Avec les coups d’eau qui s’accumulent depuis le début de juillet, les producteurs maraîchers et de petits fruits éprouvent des difficultés importantes tant au niveau des récoltes que des semis. Déjà, la Financière agricole du Québec indique avoir reçu des avis de dommages par la pluie excessive ainsi que les inondations.
Quelles seront les conséquences pour les producteurs qui comptent sur les détaillants pour écouler leurs productions?
Interrogée par Le Bulletin, Sophie Perreault, pdg de l’Association québécoise des distributeurs de fruits et légumes (AQDFL), signale que malgré les quantités d’eau impressionnantes reçues jusqu’à maintenant, il faut éviter de généraliser. Certains producteurs se débrouillent très bien, tandis que c’est la catastrophe pour d’autres. Il est vrai cependant que l’année 2023 s’avère particulière. « Il y a cette année une accumulation d’anomalies, que ce soit le gel, la sécheresse et la pluie. Chacun de ces événements s’est produit de manière très intensive, tout en étant récurrent, ce qui sort de l’ordinaire », indique-t-elle.
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Sophie Perreault déclare que les détaillants, qui font affaires avec des acheteurs, doivent respecter les prix conclus avec les producteurs, que ces prix soient à la baisse ou à la hausse. Également, l’achat local est priorisé par les acheteurs. « La chaîne d’approvisionnement est plus résiliente. S’il a un problème d’approvisionnement avec, par exemple, les choux-fleurs et la laitue, ils peuvent compenser avec d’autres produits. Ils doivent cependant respecter les prix annoncés et si des problèmes surviennent avec des produits locaux, ils vont les remplacer par des produits de l’étranger », ajoute-t-elle.
Parmi les craintes des producteurs, il y a celle de récolter des fruits ou légumes de qualité inférieure, donc de moindre valeur. À ce niveau, les détaillants sont prêts à faire preuve de souplesse, mais jusqu’à un certain point. « Les détaillants peuvent faire preuve de plus de tolérance quant au calibre des fruits et des légumes et de leurs spécifications. Il y a d’ailleurs plus de communication entre les acheteurs et les producteurs. Mais il y a des limites qu’on ne peut accepter et des standards à respecter vis-à-vis des consommateurs », dit Sophie Perreault.
La dirigeante de l’AQDFL encourage les producteurs maraîchers à prioriser certains marchés en visant cette année le local plutôt que l’exportation. La communication est aussi la meilleure approche en cas de soucis à respecter un contrat. « On veut savoir. On n’aime pas les surprises. Il faut en parler en premier lieu aux acheteurs si on a des problèmes. » Certaines chaînes ont leurs propres inspecteurs qui marchent les champs, mais ce n’est pas généralisé.
Quant à savoir si les producteurs locaux doivent craindre de voir leurs marchés disparaître au profit de produits étrangers si les changements climatiques compliquent les récoltes, Sophie Perreault avoue être inquiète, mais dit ne pas vouloir franchir ce pas. « On n’en est pas là. On veut laisser de la place aux producteurs d’ici. »
La solution réside selon Sophie Perreault dans l’innovation, par exemple dans les méthodes d’entreposage, la mise en marché ou la manière de cultiver. Il faut aussi mieux éduquer les consommateurs, autant au niveau des réalités que vivent les producteurs que dans leurs habitudes d’achats qui gagneraient à être plus souples et accommodantes.
Si des produits venant de l’étranger sont achetés, la dirigeante rappelle qu’ils doivent respecter des cahiers de charges avec les mêmes exigences qu’ici.
Tout le débat est toutefois centré sur un enjeu central. « Notre priorité est la sécurité alimentaire. »