Le bœuf québécois est-il un produit de niche?

La viande de boeuf est le produit des occasions spéciales

Publié: 26 novembre 2024

Le président des Producteurs de bovins du Québec, Sébastien Vachon, souhaite que le boeuf du Québec devienne un produit de niche.

Alors que le Québec ne peut pas concurrencer les grands pays producteurs de bœuf, le Québec doit se démarquer en produisant un produit de niche. Mais est-ce réaliste pour un produit qui a toujours été considéré comme un produit de commodité?

«Le Québec représente environ 4% de la production de bœufs au Canada», a dit le président des Producteurs de bovins du Québec, Sébastien Vachon, lors du Colloque de l’industrie bovine, le 19 novembre à Lévis. « Si on va sur les marchés mondiaux, on ne peut pas gagner. Par rapport aux autres pays, nous avons des normes très élevées. Concurrencer les autres sur le prix devient donc très difficile.»

Il ajoute que la particularité de la production provinciale devient une occasion de se démarquer et d’offrir aux consommateurs un produit de très grande qualité.

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«On doit sortir du marché de commodités pour offrir un produit de luxe, a-t-il ajouté. Pour atteindre ce but-là, on n’a pas besoin de réinventer la roue. Il faut aller chercher l’expertise là où elle se trouve et appliquer les recettes qui fonctionnent déjà.»

Commodité

En conférence, le stratège de marché Frédéric Hamel de R.J. O’Brien a toutefois rappelé que le bœuf est un produit de commodité pour le consommateur dont l’alimentation est le 3e poste de dépense. Il explique que pour le consommateur, l’achat de bœuf est une façon de se gâter.

À travers le monde, il se consomme de plus en plus de viande, mais la croissance est faible. Le bœuf est la 3e viande consommée, après la volaille et le porc. La consommation de viande n’augmente que de 1% par année, contre 1,4% pour la volaille. La consommation de bœuf par habitant diminue chaque année. Plus le PIB est élevé, plus les consommateurs consomment de la viande.

Le stratège de marché Frédéric Hamel de R.J. O'Brien
Selon le stratège de marché Frédéric Hamel de R.J. O’Brien, l’industrie du boeuf vit encore aujourd’hui les conséquences de la sécheresse historique survenue en 2012 aux États-Unis, photo: Marie-Josée Parent

Cheptel fragile

Les États-Unis est le plus grand producteur mondial de bœuf avec 20%, mais sa production vit les contrecoups d’une importante sécheresse d’il y a 12 ans. En 2012, les États-Unis ont connu la plus grande sécheresse depuis les années 1930. Cela a conduit à une diminution importante du cheptel.

« On n’a jamais été capable de remonter le cheptel depuis ce moment-là », explique Frédéric Hamel. De telle sorte que les États-Unis comptent aujourd’hui le cheptel le plus bas depuis les années 1950.

Il s’en est suivi une augmentation importante des prix des bouvillons. Les fermes bovines, tout comme les fermes laitières, ont diminué leur cheptel aux États-Unis,

« Quand on a moins de femelles, on hypothèque l’avenir », explique Frédéric Hamel.

De surcroit, le cheptel américain devient donc de plus en plus fragile. L’avènement de la grippe aviaire chez les bovins laitiers américains en 2024 est un exemple marquant.

Frédéric Hamel a ajouté que l’industrie bovine américaine est en période de restructuration en lien avec sa décroissance.

Habitudes des consommateurs

Selon un sondage international, dans leurs achats d’aliments, les consommateurs recherchent d’abord le goût (85%), puis, le prix (76%), l’impact sur la santé (62%) et la disponibilité des aliments (57%). Les considérations environnementales n’influencent que 31% des achats. Cet aspect est d’ailleurs en décroissance. Plus de 50% des consommateurs préfèrent acheter des produits locaux et connaître l’origine des produits.

L’élection de Donald Trump cet automne a le potentiel d’influencer les habitudes de consommation des Américains en raison de la révision à venir du guide alimentaire.

En 2024, les consommateurs américains veulent majoritairement (71%) mettre des protéines dans leur panier d’épicerie, mais ils se préoccupent aussi des gras saturés, ce qui se fait au détriment du bœuf.

Alors que la consommation de viande de bœuf aux États-Unis a freiné sa chute de consommation par habitant, elle ne cesse de décroître au Canada. Il y a même une légère augmentation chez nos voisins du sud de la frontière.

Selon Frédéric Hamel, l’industrie du bœuf n’a pas à craindre du végétarisme puisque le nombre des adeptes de ces régimes est faible et stable : 1 à 2 % de végétaliens contre 2 à 3% de végétaliens.

Au Québec

Avec des salaires qui n’ont pas beaucoup monté, le pourcentage de viande dans le panier d’épicerie diminue. La raison, c’est l’augmentation de son coût. Pour contrer cela, le choix des pièces de viandes diminue. Le prix du bœuf haché a peu augmenté en comparaison à certaines autres pièces qui ont connu d’importantes hausses.

Selon Frédéric Hamel, il reste de belles années à venir pour l’industrie bovine, en raison principalement de la rareté du cheptel américain. Toutefois, la demande à venir est difficile à anticiper.

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À PROPOS DE L'AUTEUR

Marie-Josée Parent

Marie-Josée Parent

Agronome et journaliste

Marie-Josée Parent couvre les productions laitière, bovine, avicole et porcine au Bulletin des agriculteurs.