Je ne pense pas que beaucoup de gens l’avaient venu venir celle-là. Depuis des semaines, à l’unisson, analystes, sondages et projections pointaient dans une direction : plus de soya, moins de maïs d’ensemencés aux États-Unis ce printemps.
Mais non, le résultat du sondage réalisé par le USDA et présenté ce jeudi 29 mars prend à nouveau de court cette flopée d’analyses et d’anticipations : pour 2018, il se sèmera moins de maïs ET moins de soya aux États-Unis. En chiffres :
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Plus de maïs québécois d’exporté cette année?
On m’a demandé si j’anticipais une hausse plus importante du prix du maïs au Québec cette année, étant donné que la demande à l’exportation était plus forte que la normale cette année. C’est une excellente question, mais difficile à répondre.
- Maïs : 88,03 millions d’acres, les marchés anticipaient en moyenne une réduction de 90,17 à 89,35 millions d’acres.
- Soya : 88,90 millions d’acres, les marchés anticipaient en moyenne une hausse de 90,14 à 90,92 millions d’acres.
- Blé : 47,33 millions d’acres, les marchés anticipaient en moyenne une hausse de 46 à 46,5 millions d’acres.
Seule chose qui concorde avec ce qui était attendu, les superficies cultivées cette année en soya dépasseront celles en maïs pour la 1re fois depuis 1983.
Comment de tels résultats sont possibles? Après tout, on parle d’une réduction surprenante des superficies en maïs et en soya. Eh bien, il semble que les producteurs américains ont décidé de semer un peu plus de blé, plus de coton, et plus céréales, tout en « réduisant » aussi leurs superficies ensemencées. Comme quoi, à force de travailler année après année avec des prix dans le plancher, certains commenceraient à lâcher le morceau.
Dans la dernière édition du Bulletin des Agriculteurs de mars, un résumé de ma conférence présentée en janvier dernier au Salon de l’Agriculteur était publiée. Essentiellement, cette conférence indiquait les points suivants :
- Des stocks de grains américains et mondiaux à des sommets
- Possibilité de récoltes sud-américaines importantes
- À moins de problèmes météo du côté de l’Amérique du Sud puis des États-Unis, il apparaissait alors difficile d’envisager des prix intéressants pour les prochains mois.
Maintenant, comme c’est souvent le cas dans les marchés, les choses ont changé depuis, et pas nécessairement comme on aurait pu le croire. D’une part, l’Argentine a encaissé des conditions très sèches, assez pour faire fondre les récoltes initialement prévues à des sommets. D’autre part, personne n’avait envisagé ce que le USDA a présenté ce mercredi 29 mars avec des réductions des superficies en maïs et en soya.
À partir d’ici, qu’on se le dise, la « game » vient de changer. Si plus tôt cette année, on pouvait difficilement envisager des rebonds particulièrement intéressants des prix à défaut de problèmes météo importants au cours de 2018, disons que les marchés risquent à tout le moins d’être naturellement un peu plus nerveux ce printemps et cet été.
Nous avons des récoltes décevantes confirmées en Argentine, et maintenant, des superficies qui devraient être moins importantes en maïs et soya aux États-Unis ce printemps. Les stocks de grains qui avaient démarré dans l’abondance 2018 pourraient donc très bien finir l’année à des niveaux, disons, moins confortables. Et, comme toujours, les marchés n’attendront pas nécessairement d’être mis devant les faits avant de réagir, surtout avec la fermeté de la demande de grains que l’on sait. Parions que les marchés devraient se montrer beaucoup plus nerveux ce printemps, surtout si les conditions météo font des caprices…