Montpellier (France), 10 mars 2005 – Environ 7000 viticulteurs originaires du Languedoc-Roussillon ont manifesté leur colère face à la crise du secteur, à Montpellier, provoquant des échauffourées avec les forces de l’ordre.
La manifestation, lancée par les syndicats de vignerons de l’Aude, des Pyrénées-Orientales, de l’Hérault et du Gard, a défilé en procession derrière un cercueil, avant de dégénérer aux abords de la préfecture de région, où une délégation était reçue.
Les CRS ont tiré des grenades lacrymogènes alors que la foule tentait de forcer deux cordons de sécurité en jetant des pétards agricoles et des bouteilles. Des poubelles en feu et des billes en acier ont été lancées contre les forces de l’ordre qui ont chargé.
Une trentaine de casseurs qui avaient rejoint la fin du cortège ont aussi lancé des projectiles sur les forces de l’ordre.
Neuf personnes ont été interpellées, huit casseurs et un viticulteur qui a ensuite été relâché, selon la préfecture. Il sera convoqué ultérieurement par la justice.
Quatre policiers ont été légèrement blessés, selon la même source.
Trois compagnies de CRS et trois escadrons de gendarmerie, soit 600 hommes, avaient été mobilisés, malgré l’appel au calme lancé par les syndicats qui avaient désapprouvé des actions coup de poing menées la veille chez des négociants.
« C’est de la provocation. Nous sommes complètement étranglés et voilà la seule réponse », a lancé un viticulteur de 34 ans, tandis que d’autres promettaient des « actions plus musclées ».
Entre 6000 et 8000 vignerons, selon les estimations de la police et des organisateurs, s’étaient rassemblés en début d’après-midi pour dénoncer « l’insuffisance » du plan annoncé par le ministre de l’Agriculture, qui prévoit 70 millions d’euros pour 2005 dont 20 millions d’aides directes de l’Etat.
En fin de soirée, une trentaine de viticulteurs cagoulés ont saccagé le péage de Bessans, sur l’autoroute A9 entre Béziers et Sète, où 600 viticulteurs s’étaient rendus après la manifestation de Montpellier.
« Cette situation est révoltante. Les viticulteurs de la région ont beaucoup arraché de vignes, se sont endettés lourdement. Et ils n’ont obtenu aucun résultat », a lancé à Montpellier Philippe Vergnes, président du syndicat des vignerons de l’Aude et coordinateur régional de ce rassemblement, fustigeant la grande distribution, accusée de faire baisser le prix du vin.
Les viticulteurs réclament un « soutien conjoncturel », l’exonération des charges, ainsi que des prêts à taux zéro, notamment pour les jeunes. « Sans le salaire de ma femme, je n’y arrive plus. La dette mange près du tiers de mon revenu. L’Etat fait de la politique anti-vin et nous donne juste de quoi emprunter pour payer nos emprunts », a confié Michel Simar, 40 ans, représentant des jeunes vignerons de l’Hérault, lui-même propriétaire d’une douzaine d’hectares à Baillargues.
Exigeant une gestion autonome des bassins de production, les viticulteurs dénoncent la « concurrence déloyale » de l’Italie et de l’Espagne qui utilisent selon eux des pesticides interdits en France.
Ils se déclarent aussi victimes de la surproduction des AOC du bordelais. Et soulignent les efforts du vignoble languedocien, le plus grand du monde avec 280 000 hectares, qui a « sacrifié » 20 000 hectares en dix ans.
« Nous avons été les bons élèves et nous ne voulons pas payer pour les mauvais », affirme Jean Huillet, président de la Confédération des vins de Pays et représentais héraultais. « S’il y a des dérives après cette manifestation, la responsabilité en incombera au gouvernement », a-t-il averti.
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Source : AFP