Union européenne par le renouvellement de la Commission de Bruxelles.
« L’ambiance est positive mais il reste beaucoup de travail à faire et peu de temps pour y parvenir », a-t-il déclaré.
« Les choses se sont mises à bouger à nouveau cette semaine », s’est félicitée de son côté la négociatrice européenne Mary Minch. « Pour la première fois, les membres de l’OMC tentent d’écouter ce que les autres ont à dire ».
Le G20, qui regroupe autour du Brésil et de l’Inde les pays émergents anti-subventionnistes, s’est également félicité du « bon climat » des discussions. Le groupe a toutefois réitéré sa demande de fixer une date butoir pour l’élimination des subventions.
Sur cette question, l’UE semble avoir convaincu ses interlocuteurs de la nécessité d’un « parallèlisme » entre ses subventions à l’exportation et les autres formes de concurrence à l’export, comme les crédits à l’exportation versés par les Etats-Unis à leurs paysans. Le négociateur américain s’est en effet dit prêt à des discussions sur ce sujet, même si ses chiffre semblent différer largement de ceux évoqués par l’UE.
Les États-Unis se sont également dits prêts à réduire leurs subventions, mais ont demandé en échange aux autres pays, particulièrement les pays en développement comme l’Inde qui conservent des droits de douane très élevés, d’ouvrir davantage leur marché.
C’est précisément l’accès au marché qui pose « la plus grosse difficulté » des négociations, a souligné M. Groser.
Les pays importateurs agricoles nets du G10 (Japon, Corée du Sud, Suisse…) s’opposent en effet à une formule de baisse des droits de douane qui verrait une réduction trop forte des pics tarifaires qu’ils appliquent à certains produits.
A propos de la plainte contre la Chine devant l’OMC, le ministère chinois du Commerce a indiqué que « suite à la demande américaine de négociations, (il) accepte de discuter avec la partie américaine sur la question de la TVA et son abattement sur les circuits intégrés chinois », a indiqué le ministère dans un communiqué.
La plainte américaine, la première déposée par l’un des 145 partenaires de la Chine au sein de l’OMC depuis que Pékin a rejoint cette organisation en décembre 2001, vise une TVA de 17% imposée aux micro-processeurs étrangers, contre 3% pour les puces fabriquées à l’intérieur du pays.
Une période de consultation de deux mois est prévue lorsqu’un membre de l’OMC dépose une plainte contre un autre membre. Si ce processus de consultation échoue, le plaignant peut alors faire appel à un panel de trois experts qui ont six mois pour se prononcer.
Suite à l’annonce du dépôt de la plainte américaine le 18 mars, la Chine s’était déclarée surprise.
« Les discussions bilatérales se poursuivaient normalement » et « la partie chinoise ne comprend pas la soudaine demande de consultations dans le cadre du mécanisme de l’OMC chargé de résoudre les différends », avait déclaré le ministère du Commerce le 19 mars.
L’annonce de vendredi fait suite à des discussions vendredi à Pékin entre des responsables chinois et une délégation américaine conduite par le sous-secrétaire au Commerce Grant Aldonas et le représentant adjoint au Commerce Josette Shiner.
Les exportations américaines de circuits intégrés vers la Chine ont atteint l’an dernier 2,02 milliards de dollars.
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Source : AFP