Ayant tous les deux étudié en agroéconomie et travaillé dans ce domaine, Emmanuelle Vincent et Simon Laflamme de la Ferme Belflamme connaissent l’importance de compter et d’analyser. Cette compétence a été mise à l’épreuve à plusieurs reprises comme jeunes entrepreneurs agricoles.
Lorsqu’est venu le temps d’évaluer le projet de passer à la stabulation libre avec robots de traite, ils ont évalué une option inusitée : sortir le troupeau Holstein pour le remplacer par des Jersey.
Holstein vs Jersey : une question d’espace
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Tout a débuté en 2016 alors qu’Emmanuelle et Simon achetaient 54 kilogrammes de quota et un troupeau laitier par un transfert non apparenté. À pleine capacité quatre ans plus tard, les cédants acceptent de vendre plus tôt que prévu, ce qui permet au couple d’amorcer son projet de transformer l’étable.
En visitant d’autres installations, ils rencontrent des producteurs qui avaient des Jersey. L’idée les a séduits. « Ça nous montrait dans combien petit ça rentre des Jersey », raconte Emmanuelle. Ils ont fait des calculs. « L’objectif était de voir combien de revenu de plus on pouvait aller chercher », dit Simon.
En transformant l’étable en stabulation libre et en y ajoutant un robot, ils pouvaient installer 40 logettes pour des Holstein. En adaptant la taille des équipements pour les Jersey, il devenait donc possible d’installer 74 logettes et d’ajouter un appentis.
Le même calcul a été fait pour les terres et la fosse à lisier. « Du côté des terres, la Jersey produit 55 % moins de phosphore, raconte Simon. On peut donc garder tout le fumier sur nos terres. Ça a été majeur dans notre décision. » La fosse pouvait accueillir le fumier de 75 vaches Holstein et sa relève ou 127 vaches de race Jersey et sa relève.
La Jersey: une vache curieuse qui apprend vite
Le 30 mars 2021, le troupeau Holstein était vendu. Sans revenu, ils devaient faire vite. Ils ont cassé le béton, fait tomber le mur pour construire l’appentis, tout reconstruit et le 15 juin, ils partaient le robot avec les Jersey. Le troupeau de départ provenait d’une ferme ontarienne qui cessait ses activités. Ils ont commencé avec 50 vaches achetées, 8 qui leur appartenaient et 22 génisses achetées qui allaient vêler dans les trois mois suivants. À l’automne, ils réalisaient leur quota.

Les premières semaines de démarrage ont été difficiles parce que les vaches n’étaient pas habituées à la stabulation libre. « Ça a été deux semaines très intenses, mais après, ça a quand même bien été, raconte Simon. On a été surpris de voir à quel point elles ont appris vite. »
Emmanuelle et Simon ont vite découvert que les Jersey sont curieuses et elles s’adaptent facilement au robot. « Elles vont souvent au robot pour voir s’il y a de la moulée ou pour se faire traire, raconte Simon. On l’a su après, mais la Jersey, on l’appelle une vache hyperactive, c’est-à-dire que le cycle de manger, se lever, se coucher et se faire traire, elles le font trois ou quatre fois plus souvent par jour qu’une vache Holstein. »
1,5 kg par vache par jour
Ils ont continué d’acheter du quota. Après seulement un an, ils ont pris la décision d’allonger l’étable et d’installer un deuxième robot. Le 15 janvier 2023, il entrait en fonction.
Ils ont maintenant 80 vaches en lactation en moyenne. Les 109 logettes sont en partie occupées par les vaches taries et les taures gestantes. L’étable a un potentiel de 165 kilogrammes de quota laitier avec une moyenne de 1,5 kg par vache par jour. Ce seuil a été atteint en avril dernier, avec le changement d’alimentation. La moyenne de leur groupe conseil, le CMCA, est de 1,34, toutes races confondues.

De plus, leur troupeau mange la moitié moins de fourrage que les autres. « Et elle fait plus de gras pareil », dit Emmanuelle. Pour l’instant, Emmanuelle et Simon travaillent à améliorer leur marge alimentaire.
Finalement, Emmanuelle et Simon sont heureux de leur choix. « Je le referais demain matin, dit Emmanuelle. Ce n’est pas contre la Holstein. On a réutilisé ce qu’on a ici. Ce ne serait pas possible de faire le quota ici avec la Holstein et les bâtiments qu’on a. »
*Cet article de Marie-Josée Parent est une version tirée et adaptée du magazine Le Bulletin des agriculteurs, édition septembre 2025.
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