Semis : anxiété printanière

Plus jeune, j’ai eu de la difficulté à contrôler mes ardeurs du printemps.

Publié: 29 avril 2025

30% de nos surfaces totales sont déjà semées et pleines de promesses grâce au blé d’hiver.

La préparation de nos équipements avance pendant qu’on peut officiellement confirmer un niveau de reprise parfaite pour notre blé d’hiver. Maintenant, on surveille la bonne fenêtre pour semer notre blé de printemps. En semis direct, j’aime bien observer l’effet vers de terre en surface. On voit de plus en plus les amoncellements des turricules grisonner.

Quand même spécial de constater que ce sont les vers qui font le travail sans avoir besoin des « hp » moteur et les coûts qui s’y rattachent. Faut seulement se donner du temps en fonction de notre réalité. Réalité terrain qui peut être très différente même 30 km plus loin.

J’ajouterais que parfois la différence est visible dans le même rang dépendamment du type de sol, de la méthode de culture, de l’historique du champ etc. Je dirais même qu’on a un nouveau point de repère si on porte attention au stade de croissance des céréales d’hiver.

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Pour une même fenêtre des dates de semis, les stades de développement printanier sont plus avancés aux endroits où la neige est disparue beaucoup plus vite que chez nous. Donc si le stade de développement des plantes est décalé en rapport avec la disparition de la neige, on peut aisément faire la comparaison par rapport à l’évolution du ressuyage du sol et de la période parfaite de la fenêtre des semis.

Raison de plus pour ne pas trop stresser quand on observe des équipements dans le champ, qu’on consulte les médias sociaux ou qu’on voit des équipements en opération qui soulève la poussière. Ça dépend de plusieurs facteurs et tant mieux si ça fonctionne. Je considère aussi qu’on se fait tellement dire que c’est important de semer tôt qu’on a automatiquement le sentiment de passer à côté de quelque chose si on ne sort pas dans le champ en même temps que tout le monde.

Chacun de nous a sa propre façon d’évaluer ses conditions de champs, mais dès qu’il y en a un qui sort pour supposément tester son semoir, on a une certaine tendance à sortir et à oublier nos résolutions de sagesse. Et plus on travaille avec des techniques ou des cultures en dehors des standards, l’importance de garder le focus de notre côté de la clôture est de plus en plus crucial.

Plus jeune, j’ai eu de la difficulté à contrôler mes ardeurs du printemps. Et un jour, on a réalisé que semer trop tôt peut nous causer des pertes financières plus grandes que semer trop tard! Très rare qu’on entend ça! Pourtant oui. 1500 kg/ ha validé par le capteur de rendement pour un semis exécuté 36 heures trop tôt. Ça reste tout de même une décision à prendre quand on a l’impression qu’il y a que nous qui sommes arrêtés.

Et pourtant, si c’est ce que les conditions du champ nous offrent, on doit respecter ça. À la limite, si c’est un problème de drainage ou de nivellement, on corrigera la situation plus tard pour espérer réussir plus tôt la prochaine fois. Si on revient à notre décision. Si semer 36 heures trop tôt me coûte 1500 kg de rendement et qu’en moyenne on couvre 30 ha par jour. Ça commence à faire un montant appréciable qui paye amplement les « Valium » pour arriver à se calmer un peu le pompon.

Certains vont prétendre que c’est à cause du semis direct, des couverts végétaux, vivants, pas vivants, etc. Non, c’est le rapport à notre propre décision de ne pas avoir respecter les réelles conditions de notre champ. Point final. On a déjà connu ça chez nous, voir du maïs qui sort de terre trois semaines plus tard en essayant de traverser une croûte le limon en surface.

Devoir sortir un semoir pour casser cette fameuse croûte. Plus tard en saison, on commence à voir le champ commencer à valonner. Et plus la semence « traîne » dans le sol avant d’avoir une bonne croissance, plus il y a de chance que les insectes causent des dommages. Et voilà que bizarrement ces insectes ont de moins en moins d’impact chez nous depuis qu’on se concentre à semer dans les meilleures conditions possibles. On a même pu arrêter l’utilisation des insecticides sur nos semences depuis 2012 et ça fonctionne très bien.

Adapter nos interventions en fonction de notre propre système et non en fonction d’un autre. Semis direct, retour sur des couverts végétaux vivants, ou de forte quantité de résidus, ça demande une façon différente d’intervenir.  Donc l’idée du record pour la date de semis, du record de la sortie des croix ne donne pas grand avantage si on se retrouve avec des problèmes de resemis ou des champs dans lesquels il manque 15-25% de population. Présentement, je fouille avec ma pelle, question de voir ce qui se passe en dessous. La météo est généralement changeante….

Mais les prévisions actuelles nous proposent un début de mai arrosé. Notre côté cartésien nous laisse monter une certaine anxiété de retard possible de la saison. On met nos émotions de côté, laissons faire la fameuse date. Il n’y a pas de date magique, il n’y a qu’une période propice aux semis qu’il faut capter. On reste positif.

On a tout de même déjà 30% de nos surfaces totales de semées grâce à notre blé d’hiver semé en septembre 2024. Nos couverts végétaux reprennent vie et pompent l’eau. 

Tout ça en attendant la fenêtre de semis. Et au fond je me dis que depuis 42 ans on a toujours réussi à semer donc il n’y a aucune raison de ne pas réussir notre 43e saison qui s’annonce exceptionnelle.

L’expérience, ça sert à qqchose! Profession agriculteur.

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À PROPOS DE L'AUTEUR

Paul Caplette

Paul Caplette

Agriculteur et collaborateur

Paul Caplette est passionné d’agriculture. Sur la ferme qu’il gère avec son frère en Montérégie-Est, il se plaît à se mettre au défi et à expérimenter de nouvelles techniques. C’est avec enthousiasme qu’il partage ses résultats sur son blogue Profession agriculteur.