L’Ordre des agronomes recommande la prudence face aux biosolides

Trois ordres professionnels émettent des recommandations à ce sujet

Publié: 8 décembre 2022

Fertilisation d'une prairie.

L’Ordre des agronomes du Québec (OAQ) lance un message conjoint face au débat lancé dernièrement sur l’utilisation en milieu agricole de boues usées municipales et industrielles venant des États-Unis. L’OAQ a émis un communiqué de presse avec l’Ordre des chimistes du Québec (OCQ) ainsi que l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec indiquant qu’ils « recommandent à la population et aux entreprises de s’abstenir d’utiliser des biosolides municipaux et industriels en provenance des États-Unis, notamment de l’État du Maine.» La même prudence serait de mise pour une utilisation plus large. « Il est également recommandé de ne pas utiliser de compost auquel de tels biosolides sont ajoutés ou tout autre produit dérivé. » 

L’inquiétude vient du fait que ces contaminants, dit éternels, sont très stables et ne se décomposent pas. Les per- et polyfluoroalkylées (PFAS) ont été détectés dans des boues usées au Maine et l’épandage de ces dernières a été interdit, mais un reportage à Radio-Canada a démontré qu’elles avaient été importées au Québec et épandues à titre de fertilisant. « Les PFAS et autres contaminants d’intérêts émergents sont très persistants dans l’environnement, bioaccumulables et leurs impacts dommageables sur la santé sont bien documentés.»

Martine Giguère, présidente de l’OAQ, indique que la même recommandation n’est pas faite pour les boues usées du Québec puisque les industries d’ici ne produisent pas ces contaminants. Ils peuvent toutefois se retrouver dans les boues usées puisqu’ils sont utilisés dans la fabrication de gore-tex, du téflon et des cosmétiques. Aucune donnée n’existe toutefois pour des biosolides provenant des autres provinces canadiennes.

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Les trois ordres professionnels rappellent « qu’il y a urgence de légiférer concernant les contaminants d’intérêts émergents, afin de mieux les répertorier et d’outiller les professionnels qui ont besoin d’un cadre clair pour baser leurs décisions tout en protégeant le public ». Ils demandent d’ailleurs aux gouvernements d’être impliqués dans la modernisation de la règlementation. Le gouvernement du Québec pourrait étudier comment réglementer l’utilisation des boues d’épuration, en plus d’interdire leur importation. Le fédéral pourrait se pencher également sur la question afin d’encadrer la pratique.

Mme Giguère souhaiterait que la composition des boues usées au Québec soit mieux analysée pour rendre la tâche plus facile aux agronomes. Elle ajoute qu’un cadre réglementaire existe déjà et que les matières fertilisantes jouissent de certaines balises quant aux molécules permises ou interdites.

Quant aux producteurs ayant déjà fait usage des ces biosolides, la présidente recommande tout d’abord de s’informer de leur provenance et d’inclure leur agronome dans le processus.

Il est également temps, selon les trois ordres, de mener une « réflexion collective sur la valorisation de nos matières résiduelles en tenant compte du risque associé pour la santé et l’environnement ».

À PROPOS DE L'AUTEUR

Céline Normandin

Céline Normandin

Journaliste

Céline Normandin est journaliste spécialisée en agriculture et économie. Elle collabore également au Bulletin des agriculteurs.