Les impacts des changements climatiques et la transformation requise pour le secteur agricole sont d’une telle ampleur qu’ils sont jugés équivalents au passage d’une agriculture de subsistance à une agriculture commerciale et professionnelle, telle que vécue au Québec au cours des années 50 à 70.
C’est dans ces mots que le Groupe d’experts en adaptation aux changements climatiques (GEA) a résumé la situation pour le secteur agricole et alimentaire au Québec auquel elle consacre un passage dans un rapport qu’il a remis le 28 mai. « Dans ce contexte, il apparaît donc urgent d’accélérer le déploiement de mesures de soutien et de réduction des risques climatiques des entreprises agricoles, en appuyant proactivement et financièrement le secteur dans l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies d’adaptation », poursuivent les auteurs du rapport.
Cette déclaration n’est pas sans rappeler les demandes de l’Union des producteurs agricoles (UPA) qui dénonçait le manque de soutien financier et l’inefficacité des programmes de la Financière agricole face à la situation économique actuelle, mais également l’impact des changements climatiques sur les activités agricoles.
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Le GEA considère que l’agriculture et l’alimentation constituent un « système essentiel particulièrement vulnérable aux changements climatiques » et que le premier mérite une attention particulière dans le contexte des changements climatiques, ce dernier étant particulièrement vulnérable. Avec une sécurité alimentaire mondiale fragilisée face aux crises imposées par les changements climatiques, le territoire agricole est vu comme un « actif stratégique » et un système essentiel parce qu’il produit des biens et séquestre du carbone.
Le rapport ajoute que l’agriculture québécoise a dû s’adapter pour répondre à la demande croissante, au marché et aux cadres politiques, avec comme conséquence des impacts environnementaux. Dans ce contexte, « il apparaît impératif que les politiques et réglementations agricoles contribuent à envoyer les bons signaux et à soutenir l’adoption de pratiques responsables, face à des forces du marché qui ne les encouragent pas toujours », lit-on dans le rapport.
Le GEA recommande donc des programmes favorisant l’adaptation aux changements climatiques et contrebalançant les contraintes négatives provenant de l’extérieur. Il est aussi indiqué que les programmes d’assurance et de soutien du revenu doivent être revus pour inciter des bonnes pratiques et des modèles de production agricole plus résilients.
Le Groupe livrait le 28 mai son rapport contenant 20 recommandations au gouvernement du Québec, « proposant une approche cohérente pour accélérer l’adaptation du Québec aux changements climatiques ». Le document plaide pour une action cohérente des différents acteurs et un rôle de leader du gouvernement dans ce qui est appelé un « vaste chantier collectif ».
Le document énumère également 90 moyens d’actions, dont la réduction immédiate des pertes d’espaces naturels et agricoles et la révision des programmes de la Financière agricole. Le rapport s’articule sur cinq axes stratégiques comprenant une gestion préventive des écosystèmes, une meilleure adaptabilité des infrastructures et des activités économiques et le soutien à des mesures d’adaptation de l’ensemble des acteurs.
Le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs avait demandé en septembre 2023 au directeur général d’Ouranos et au président du Comité consultatif sur les changements climatiques de constituer une équipe pluridisciplinaire d’experts québécois en adaptation, le GEA.
Les travaux du groupe réalisés à l’hiver et au printemps 2024 avaient comme objectif d’identifier les pistes d’action les plus prometteuses en matière d’adaptation aux changements climatiques et contribuer à la prise de décision et l’élaboration de politiques publiques fondées sur des connaissances scientifiques à court et moyen terme.