Un accord commercial en vue avec l’Union européenne

Publié: 6 janvier 2011

« Je pense qu’il est tout à fait possible qu’on réussisse à avoir une très bonne  entente avec l’Union européenne sans qu’il soit nécessaire de remettre en  question la gestion de l’offre. » – Gilles Gauthier, négociateur en chef canadien pour les dossiers commerciaux agricoles ?
Publié dans Le Bulletin des agriculteurs de janvier 2011

par Lionel Levac

Gilles Gauthier dirige l’équipe canadienne de négociation des dossiers commerciaux agricoles. Bien sûr, il est au fait des moindres développements entourant les  négociations du cycle de Doha, à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Pour l’instant, constate Gilles Gauthier, « c’est l’impasse, mais on ne sait jamais, un déblocage pourrait survenir rapidement et une entente intervenir. » Mais en attendant que les choses bougent à l’OMC, c’est avec l’Union européenne que l’équipe canadienne négocie. « L’ouverture politique est bonne des deux côtés si bien qu’il est pensable qu’un accord intervienne au cours de l’année 2011. »

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Gilles Gauthier a très ouvertement parlé de cette négociation Canada-Europe à l’occasion du dernier Rendezvous porcin de l’Aqinac, laissant miroiter la possibilité de résultats fort intéressants, tout particulièrement pour les producteurs de porc.

« L’Union européenne, c’est 27 pays et 500 millions de consommateurs. En fait, c’est le marché d’importation le plus important au monde. Pour l’instant, l’importation des  produits du porc est inférieure à 200 millions de dollars. Et le Chili, un petit pays producteur, détient à lui seul 30 % du volume d’importation. C’est 50 fois plus que le Canada qui est un bien plus important producteur de porc. Si nous réussissons à avoir une entente privilégiée avec l’Union européenne, nous pourrions multiplier nos exportations vers cette région. Les pourparlers sont complexes, mais nous progressons. Nous discutons de contingents tarifaires et d’accès aux marchés sous différents aspects. Les Européens sont les champions dans le dessin de toutes sortes de normes, standards, barrières, exigences de production, conditions vétérinaires et certifications  des usines. Le Canada a actuellement un tout petit quota de livraison de porc en Europe. Seulement 4000 tonnes et, pour chacune d’elle, il faut payer des droits de douane allant de 230 à 400 euros (0,35 à 0,60 $ le kilo). Et si nous allons au-delà de notre quota, nous payons jusqu’à 1000 euros la tonne (1500 $). Nous négocions donc des  réductions importantes des barrières tarifaires dans ce marché immense où la demande annuelle pour le porc est de 20 millions de tonnes. Si nous obtenions ne serait-ce  qu’un pourcentage d’accès cela voudrait dire 200 000 tonnes. De plus, nous estimons que les prix offerts en Europe vont demeurer assez élevés en raison des pressions  intérieures exercées par les producteurs domestiques, qui vont continuer de dominer sur ce marché. »

Mais les Européens vont très certainement exiger des concessions canadiennes en contrepartie ?

Bien sûr, admet Gilles Gauthier. « Mais, comme il s’agit entre le Canada et l’Union européenne d’une négociation commerciale globale, les concessions ou les ouvertures canadiennes ne se feront pas nécessairement dans le domaine agricole. Les 27 pays membres de l’Union n’ont pas tous les mêmes intérêts et priorités. Nous essayons que tous les partenaires, nous y compris, y trouvent leur compte. Dès le départ, nous avons dit à nos collègues européens qu’un meilleur accès pour nos produits agricoles faisait partie de nos priorités, tout particulièrement pour le porc, le boeuf et les grains. Tout comme nous avons réussi, il y a plusieurs années, à conclure une entente avec notre grand partenaire, les États-Unis, sans remettre en question la gestion de l’offre, je pense qu’il est tout à fait possible qu’on réussisse à avoir une très bonne entente avec l’Union européenne, sans qu’il soit nécessaire de remettre en question la gestion de l’offre. »

Gilles Gauthier tient toutefois des propos un peu différents en ce qui concerne les pourparlers à l’OMC. Bien sûr, pour l’instant rien ne bouge vraiment.

« Le contexte de négociations du cycle de Doha a considérablement changé. Les pays émergents, qu’un accord devrait aider à intégrer dans le commerce mondial, ont connu  une forte évolution de leurs activités économiques depuis dix ans. La Chine, le Brésil, l’Inde et l’Indonésie sont maintenant des joueurs importants sur la scène  mondiale et ils veulent protéger leur économie interne et donc ne pas trop faciliter l’accès à leur marché. Pour l’instant, c’est l’impasse, mais si des signaux de déblocage arrivent, une entente pourrait intervenir au cours de la prochaine année. Si c’est le cas, les textes de 2008 seront la base de l’accord. »

Et rappelons-nous que les textes de 2008 à l’OMC sabraient littéralement les protections entourant la gestion de l’offre.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Luc Gagnon

Luc Gagnon