Le prix du blé à son plus haut en près d’un an

Le prix du blé à son plus haut en près d’un an

Dans le marché des grains, c’est le blé qui mène la charge présentement. C’est vrai à la bourse comme dans le marché au Québec.

Déjà à la fin décembre dernier, à la bourse de Chicago, on pouvait observer une rupture de la tendance de fond baissière en place depuis mars 2022.

Au Québec, son de cloche similaire avec la rupture de la tendance de fond baissière du prix également en décembre dernier. Ceci n’aura pas empêché un recul du prix moyen par la suite à un creux sous 260 $/tonne à la ferme (blé fourrager) en mars. Mais depuis, la reprise aura été ma foi assez vigoureuse, avec un retour autour de pas loin de 350 $/tonne à la ferme présentement. Quand même… pas si mal!

Alors, que se passe-t-il dans le monde du blé?

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Les cultures nous parlent, est-ce que vous les écoutez?

Pour chaque culture, il existe un moment où une simple marche dans la parcelle permet de détecter les anomalies susceptibles d’affecter le rendement et dont les symptômes peuvent s’estomper avant la récolte.

1 – Les stocks canadiens et américains restent bas

Je vous joins un graphique qui représente les niveaux des stocks canadiens et américains de blé, tous types confondus.

Dans l’ensemble, les stocks canadiens et américains étaient « un peu » plus confortables au 31 mars dernier que dans les deux dernières années. Par contre, on est encore très bas si on se projette sur les 10 et même 20 dernières années.

Ceci est encore plus vrai si on s’attarde ensuite aux stocks canadiens uniquement, alors que cette année représente les 4e plus faibles stocks de blé enregistrés en 20 ans…

Localement, il est plus difficile d’obtenir des statistiques précises pour se faire une tête. Néanmoins, on sait que les récoltes 2023 ont été loin d’être bonnes au Québec. Le rendement moyen a été de seulement 2,8 tonnes/ha contre un rendement exceptionnel de 3,92 tonnes/ha l’année précédente. Difficile de croire ensuite que la disponibilité et les stocks de blé québécois soient donc vraiment confortables cette année.

2 – Les stress météo de la saison 2024 embarquent

Russie – Comme 4e plus important producteur de blé dans le monde, et de loin le joueur dominant dans les exportations mondiales de blé (près de 25%), la Russie pèse beaucoup plus lourd de nos jours dans le marché du blé.

Or, le début de saison n’a pas été facile jusqu’à présent dans plusieurs régions de production de blé russe. Des conditions beaucoup trop sèches ont été observées dans certains secteurs, alors que dans d’autres c’est plutôt un gel de début de saison qui donne à croire que jusqu’à 500 000 ha devront être ressemés.

Résultat, différentes organisations commencent maintenant à revoir à la baisse la récolte de blé russe autour de 90 millions de tonnes alors qu’elle était initialement prévue à 93 millions de tonnes.

Europe – Du côté de l’Europe, c’est plutôt les conditions trop froides et humides qui posent problème. En France, 1er producteur de blé européen, la firme FranceAgriMer qui suit l’état des cultures estime présentement que 64% du blé tendre est dans un état de « bon à excellent ». Il s’agit d’un écart considérable par rapport au 94% enregistré à pareille date l’an dernier.

États-Unis – Jusqu’à présent, le début de saison n’a pas été parfait. Par contre, les ensemencements de blé de printemps progressent rapidement, et l’état des cultures de blé d’automne est à son meilleur pour la mi-mai en 3 ans.

Néanmoins, une certaine nervosité persiste dans les marchés en raison des conditions anormalement sèches observées dans une portion des Plaines américaines, là où la part du lion du blé d’hiver est produit aux États-Unis.

3 – Spéculateurs excessivement « vendu »

J’en ai déjà parlé à quelques reprises dans ce blogue, mais les spéculateurs ont été excessivement « vendeurs » dans les dernières semaines/mois à la bourse de Chicago. Autrement dit, à défaut d’éléments positifs, ils ont fortement misé sur une baisse supplémentaire des prix des grains.

Ce type de situation, lorsqu’il se produit, entraine une pression supplémentaire à la baisse dans un premier temps. Par contre, lorsqu’ils sont **très** vendus comme ce fût le cas dernièrement pour le blé à Chicago, les spéculateurs deviennent beaucoup plus sensibles au moindre imprévu qui pourrait faire bondir les prix à la hausse.

Or, c’est ce qu’il est en train de se produire dans le blé avec les faibles stocks canadiens et américains ainsi que les incertitudes météo de la saison 2024 qui prennent forme.

Maintenant, concrètement, que peut-on tirer comme conclusion de ces informations?

Comme j’en ai fait souvent mention lors de différentes conférences dans les derniers mois, j’estime que le marché du blé est en train de confirmer qu’il a atteint un creux définitif après deux ans de recul important.

Par contre, un creux définitif ne veut pas dire pour autant que nous sommes définitivement de retour à la hausse. Nous pouvons très bien tomber sur le neutre aussi. Il faut prendre garde également à la tendance saisonnière qui veut que d’ici le début juillet, le marché du blé a une forte propension à encaisser un revers avec le début des récoltes aux États-Unis, puis un peu plus tard au Québec.

Bref, je resterais donc encore très prudent pour le moment, considérant toujours que tout rallye des prix comme ce que nous venons de vivre dans le blé mérite d’être récompensé par des ventes.


L’État des cultures est de retour pour une 5e année au Québec.

L’objectif de cette initiative est de permettre de mieux suivre le développement et l’état des cultures de maïs, de soya et de blé dans l’ensemble des régions de production de grandes cultures au Québec.

Tout le monde peut participer, pour autant que vous puissiez bien suivre le développement des cultures sur votre ferme ou encore dans votre région.

Il s’agit d’un sondage à remplir dans l’application mobile de Grainwiz qui ne prend que 30-60 secondes si vous ne partager pas aussi des commentaires et des photos. Les résultats sont diffusés tous les vendredis matin.

Le fait de s’inscrire et de participer ne constitue pas non plus un engagement à répondre à chaque semaine. C’est selon vos disponibilités pendant la saison.

Bref, ça vous intéresse, pour en savoir plus et vous inscrire —> Oui ça m’intéresse!

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jean-Philippe Boucher

Jean-Philippe Boucher

Collaborateur

Jean-Philippe Boucher est agronome, M.B.A., consultant en commercialisation des grains et fondateur du site Internet Grainwiz. De plus, il rédige sa chronique mensuelle Marché des grains dans le magazine Le Bulletin des agriculteurs.