Publié dans Le Bulletin des agriculteurs d’octobre 2010
Bien que les marchés se soient emballés à cause de la sécheresse en Russie, la situation actuelle est beaucoup moins problématique qu’en 2007.
par Jean-Philippe Boucher, agronome, M.B.A.
L’été 2010 marquera très certainement l’imaginaire de bien des producteurs. En raison principalement d’une importante sécheresse en Russie, le prix des grains a réalisé un surprenant revers. À lui seul le prix du blé, principale céréale cultivée en Europe et en Russie, a pratiquement doublé en l’espace de quelques semaines.
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Ce nouveau contexte du prix des grains maintenant bien connu, reste à savoir si leur niveau demeurera élevé au cours de 2010-11. À ce titre, le comportement du prix des grains n’est pas sans rappeler étrangement celui de 2007-08.
À l’été 2007, supporté par un niveau d’inventaires très serré, le prix du blé avait commencé sa forte progression qui lui a permis d’atteindre un sommet historique à plus de 400 $US/TM. Par la suite, comme on le sait, les inquiétudes entourant la forte demande mondiale de grains, notamment celle pour la fabrication d’éthanol, ainsi que les craintes de pénurie de blé et la spéculation ont fait en sorte que le prix des grains a été propulsé à des sommets inégalés. Qu’en est-il maintenant pour cette année ?
Du côté du blé, bien que les marchés se soient emballés, dans les faits, la situation est beaucoup moins problématique qu’en 2007. Selon les données du département américain de l’Agriculture (USDA), suivant la récolte de 2007, le niveau d’inventaires mondiaux de blé avait atteint un creux à 125 millions de tonnes. Du jamais vu depuis le début des années 80. Cette année, selon les données disponibles et considérant l’impact de la sécheresse en Russie, les inventaires de blé devraient s’établir entre 170 et 175 millions de tonnes. Ce niveau est bien loin de celui critique de 2007-08.
Avec un peu de recul, on peut donc penser que les marchés se sont emportés un peu trop vite à propos d’un éventuel manque à gagner mondial de blé cette année. Cependant, il faut aussi prendre en compte la situation des autres grains. Or, selon les dernières données du USDA, la demande mondiale de grains pourrait être plus forte que prévu en 2010-11. Encore une fois, cette situation rappelle ce qui s’est passé en 2007-08.
Est-ce que le prix des grains progressera cette année autant qu’en 2007-08 ? Rien n’est moins sûr. Par contre, considérant notamment la volatilité actuelle des marchés, l’an 2010-11 pourrait très bien fournir de nouvelles opportunités très intéressantes de mise en marché des grains.
Description des photos
Les photos sont publiées dans le magazine imprimé
1. Graphique : Évolution du prix du blé à la Bourse de Chicago de 2000 à 2010
2. Le prix du blé est celui du blé tendre rouge d’hiver. Bien que le blé cultivé au Québec soit principalement du blé roux de printemps, les variations de prix sont sensiblement équivalentes.