Si la tendance se maintient, il sera difficile de ne pas vendre ses grains à un prix intéressant en 2011.
Publié dans Le Bulletin des agriculteurs de décembre 2010
par Jean-Philippe Boucher, agronome, M.B.A.
Les prix élevés des grains que nous avons connus cette année à la récolte sont peu communs. En fait, si l’on se fie aux statistiques, ce n’est qu’en sept occasions au cours des 27 dernières années qu’ils ont été au-dessus de la moyenne de prix sur dix ans. Dans ce contexte exceptionnel, il vaut donc la peine de se questionner à savoir si les prix demeureront élevés tout au long de 2011.
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Statistiquement, des sept années relevées, seulement trois ont connu une baisse de prix d’en moyenne 2 à 3 % par rapport au prix à la récolte au cours des mois suivants. Ceci laisse donc quatre années au cours desquelles les prix ont plutôt progressé suivant la récolte d’en moyenne 1 à 56 %. Aussi bien dire qu’il serait difficile de ne pas vendre à un prix intéressant en 2011.
La partie n’est cependant pas gagnée d’avance. Certains facteurs doivent être surveillés de près, dont deux en particulier : la demande de grains et la spéculation.
Comme on le sait, les inventaires de maïs et de soya aux États-Unis devraient être serrés en 2010-11. Cependant, cette possibilité repose sur la présomption que la demande de grains sera forte en 2011. Or, considérant les prix que l’on connaît, il y a lieu de s’interroger à savoir si la demande ne sera pas forcée de se rationaliser. C’est d’ailleurs ce qui est survenu au cours de la période de 2006 à 2008, alors que plusieurs usines d’éthanol notamment ont cessé leurs activités.
Il faut se rappeler aussi que la hausse des prix a profité d’un nouvel engouement des marchés financiers pour les grains. Par l’injection de liquidités importantes et par un insatiable appât du gain, les spéculateurs se sont servis des incertitudes entourant la production dans le monde et aux États-Unis (ex. : sécheresse en Russie, baisse de rendement aux États-Unis), pour faire progresser les prix de manière exceptionnelle. Ils ont misé également sur l’éventualité que la demande de grains resterait forte en 2011. Mais, encore une fois, à l’image des années 2006 à 2008, les spéculateurs pourraient très bien se volatiliser au moindre signe d’une menace économique ou financière complètement étrangère au contexte réel du marché des grains.
Enfin, tout indique que l’an 2011 devrait être profitable pour les producteurs de grains. Par contre, comme toujours, il en faudrait certainement très peu pour que les prix des grains changent de cap sans crier gare.
Graphique: Évolution du prix annuel de maïs et du soya depuis 1983-84