Le gouvernement fédéral a décidé d’intervenir au lendemain de la mise en place d’un lock-out dans le secteur ferroviaire canadien. Le ministre fédéral du Travail, Steven MacKinnon, a en effet mandaté le Conseil canadien des relations industrielles pour qu’il impose un arbitrage exécutoire et définitif afin de mettre fin au lock-out décrété le 22 août peu avant minuit par le Canadien National (CN) et le Canadien Pacifique Kansas City (CPKC). Les deux entreprises ont accepté et annulé la mesure, ce qui dans les faits ramène les 9300 employés au travail. Ce sera le rôle de l’arbitre de trouver une entente entre les deux parties. En attendant, c’est l’ancienne convention collective qui demeure en vigueur. Malgré la courte durée de l’interruption de services, des conséquences se font déjà sentir, entre autres dans le secteur agricole.
Pour avoir déjà joué dans ce film, le secteur agricole en entier retenait son souffle devant ce neuvième conflit en six ans à affecter le réseau ferroviaire du Canada. Cette fois, ce sont simultanément le Canadien National (CN) et le Canadien Pacifique Kansas City (CPKC) qui sont affectés par le conflit de travail, une première dans l’histoire du Canada. Ces dernières représentent 75 % du transport de marchandises au pays. Les deux entreprises ferroviaires ont exécuté leurs menaces d’instaurer un lockout si jamais les employés, représentés par les Teamster, déclenchaient la grève ce 22 août.
Les Producteurs de grains du Canada (PGC) ont tiré la sonnette d’alarme devant ce double arrêt de travail qui survient à un moment critique pour les récoltes céréalières, puisque les producteurs dépendent des chemins de fer pour acheminer les grains aux marchés.
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La Tournée des grandes cultures, dont le but est d’évaluer le potentiel de rendement du maïs et du soya, aura lieu cette année le 19 août dans plusieurs régions du Québec.
Les silos à grains étant situés sur les voies ferrées, les producteurs comptent sur le réseau pour commercialiser et vendre leurs grains. En l’absence d’alternative viable au transport ferroviaire, les retards entraîneront une perte de ventes, une dégradation de la qualité du grain et une perte substantielle de confiance du marché.
Les PGC estiment que l’impact initial de ce double arrêt coûtera aux producteurs céréaliers plus de 43 M$ par jour au cours de la première semaine seulement. Les pertes devraient atteindre 50 M$ par jour la semaine suivante et au-delà, si les arrêts se poursuivent, selon l’organisme.
« La fermeture totale des deux chemins de fer nationaux du Canada constitue une crise sans précédent pour l’industrie céréalière », a déclaré Kyle Larkin, directeur exécutif des PGC. « Avec les arrêts de travail au CN et au CPKC, c’est toute notre chaîne d’approvisionnement qui est en danger », a-t-il ajouté.
Le Canada compte plus de 65 000 producteurs de céréales, dont les cultures représentent 35 G$ d’exportations.
Andre Harpe, président des PGC, a dit craindre pour sa part des pénuries alimentaires et une baisse des revenus des agriculteurs, déjà aux prises avec des hausses de coûts de production et des matières premières.
Les Éleveurs de porcs du Québec ont fait échos à ces inquiétudes. Les impacts sur l’ensemble du secteur porcin pourraient prendre la forme d’une pénurie de propane et de tourteau de soya, ainsi que des difficultés à acheminer la viande de porc aux clients à des fins d’exportation. Ils disent être en discussion avec leurs partenaires afin de trouver de pistes de solutions face aux problèmes qui pourraient survenir.
Un conflit aux conséquences majeures pour l’économie
Les conséquences de l’arrêt du transport sur les chemins de fer pour l’économie canadienne sont importantes puisque 1 G$ de valeur de marchandises sont déplacées chaque jour par ce moyen au pays. Selon l’agence Moodys, les pertes par journée d’arrêt s’élèvent à 341 M$. En plus du secteur agricole, les secteurs manufacturier, pétrolier, chimique et automobile sont affectés.
La chaîne d’approvisionnement au pays est d’ailleurs déjà perturbée, même si une reprise rapide du transport devrait prendre place. Des entreprises ont ralenti leurs commandes en prévision du conflit de travail, ce qui veut dire que certains biens sont déjà limités. En cas de biens manquants, des entreprises pourraient être obligées de faire des mises à pied ou de réduire leurs heures d’ouverture.
Les impacts devraient se faire sentir rapidement puisque seulement de trois à quatre jours sont nécessaires avant de voir des conséquences. Les experts estiment que chaque jour d’arrêt de travail demandera de trois à cinq jours pour éliminer les goulots d’étranglement et reprendre normalement les activités.
Les secteurs impliqués s’attendent à des accumulations de biens dans les ports. Les stocks pourraient aussi ne pas être aux bons endroits, d’où une relocalisation et, par conséquent, des frais supplémentaires pour les entreprises et les consommateurs.
Les plans de contingences sont limités puisque plusieurs biens, comme c’est le cas en agriculture, sont difficilement transportables par d’autre moyen que le train. Il en coûte d’ailleurs trois fois plus cher d’effectuer le transport par camion que par train.
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