Toujours nécessaires, les traitements de semences?

Publié: 30 décembre 2011

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Au Québec, on sème environ 400 000 ha de maïs, pratiquement tous avec un traitement de semence insecticide. Dans le soya, environ la moitié des 200 000 ha est ensemencée avec de la semence traitée.

« Est-ce qu’on a véritablement besoin de traitement de semence sur ces 500 000 ha? Les insectes ciblés par ces insecticides se retrouvent-ils dans tous ces champs? », a demandé la biologiste et entomologiste du CÉROM Geneviève Labrie, lors d’une journée Grandes cultures à Saint-Rémi en décembre dernier.

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Les traitements de semences sont l’un des suspects derrière le déclin des colonies d’abeilles dans l’hémisphère nord. Si les cas d’intoxications d’abeilles lors des semis sont bien documentés, l’impact sur ces pollinisateurs une fois que les semences ont germé demeure difficile à démontrer scientifiquement.

Que l’on se préoccupe ou pas sur le sort des abeilles, il y a lieu de revoir notre façon au Québec d’utiliser les traitements de semences de façon automatique et généralisée, affirme Genevière Labrie. « Le principe de base de la lutte intégrée, c’est d’utiliser une méthode de lutte quand un seuil de nuisibilité est atteint. »

Il s’avère qu’au Québec, la pression de plusieurs des insectes nuisibles pour lesquels les traitements de semences sont conçus est pratiquement nulle, notamment en début de saison.

Mouche des semis

Les femelles pondent tôt au printemps dans des conditions humides et en présence de résidus. Les larves se nourrissent des semences, ce qui provoque des problèmes de levée. Ce ravageur est si peu prévalent en grandes cultures au Québec et en Ontario qu’aucun seuil d’intervention n’a encore été fixé. Selon Geneviève Labrie, un seul cas de dommage dans le soya a été rapporté à la Financière agricole au cours des dernières années.

Altises dans le canola
La culture du canola est en forte croissance et l’usage de traitements de semence est généralisé. Des dommages importants provoqués par les altises ont été rapportés en Abitibi-Témiscamingue et au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ailleurs dans la province, les suivis du Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) indiquent que le seuil d’intervention n’est pas atteint.

Ver fil-de-fer
Les larves de ce ravageur attaquent la semence, le germe ou la jeune plantule de maïs. Le problème est plus fréquent sur les retours de prairies, ce qui pourrait justifier l’usage d’un traitement de semence. Les dépistages menés par le RAP n’ont permis de trouver qu’un seul champ au Québec où la population de ver fil-de-fer pouvait justifier un traitement de semence.

Chrysomèle des racines du maïs

L’utilisation de maïs Bt demeure le meilleur moyen de lutte contre la chrysomèle selon Geneviève Labrie. Si l’on utilise les traitements de semences pour lutter contre la chrysomèle, il faut quintupler la dose. La chrysomèle est présente surtout dans les champs en maïs en continu. Selon le RAP, dès qu’on a une rotation maïs-soya, les cas où la chrysomèle provoque des dommages dans le maïs sont rares.

Puceron du soya
Des traitements de semence protègent le soya contre le puceron, mais seulement dans les 45 à 60 premiers jours après les semis. Au Québec, la plupart du temps, les infestations de pucerons se produisent plus tard, en juillet et août.

Les traitements de semences insecticides sont des produits toxiques, rappelle Geneviève Labrie. Lorsque comparés à des insecticides traditionnels, une dose dix fois inférieure suffit à tuer une abeille.

En 2011, un groupe de travail a été formé au Québec, composé de scientifiques, de représentants des semenciers et fabricants de traitements de semence et autres membres de l’industrie, afin de réfléchir et de proposer des moyens d’action pour réduire l’impact des traitements de semence sur les abeilles. D’ici peu, un guide de bonnes pratiques devrait voir le jour, ainsi que des instructions pour adapter les semoirs.