Dans le bureau de la Ferme Taillon et Fils, à Saint-Prime au Lac-Saint-Jean, se trouve une énorme pile de carnets.
« Depuis 1991, nous notons toutes nos interventions aux champs dans des calepins de 50 pages. Certains ont subi de grosses averses, d’autres ont été ramassés dans le tas de fumier, raconte le producteur Christian Taillon. On se disait qu’un jour, il y aurait bien un outil informatique pour les remplacer. »
L’outil tant souhaité est arrivé à temps pour la saison 2013. Producteur de lait et de céréales biologiques, Christian Taillon et son employé Olivier Milot ont sauté à pieds joints dans l’aventure d’AgPad, un carnet de champ électronique que développent deux jeunes agriculteurs de la région. Du véritable cloud farming, tout à fait accessible et adaptable aux besoins des petites et des grandes fermes.
Derrière AgPad, il y a Nicolas Lavoie, 35 ans, diplômé universitaire en science et en gestion de projet, consultant en géomatique et actionnaire de la Ferme Lavoie (75 vaches en lactation) près de Chicoutimi. Son partenaire, Guillaume Dallaire, 37 ans, diplômé en génie informatique, consultant en informatique et actionnaire de la Ferme Tournevent, spécialisée en grandes cultures biologiques à Hébertville.
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Gérer l’information
Peu importe la taille de la ferme, il y a toujours énormément d’information à gérer, explique Nicolas Lavoie. « On observe beaucoup de choses au champ, on prend des photos, on a des fichiers Excel, des fichiers de comptabilité, des cartes de champ. Ça demande beaucoup de temps à analyser et ce n’est pas tout le monde à la ferme qui a les compétences pour gérer cette complexité d’information. »
Comment rendre cette masse d’information plus facile à compiler et à utiliser? Nicolas Lavoie et Guillaume Dallaire croient être sur une bonne piste. Depuis deux ans, ils planchent sur AgPad, une interface web qui s’utilise à peu près comme Facebook : on configure son profil à l’ordinateur, on le consulte et y ajoute des données également à partir d’un téléphone intelligent et on décide avec qui le partager (famille, employés et conseillers). À ce jour, AgPad est gratuit.
La configuration se fait en moins d’une heure. Il faut d’abord importer nos contours de champs après les avoir téléchargés du serveur de la Financière agricole du Québec, puis indiquer quelle culture est implantée dans chacun des champs pour l’année en cours et quelles opérations (semis, fertilisation, pulvérisation, etc.) sont à réaliser. Certains paramètres existent par défaut, comme le taux de semis et la variété de semence, mais tout peut être ajusté en fonction des besoins du producteur.
AgPad s’utilise sur les appareils Android (avec ou sans connexion internet au champ) et BlackBerry ou iPhone (connexion internet obligatoire pour l’utiliser).
Tout noter
L’infonuagique agricole facilite aussi le travail des conseillers. Martine Bergeron, agronome au Club-conseil Pro-Vert, suit une dizaine de producteurs qui mettent AgPad à l’essai. « Si je vais au champ et que j’observe une baisse de rendement, je peux consulter l’historique du champ, sans la présence du producteur, dit-elle. Avec toute l’information à portée de la main, je peux affiner mon diagnostic. »
AgPad est un outil fonctionnel, mais encore en développement. Pour cette année et l’an prochain, l’abonnement demeure gratuit. Par la suite, l’utilisation annuelle pourrait coûter quelques centaines de dollars.
« Tout le monde est invité à se joindre à l’aventure, lance Guillaume Dallaire. Chaque utilisateur devient un collaborateur qui nous apporte ses suggestions. Le développement se fait de façon dynamique et l’outil deviendra de plus en plus facile à utiliser. »
Lisez l’article au complet dans Le Bulletin des agriculteurs de novembre 2013 et découvrez les « boîtes noires » et autres dispositifs pour les équipements agricoles que les fondateurs d’AgPad mettent au point pour automatiser la collecte de données.