Ils ont adopté l’herbe soudan

Deux producteurs de Matane nous livrent leur témoignage sur l’herbe soudan en plante abri

Publié: 27 novembre 2018

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Au début septembre dernier, Dany Bélanger et Gilbert Beaulieu de la Ferme Filiber (1976) à Matane posent dans cette prairie semée en juillet avec de l’herbe soudan en plante abri.

Dany Bélanger et Gilbert Beaulieu de la ferme Filiber (1976) utilisent l’herbe soudan depuis cinq ans. Daniel Reichenbach de la ferme Danclau en est à sa deuxième année. Ces producteurs de la région de Matane nous livrent leurs impressions.

Après la saison de sécheresse de 2017, pour remonter leur réserve de fourrages, Dany Bélanger et Gilbert Beaulieu ont pris une décision drastique : ils ont semé 250 acres (101 ha) d’herbe soudan. La ferme Filiber (1976) de Matane a 130 vaches en lactation pour un quota de 190 kilogrammes. Grâce à l’herbe soudan, ils ont réussi à ne pas manquer de fourrage l’été dernier, même s’ils n’ont pas de réserve pour le printemps prochain, ce qui les satisfait étant donné l’expansion récente du troupeau.

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L’herbe soudan est une culture peu connue au Québec. Mais elle est maintenant bien maîtrisée par Dany et Gilbert. « On sait que ça marche, dit Dany. C’est une plante qui donne un rendement incroyable. » À titre d’exemple, dans un champ de 50 acres (20 ha), ils ont sorti 24 boîtes d’ensilage de 20 pieds longs (6 m).

« C’est une plante très sucrée dont la fermentation est excellente, ajoute Dany. On ne peut pas demander mieux. C’est aussi une plante appétante. Les vaches adorent ça! »

Culture

« On sème l’herbe soudan au plus tard durant la première semaine de juillet, explique Dany. Le signal pour nous, c’est quand les pommiers sont en fleurs autour du 24 juin. Avant, on ne peut pas semer parce que l’herbe soudan est une plante sensible au froid. »

Les prairies de la Ferme Filiber (1976) sont renouvelées aux quatre ans. L’herbe soudan sert de plante abri pour un mélange contenant du dactyle, de la luzerne et deux sortes de trèfles (trèfle blanc géant et un peu de trèfle rouge). « La quatrième année, on implante du seigle d’automne, dit Dany. Si la première coupe n’est pas bonne, on brûle au glyphosate et on fait un semi direct avec un engrais vert. Puis, un semis de seigle à l’automne. » Le seigle d’automne, ils le récoltent en céréales parce qu’ils ont trop besoin de paille.

Dany et Gilbert n’ont donc pas manqué de fourrages, mais ils estiment avoir besoin de regarnir leur réserve éprouvée par deux années de sècheresse. « Mais sans herbe soudan, nous aurions deux silos de 20 par 80 en moins », estime Dany. La ferme a quatre silos de 20 par 80 et deux autres de 25 par 90, soit l’équivalent de huit silos de 20 par 80.

« On a trouvé la bonne recette, dit Dany. Les vaches aiment ça. Les analyses sont bonnes. Ça donne du lait. Au début, l’herbe soudan s’établit lentement, ce qui permet à la graine fourragère de bien s’établir. Après, l’herbe soudan pousse, c’est incroyable. Parfois, six pouces en une journée. Puis, la plante atteint six pieds de haut. » En raison de la température régionale, la Ferme Filiber (1976) ne peut faire qu’une coupe d’herbe soudan durant l’année.

À la Ferme Filiber (1976), cette prairie photographiée en 2018 a été semée en 2017 avec de l’herbe soudan en plante abri. photo: Guy Forand

Meilleure deuxième année

À la ferme Danclau de Saint-Ulric, Daniel Reichenbach a eu un résultat décevant avec l’herbe soudan en 2017. C’était un premier essai. « Je n’y croyais pas trop au début », dit-il. Il a malgré tout choisi de réessayer en 2018. La Ferme Danclau est une entreprise bovine de 300 vaches avec 1000 bouvillons d’engraissement.

Daniel Reichenbach a tellement bien réussi en 2018 qu’il a décidé d’en semer beaucoup plus l’année prochaine. « Ça a été mon meilleur rendement, toutes coupes confondues, dit-il. L’ensilage de maïs n’a pas donné autant. »

Le mélange fourrager utilisé à la ferme est de la luzerne, de la fétuque et du dactyle. « En général, la luzerne survit bien à l’hiver », dit-il.

Les rotations des prairies sont aux quatre ans, soit une année d’implantation, plus trois autres années. « On veut avoir du rendement dès la première année, dit-il. Habituellement, on sème un mélange avoine-pois, mais ça fait deux ans que ça ne donne pas beaucoup. »

Daniel Reichenbach est tellement satisfait de sa récolte 2018 qu’il se demande même s’il ne pourrait pas remplacer sa récolte de maïs ensilage par un semi pur d’herbe soudan avec une dose plus forte et sans graine fourragère. On verra l’été prochain…

Pour son année d’implantation, Daniel Reichenbach de la ferme Danclau, de Saint-Ulric, près de Matane, a utilisé deux stratégies différentes de compagnonnage, herbe soudan à gauche et le mélange avoine-pois récolté en vert à droite. Photo prise le 7 août 2018. photo: Guy Forand

 

À PROPOS DE L'AUTEUR

Marie-Josée Parent

Marie-Josée Parent

Agronome et journaliste

Marie-Josée Parent couvre les productions laitière, bovine, avicole et porcine au Bulletin des agriculteurs.