Tolérance 0 pour les insectes

Une année charnière en plus où mettre des insecticides sur les semences exigent des prescriptions

Publié: 10 juin 2025

Tolérance 0 pour les insectes

Un printemps difficile. Du temps pluvieux à répétition Des sols froids sous des couverts imposants allant de 5 à 8 tm de matière sèche à l’hectare. La saison qui avance nous donne une pression supplémentaire de réussir à faire nos semis dans des dates potables. Le cocktail parfait pour se retrouver avec des présences plus grandes d’insectes ravageurs pour nos semences misent en terre.

Une année charnière en plus où mettre des insecticides sur les semences exigent des prescriptions afin de valider le réel danger d’infestation. Donc une année d’initiation qui peut en refroidir plusieurs. Chez nous, on a fait graduellement la transition depuis 2012. Ça s’est tellement bien passé, qu’aujourd’hui on n’applique plus d’insecticides sur les semences.

Dépendamment des conditions ou des types de sols, c’est vrai que les insecticides peuvent devenir nécessaires. Par contre, l’idée d’en appliquer partout au cas où : j’aime moins ça! Surtout que pour les faibles quantités appliquées sur la semence c’est le genre de produit qui se retrouve en plus grande quantité dans les cours d’eau que la majorité de tous les autres pesticides qu’on utilise.

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Dans certaines périodes intenses, comme celle-ci, on a l’impression qu’il y a plus de tâches que de ressources humaines. Tout devient une gestion des priorités.

Aujourd’hui, en 2025, il y a moyen de mieux gérer nos interventions et ainsi éviter le plus possible d’envoyer des résidus de produit dans des endroits non désirés. Je me dis toujours. Trouvons une façon de les rendre moins solubles ou on s’organise pour traiter par zone plus problématique. L’agriculture de précision pourrait faciliter les applications par prescription et par zone jugée sensible.

Donc cette année, on observe une plus grande perte due aux différents insectes qui peuvent attaquer nos semis. En général, ça devrait tourner autour de 5% de perte. Perte qui à première vue peut paraître inacceptable, alors qu’on accepte d’acheter des sacs de semences qui nous garantissent un minimum de 90% de germination.

Vrai qu’en général nos pourcentages de réussites sont meilleurs que 90%. Mais si ça germe à 91%, on accepte une perte possible de 9% sans s’en plaindre ni grimper dans les rideaux. Donc nos statistiques moyennes de pertes dues aux insectes sont très minimes sur la moyenne des années.

Cette année, on a observé un problème particulier qu’on n’avait jamais eu. Un champ où on a testé l’idée d’éviter la défoliation qu’on fait normalement 10 à 15 jours avant le semis pour remplacer ça par du travail mécanique à la déchaumeuse. Déchaumeuse qu’on utilise normalement à environ 5 cm. Seulement pour scarifier le sol et brasser le trèfle afin de favoriser le sol à se réchauffer.

Mais pour réellement détruire du trèfle vivant et imposant, on devait travailler plus creux. Le sol était bien portant pour un pulvérisateur, mais pas assez sec pour se permettre un travail à 7-10 cm afin de couper au maximum les racines du trèfle. Donc on a dû attendre avant de passer la déchaumeuse. Une fois qu’on a réussi, il aurait fallu attendre au minimum 7-10 avant de semer dans ce genre de couvert plein de nouvelles racines fraîches et bourrées d’azote organique.

Euh! La météo ne nous donnait pas cette fenêtre donc on a décidé de semer afin que les dates de semis se ressemblent pour avoir un essai qui peut nous offrir des résultats comparables avec le moins de variables possible.

Quelques jours plus tard, on constate un problème de mouche du semis seulement dans la zone contrôlée avec la déchaumeuse. Ça coupe au couteau : 82000 plt par ha dans la zone défoliée, 14000 plants par hectare dans la zone déchaumeuse. On observe en plein milieu du champ déchaumé une bande de fleurs qu’on a tassé et la population était à 83 000 6 mètres de large et tout le champ de chaque côté revenait à 14000 plants par hectare.

On réalise donc l’importance de gérer tous les détails en amont pour arriver à des conclusions positives. J’aurais pu prétendre que de passer une déchaumeuse, ça ne fonctionne pas. Que des couverts végétaux, ça cause une foule de problèmes. Mais en fait, c’est le genre de couvert et la procédure appliquée qui n’était pas faite dans de bonnes règles agronomiques. Et ça, ça augmente le degré de risque.

Ceux qui sont moins familiers avec les réalités agricoles et qui passent leur temps à souhaiter qu’on arrête l’utilisation de certains produits devraient comprendre que les agriculteurs.trices mettent des efforts quotidiens afin de réduire au maximum en se disant : on est capable, mais on n’a pas le droit de se tromper! 

Au final, je me retrouve un dimanche à resemer un champ de maïs dans une saison ou les semis ne se terminent pas. Ça coûte au minimum un 325$/ha de dépenses additionnelles sans compter ta journée perdue. Faut payer pour apprendre! Et on n’abandonne pas l’idée de ne pas appliquer d’insecticides. On se dit qu’on peut encore être meilleur. Mais quand c’est une année difficile, on a l’impression de payer en double.

Dans de telle épisodes, les messages par courriel de Statistique Canada aux trois jours qui m’avise que n’ai pas encore complété mon formulaire de statistique sont loin dans mes urgences quotidiennes. Je réalise comment la fonction publique est malheureusement déconnectée de ce qu’on vit au quotidien. Je me dis : est-ce qu’ils peuvent arrêter de m’envoyer des courriels et des messages téléphoniques en me proposant de même les appeler le soir ou les week-end!

Hey, j’entre à la maison avec la lune et je repars le lendemain matin avant que le soleil se lève. Malheureusement, on n’est pas payé aux efforts. On est payé à la tonne sans égard pour le nombre d’heures qu’on y consacre.

Profession agriculteur

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À PROPOS DE L'AUTEUR

Paul Caplette

Paul Caplette

Agriculteur et collaborateur

Paul Caplette est passionné d’agriculture. Sur la ferme qu’il gère avec son frère en Montérégie-Est, il se plaît à se mettre au défi et à expérimenter de nouvelles techniques. C’est avec enthousiasme qu’il partage ses résultats sur son blogue Profession agriculteur.