Avec la sécheresse dans le Midwest américain en juin dernier, nous avons profité d’un excellent rallye météo qui a permis aux prix du maïs et du blé de bondir de manière très intéressante.
Malheureusement, comme c’est souvent le cas avec les rallyes météo, le retour de précipitations dans le Midwest aura brusquement calmé le jeu. Mais ce n’est pas tout…
Le fait est que les producteurs américains auraient finalement semé 2,1 millions d’acres de plus de maïs, pour un peu moins de blé et surtout 4 millions d’acres de moins de soya.
À lire aussi
Les cultures nous parlent, est-ce que vous les écoutez?
Pour chaque culture, il existe un moment où une simple marche dans la parcelle permet de détecter les anomalies susceptibles d’affecter le rendement et dont les symptômes peuvent s’estomper avant la récolte.
Dans son rapport mensuel de juillet, publié la semaine dernière, le département américain de l’Agriculture (USDA) aura néanmoins considéré la sécheresse importante de juin dernier dans le Midwest américain.
C’est rarement le cas, mais l’instance américaine aura ainsi choisi de réduire sa projection de rendement moyen US dans le maïs de -4 à 177,5 bo/acre pour cette année. Sauf qu’avec l’augmentation des superficies semées, la récolte américaine de maïs a malgré tout été augmentée de +55 à un record de 15,320 milliards de boisseaux. Par conséquent, on prévoit aussi des stocks de maïs américain qui devraient grimper cette année à leur plus haut niveau depuis 2016-2017, à 2,262 milliards de boisseaux.
La situation est différente dans le soya alors que le USDA aura choisi de ne pas revoir pour l’instant à la baisse sa prévision de rendement en soya US pour cet automne qui demeure à 52 bo/acre. Avec moins de superficies ensemencées, mais aussi moins de trituration et d’exportations prévues, les stocks américains de soya de la prochaine année ont donc été abaissés de -50 à 300 millions de boisseaux, 45 millions de boisseaux de plus que l’an dernier.
Finalement, dans le cas du blé (tous types confondus), le UDSA prévoit de meilleurs rendements que prévu à 46,1 boisseaux/acres. Malgré les superficies ensemencées un peu moins importantes et une demande un peu plus importante, les stocks de la prochaine année sont donc prévus à la hausse à 592 millions de boisseaux, mais seulement 12 millions de boisseaux de plus que l’an dernier.
Maintenant, que conclure de tous ces chiffres?
Le fait est que nous avons encore des chances que les prix des grains puissent nous surprendre d’ici l’automne. Ceci me semble particulièrement le cas pour le soya, mais c’est encore possible aussi avec le maïs et le blé. Pourquoi? Essentiellement, nous sommes encore « tôt » en saison pour statuer que les rendements américains seront au rendez-vous.
Dans le cas du maïs, les statistiques disent que depuis 1993, en seulement deux occasions les rendements qui avaient été abaissés en juillet (1993 et 2012) ont été réduits davantage par la suite. Donc en d’autres mots, si on se fie à ces chiffres, il serait surprenant que le rendement moyen américain de maïs soit de nouveau abaissé.
Néanmoins, le stade de la pollinisation devrait être autour de 40% atteint cette semaine aux États-Unis. Ceci laisse encore un 60% exposé à un risque de conditions trop chaudes pendant ce stade. Or, si on prévoit du temps encore frais cette semaine pour une bonne proportion du Midwest américain, on s’attend aussi à un retour à des conditions anormalement chaudes à partir de la semaine prochaine. Considérant ensuite l’état des cultures de maïs américain qui demeure pour l’instant le moins bon des cinq dernières années, les marchés pourraient encore s’inquiéter que les rendements soient affectés par des conditions trop chaudes pendant la pollinisation.
Ensuite, concernant le soya, on retient que le rendement est déterminé surtout pendant le stade du remplissage des gousses qui a lieu principalement en août aux États-Unis. Or, si on jette un coup d’œil à la carte des conditions de sécheresse aux États-Unis, il y a encore 57% des superficies en soya qui sont en situation de sécheresse. Si les précipitations sont insuffisantes dans les prochaines semaines, on ne devrait donc pas se surprendre de voir le marché du soya bondir.
Enfin, dans le cas du blé, disons que les préoccupations « météo » sont moins grandes que pour le maïs et le soya. La récolte de blé d’hiver est en cours, à plus de 50% complétée, et l’épiaison du blé de printemps est complétée à plus de 80%. Par contre, au moment d’écrire ces lignes, la Russie vient d’annoncer qu’elle suspendait sa participation à l’accord d’exportation de grains de la Mer Noire. Un imprévu intéressant qui devrait alimenter aussi un rebond des prix.
Bref, avec un pas de recul, on peut encore envisager qu’un autre rallye des prix des grains ait lieu dans les prochaines semaines. Mais comme le soulignent plusieurs analystes, si c’est le cas, ceci constituera alors une excellente opportunité de réaliser de nouvelles ventes de grains.
