Avec huit États américains ayant confirmé des vaches laitières infectées par l’influenza aviaire, la situation préoccupe les autorités et les associations de producteurs et de vétérinaires. Pas seulement aux États-Unis, mais ici également au Canada.
Le président de l’Association des médecins vétérinaires du Québec (AMVPQ), Jean-Yves Perreault, explique que depuis le premier cas au Texas (25 mars 2024), les organisations œuvrant dans le secteur bovin sont sur un pied d’alerte. L’AMVPQ est en lien avec l’American Association of Bovine Practitioners (AABP) qui couvre l’Amérique du Nord, l’Association canadienne des vétérinaires bovins (ACVB), ainsi que les Producteurs laitiers du Canada (PLC), les Producteurs laitiers du Québec (PLQ), l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), et le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ).
« Depuis le premier cas au Texas, c’est presque tous les jours qu’il y a des communications qui viennent de l’AABP, des gouvernements, des associations diverses qu’on relaie et qu’on assure le suivi auprès des producteurs et des vétérinaires », explique Jean-Yves Perreault. Vendredi, les PLC ont même organisé un webinaire pour expliquer la situation à ses membres.
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Pour l’instant, il n’y a aucun cas de bovins infectés par l’influenza aviaire au Canada. Aux États-Unis, 24 troupeaux laitiers ont été déclarés infectés en trois semaines.
Inquiétude relative
Le professeur Jean-Pierre Vaillancourt de la Faculté de médecine vétérinaire, spécialiste de la biosécurité dans les fermes et des stratégies de contrôle des maladies infectieuses à déclaration obligatoire, n’est pas très inquiet pour la santé des bovins laitiers.
Toutefois, le fait que le virus qui sévit depuis plusieurs années ne se comporte pas de la façon classique le préoccupe davantage. Ce virus affecte davantage les palmipèdes qui ne meurent pas rapidement. C’est ce qui a permis au virus d’arriver en Amérique du Nord là où on ne l’attendait pas, et qu’il a pu se propager partout en Amérique.
Jean-Pierre Vaillancourt est inquiet par des mutations possibles du virus. « S’il fallait que des porcs soient infectés, ça me préoccuperait parce que l’humain partage les mêmes récepteurs que les porcs », dit-il. Les récepteurs, c’est ce qui permet au virus d’infecter une espèce.
Selon Jean-Pierre Vaillancourt, les premiers cas chez les vaches laitières américaines ont été détectés un peu par hasard. La possibilité qu’une vache malade déplacée dans un autre État soit la cause de la propagation dans les troupeaux laitiers est peu probable. C’est la présence d’oiseaux infectés à proximité de la ferme qui est ciblée comme cause.
Selon lui, la multiplication récente de fermes infectées serait liée à un plus grand nombre de tests. « La raison pourquoi ils ont testé les vaches, c’est parce qu’ils ont vu qu’il y avait plein d’oiseaux morts autour de ces vaches-là », explique-t-il. Et lorsque des vaches ont été testées positives, d’autres cas ont été testés.
Niveau d’alerte élevé
Jean-Yves Perreault explique que le niveau d’alerte est actuellement élevé. Il anticipe une baisse du niveau de risques avec la saison chaude, car le virus survit moins longtemps en été. « Considérant qu’il y a quand même une présence du pathogène assez importante dans la faune – les animaux sauvages – il y a un degré de vigilance et d’alerte qui est élevée », explique Jean-Yves Perreault.
Pour un troupeau bovin infecté par le virus de l’influenza aviaire H5N1, les animaux sont peu malades. Les animaux âgés sont plus affectés que les jeunes. Le virus attaque les voies respiratoires et cause une hausse de température. Par conséquent, les vaches peuvent démontrer une légère baisse de production laitière. La transmission d’un bovin à l’autre est peu élevée, comparativement aux espèces aviaires.
Contrairement aux élevages avicoles, les troupeaux bovins atteints ne sont pas abattus. La politique est de circonscrire le site pour mettre le troupeau en quarantaine et de mettre en place des mesures de biosécurité. Les vaches malades se rétablissent après quelque temps.
Selon Jean-Yves Perreault, le fait que les troupeaux laitiers soient confinés à l’intérieur apporte une certaine protection. Toutefois, il souligne que la tendance à retourner les animaux dehors pour une amélioration vers le bien-être animal, avec des animaux au pâturage ou en cours d’exercice, peut augmenter le risque. Le virus est présent dans la faune sauvage. «Le risque zéro n’existe pas», dit-il.
Selon Jean-Yves Perreault, il serait imprudent de dire qu’il n’y aura pas de cas au Québec et au Canada. Jean-Pierre Vaillancourt pense lui aussi que le Canada ne sera pas épargné.
Jean-Yves Perreault explique aussi que les associations bovines voudraient renommer le virus puisqu’il ne s’agit plus uniquement d’un virus aviaire. Le virus peut être présent chez plusieurs espèces et démontrer des signes cliniques différents chez une espèce par rapport aux autres. Jean-Pierre Vaillancourt explique qu’il y a actuellement plus de 40 mammifères infectés par le virus et quelque 272 espèces aviaires.
L’ACIA rappelle que les produits laitiers pasteurisés ne présentent aucun risque pour la consommation. Seul un travailleur de ferme a été infecté jusqu’à ce jour.