La météo n’aura certainement pas été facile pour les récoltes 2018 jusqu’ici. Mais au moins, de ce que je vois et entends, jusqu’ici côté rendement ça s’annonce dans l’ensemble assez bien, voir excellent, un peu plus dans le soya, mais aussi dans le maïs.
Personnellement, je ne serai pas surpris qu’on passe le cap du 4 millions de tonnes de récolté dans le maïs. La dernière fois que nous avions eu une récolte aussi importante remonte à 2016 puis 2007, années au cours desquelles nous avions dépassé la barre du 4,1 millions de tonnes. C’est d’ailleurs ce que les résultats de la Tournée des Grandes Cultures de cette année suggéraient, une récolte comparable à 2016…
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Plus de maïs québécois d’exporté cette année?
On m’a demandé si j’anticipais une hausse plus importante du prix du maïs au Québec cette année, étant donné que la demande à l’exportation était plus forte que la normale cette année. C’est une excellente question, mais difficile à répondre.
Dans le soya, on se rappelle que les données de Statistique Canada ont indiqué un recul des superficies ensemencées au Québec cette année (370 300 ha). Par contre, de ce que j’entends, plusieurs surprises ont été au rendez-vous cet automne côté rendement. Encore une fois, ceci concorde avec les résultats de la Tournée des Grandes Cultures, ce qui laisse entendre que nous pourrions battre les records précédents de rendement au Québec de 3,2 tonnes/ha atteints en 2015 et 2016. Si c’est le cas, après un léger recul de la récolte à 1,11 million de tonnes l’an dernier, nous pourrions atteindre cette année un nouveau record avoisinant 1,2 million de tonnes. Chaque fois que je regarde ces chiffres, je reste toujours un peu bouche bée sachant qu’en 2000, la production québécoise de soya n’était que de 400 000 tonnes. On parle donc d’une production qui a triplé depuis…
Évidemment, qui dit récoltes importantes au Québec dit aussi ,en principe, faibles prix. Pas de quoi de particulièrement encourageant. Cela étant dit, est-ce vraiment le cas présentement? À en croire ce qui circule, pas nécessairement.
Bien entendu, du maïs à moins de 195-200$ la tonne alors qu’il y a encore trois à quatre semaines, nous avons observé des brusques rebonds à plus de 215 $ la tonne, ce n’est pas ce qu’on peut appeler un bon prix. Même chose dans le soya où plus tôt cette année, on a vu un prix qui jouait dans une fourchette de 470 à 490 $ la tonne contre 430$ la tonne présentement. Est-ce que les récoltes importantes y sont pour quelque chose? Certainement. Par contre, on se rappelle qu’à priori, la récolte de cette année s’annonce plus imposante que celle de 2017. Et pourtant, à ce stade-ci, on ne peut dire que les prix s’apparentent encore à ceux de l’an dernier à la récolte.
En fait, si on jette un coup d’œil à la fin octobre 2017, nous avions déjà plongé sous 190 $ la tonne en moyenne dans le maïs, alors que dans le soya, c’était mieux, autour de 440-450$ la tonne.
À partir d’ici, dire que les importantes récoltes de cette année ont affecté les prix au Québec, rien de moins sûr. Certains diront qu’à 430 $ la tonne dans le soya, se semble pourtant vrai. On doit cependant se rappeler qu’au Québec, le prix du soya n’a jusqu’ici affiché qu’un recul de l’ordre de 7-10% dans les derniers mois. Pendant ce temps, le prix du soya à la bourse a encaissé une baisse de l’ordre de 15-20%, conséquence directe de la guerre commerciale États-Unis vs Chine qui s’étire, ainsi que de la nouvelle récolte record américaine pour une 3e année d’affilée. Considérant cette faiblesse importante du marché à Chicago, on pourrait donc dire qu’en réalité le prix du soya s’en sera jusqu’ici assez bien tiré malgré l’importante récolte de cette année au Québec.
Maintenant, tout ceci est bien intéressant, mais quelles conclusions en tirer?
D’une part, que l’importance des récoltes québécoises n’a pas nécessairement une influence directe sur les prix. Il est certain par contre que lorsque les acheteurs et centres de grains sont engorgés, les prix finissent par flancher. C’est le cas présentement. À partir d’ici, toujours pour le maïs, il sera intéressant de surveiller le creux qui sera atteint cette récolte-ci. Dans les dernières années, à la récolte, nous avons vu de 180-185 $ la tonne. Si nous pouvions observer un prix plus ferme cet automne, il y aurait matière à envisager une année plus intéressante.
D’autres parts, dans le cas du soya, on retient aussi que si le prix ce sera assez bien maintenu jusqu’ici malgré le revers important à la bourse, c’est que la demande est sans aucun doute au rendez-vous. Pas de surprise nécessaire sachant qu’à défaut de s’approvisionner aux États-Unis, les importateurs chinois se montrent beaucoup plus agressifs dans leurs achats de soya ailleurs, dont au Canada. À terme, cette situation pourrait donc jouer en faveur d’une fermeté supplémentaire des prix avec des inventaires québécois qui devraient afficher un bon recul malgré la forte production de cette année, spécialement si les États-Unis et la Chine n’arrivent pas à un accord.
Les prochaines semaines et mois risquent d’être très intéressants à surveiller…