Depuis la CAPERN, on entend murmurer différents changements à venir par rapport aux actes agronomiques qui tournent autour des pesticides. Je comprends l’idée générale qu’on a d’en réduire leur utilisation le plus possible, mais j’ai l’impression qu’on s’y prend de la mauvaise façon en lisant les intentions de projet de loi qui semblent se préciser un peu plus. Pour moi, ça me paraît de plus en plus flou. En gros, ça se résume en quatre grands thèmes de changement.
- Séparer la vente d’intrants agricoles et les services-conseils offerts aux producteurs agricoles par les agronomes.
- Préciser le champ d’exercice de la profession d’agronome ainsi que les activités professionnelles qui lui sont réservées, comme c’est le cas pour plusieurs autres lois professionnelles.
- Établir par règlement les activités des technologues professionnels.
- Moderniser la gouvernance de l’Ordre des agronomes du Québec (OAQ) en modifiant notamment la composition du conseil d’administration et le processus électoral des administrateurs pour renforcer l’indépendance de l’organisation.
Si je comprends bien entre les lignes, je ne pourrai plus acheter mes produits de mon représentant agronome qui vend les produits dont j’ai besoin. Ma relation avec mon représentant est plutôt une relation d’accompagnement et d’information sur les spécificités de chacun des produits que je peux vouloir utiliser. Comme plusieurs, je fais mon dépistage et j’établis une stratégie pour ensuite commander le produit approprié. Avec le nouveau projet de loi, j’ai l’impression que je devrai contacter un agronome additionnel, qui devra probablement venir voir mes champs pour approuver l’utilisation du produit à utiliser.
À quoi ça sert de faire mon dépistage si je dois attendre un avis extérieur pour prendre une décision. Je me sens comme si, de l’extérieur, je n’avais pas les compétences ni les connaissances de mes propres champs, des diagnostics et des interventions que je peux poser comme agriculteur. En gros, je suis trop niaiseux pour faire un bon travail! C’est insultant! Pourtant, je suis formé, j’ai un diplôme aussi valide qu’un diplôme d’agronome pour exécuter les bonnes tâches au champ. On fait un bon dépistage, mesuré, documenté, avec des suivis des résultats, nos registres de pesticides sont complets, en plus d’avoir réussi de bonnes réductions dans les dernières années. Donc je considère que je fais un bon travail, alors pourquoi compliquer le processus?
Cette année, on doit commander nos produits à l’avance pour être certains de les obtenir. Si je fais mon dépistage vendredi pm, le temps d’obtenir un deuxième avis, il y a de grande chance que le stade parfait d’intervention soit carrément dépassé. Ça va être le bordel dans le champ! J’ai l’impression qu’on veut contrôler le processus d’en haut sans trop se salir les mains pour satisfaire certaines inquiétudes au lieu de mettre les mains directement dedans. J’ai un drôle de sentiment.
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J’ai déjà lu que ce n’était qu’un faible pourcentage des agronomes qui touchaient aux pesticides. Ah, comme s’il y avait différente catégorie d’agronome. Des bons et des méchants. J’ai même l’impression qu’il y a de moins en moins d’agronomes oeuvrant dans ce domaine. Ça m’agace! Pourtant, bien des agronomes de renommée, et non liés à aucune compagnie, nous le mentionnent qu’il y a des atouts agronomiques à utiliser des pesticides de façon raisonnée. On n’a même plus de guide d’utilisation des produits fonctionnels. Les agronomes d’ici non liés utilisent les guides d’ailleurs, plus détaillés, et plus complets avec plus de vécu. C’est quand même spécial!
Pourquoi ne pas :
-S’assurer de former des agronomes additionnels spécialisés.
-Reconnaître et améliorer les compétences des agriculteurs.
-Ajouter des formations annuelles sur les bienfaits de la lutte intégrée et des connaissances des produits et de leur bonne utilisation.
-Pourquoi pas une certification super agriculteur (comme les super infirmières)?
Ce sont des idées rapides d’améliorations, mais j’en oublie certainement. Ça se résume à faire quelque chose, au lieu de pondre une loi pour nous empêcher de faire autre chose. En gros : quelle profession accepterait de se faire traiter d’incompétent dans son travail? Comme si un pharmacien ne pourrait plus conseiller sur les médicaments qu’il vend? L’agronome du financement ne pourrait plus faire de profits sur le prêt qu’il m’offre? À la limite, le représentant à la SQDC ne devrait pas me vendre le produit qu’il me conseille. Je devrais plutôt le prendre sur le trottoir d’un vendeur non lié ! C’est pratiquement de la discrimination professionnelle.
Donc j’espère qu’on pourra enfin reconnaître nos compétences d’agriculteurs, même si on n’a pas toujours les trois bonnes lettres à la fin de notre nom, selon certains qui semblent nous regarder de haut. On se doit d’être fier du travail qu’on réussit à accomplir sur nos fermes avec les moyens qu’on a. On s’améliore continuellement et en plus on coûte moins cher. Profession agriculteur.