Après 15 mois de négociations, dont sept mois avec l’aide du conciliateur Raymond Bachand, les Éleveurs de porcs et les acheteurs de porcs sont parvenus à une entente. Il s’agit de la première convention de mise en marché négociée depuis 2009. C’est donc une page qui se tourne après les contraintes d’abattage liées à la COVID, les restrictions d’achats par la Chine, la pénurie de main-d’œuvre et l’inflation qui ont amené Olymel à faire d’importantes coupures dans ses achats de porcs dans les dernier mois.
La nouvelle convention prévoit une concession sur le prix de la part des Éleveurs de porcs puisque la formule de prix basée sur la valeur reconstituée (cut out) de la carcasse américaine est maintenant de 85% et grimpera jusqu’à 88% en avril 2025, comparativement de 90 à 100% dans la précédente convention collective.
Par ailleurs, les producteurs de porcs et les acheteurs ont convenu d’un partage des risques et des profits. La formule prévoit un prix de base bonifié par un complément de prix selon les profits du secteur Porcs frais Est générés par Olymel. Les autres acheteurs paieront un complément de prix égal à celui payé par Olymel. Ce nouveau point nécessitera de la transparence et entraînera une nouvelle façon de travailler entre les parties. C’est le point qui a prolongé les négociations.
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Dans la convention, Olymel a aussi accepté de continuer d’abattre jusqu’en janvier prochain 624 000 porcs des 1,1 million de porcs que l’entreprise a choisi de ne plus abattre. Olymel a accepté de ne plus abattre de porcs provenant de l’Ontario. L’entente offre un statut particulier aux porcs de niche, comme le porc biologique ou le porc Certified Humane, un secteur en croissance. L’entente doit maintenant être entérinée par la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec.
Concessions de tous
« La convention qu’on annonce aujourd’hui est définitivement à l’image d’un secteur en crise où tous doivent faire des concessions », a dit le président des Éleveurs de porcs, David Duval. Il ajoute que les 85% de la valeur reconstituée est un sacrifice important pour les producteurs de porcs qui consentent ainsi à une réduction de prix estimée 12,50$ par cochon ou 4,5%.
Il ajoute que le partage des profits « est une avancée incroyable dans la mise en marché des produits agricoles au Québec ». « C’est une première étape à une première version d’un partage des profits qui devra assurément être bonifié dans le temps », a-t-il dit. Cela implique une meilleure transparence et une meilleure coordination. « Il faut réapprendre à se faire confiance. C’est pour ça que ça a été beaucoup plus long la négociation », a dit David Duval.
La décision par Olymel de continuer d’abattre 624 000 des 1,1 million de porcs désassignés le 3 juin permettra aux Éleveurs de porcs de mettre en place les moyens pour réduire l’impact de cette décision, soit la vente des porcelets et le retrait volontaire et temporaire de la production. David Duval a mentionné que plusieurs producteurs se sont montrés intéressé et ont posé des questions sur le programme de retrait volontaire et temporaire de la production, mais qu’il est trop tôt pour dire combien y adhéreront. Le programme de retrait volontaire sera finalisé dans les prochaines semaines. La reprise en charge par Olymel des porcs jusqu’en janvier représente un coût d’environ 20$ par porc pour les Éleveurs.
S’adressant directement aux Éleveurs, David Duval a reconnu que la formule de prix est une perte comparativement à la précédente convention de mise en marché. Il a ajouté toutefois que le gouvernement du Québec sera présent via l’assurance stabilisation des revenus agricoles. « Vous avez devant vous une filière unie et c’est ensemble qu’on peut y arriver et je pense que je peux parler pour tout le monde ici en disant qu’on entre dans une nouvelle ère pour la filière porcine. On se voit réellement comme des partenaire et non comme des adversaires avec une vision commune, de la transparence et le même message », a-t-il dit. Pour les producteurs qui livrent à Valley-Jonction, David Duval explique que la convention prévoit un délai suffisant pour permettre une transition ordonnée vers un autre abattoir.
Rééquilibrer la filière
Dans son allocution, le président-directeur général d’Olymel, Yanick Gervais, a dit souhaiter que la nouvelle convention vienne rééquilibrer la filière québécoise du porc « dont tous les membres ont été frappés par les pires turbulences qu’a eu à subir cette industrie dans sa riche histoire ». Il affirme que la nouvelle convention permet de bâtir pour l’avenir.
Yanick Gervais a parlé aussi d’un principe novateur en expliquant le nouveau partage des risques et des bénéfices au niveau de la filière. « Ça devrait limiter les déséquilibres qui sont survenus dans le passé. Puis qui va éviter de faire porter un fardeau important sur les épaules de l’un ou l’autre des joueurs de la filière », a-t-il dit. Selon lui, la nouvelle entente permet d’améliorer la prévisibilité, mais une grande volatilité demeure. « Dans ce contexte, nous avons décidé d’établir un dialogue plus soutenu entre les producteurs et les acheteurs afin de partager les réalités des marchés et ainsi mieux planifier le futur de notre industrie et mieux réagir ensemble », a dit Yanick Gervais. Selon lui, l’entente permet de préserver la place des producteurs indépendants au sein de la filière porcine.
Pour Yanick Gervais, la nouvelle entente est un réalignement des opérations du secteur du porc frais qui permettra de soutenir les activités domestiques, de viande transformée et sur les marchés internationaux à forte marge, comme le Japon et la Corée. Il souhaite que la nouvelle convention permette à la filière de retrouver sa prospérité dont elle a fait preuve pendant des années. La directrice générale d’Aliments Asta, Stéphanie Poitras, a souligné l’importance du dialogue et de la collaboration.
Futur prometteur
Autant Yanick Gervais que David Duval ont mentionné que le futur est prometteur pour la production porcine. « Nous avons le meilleur porc au monde », a dit Yanick Gervais. Certains pays ont choisi de réduire leur production porcine. Alors que le prix du porc reste stable, celui du poulet et du bœuf ont connu d’importantes augmentations. Le prix du porc devrait cependant remonter dans les prochaines années avec une rareté à venir. Au Québec, Olymel ne prévoit pas d’autres diminutions de la production porcine. Le problème de main-d’œuvre est en train de se résorber avec l’arrivée prochaine de travailleurs étrangers. Le nombre d’environ 80 000 porcs abattus par semaine par Olymel à partir de janvier prochain devrait devenir la vitesse de croisière de l’entreprise.
Les Éleveurs de porcs organisent une rencontre web jeudi midi dans le but d’expliquer en détails la nouvelle convention à ses membres. Il faut s’inscrire en cliquant ce lien.
Résumé de la nouvelle convention
– Prix à 85% de la valeur reconstituée (cut out) de la carcasse américaine. Le pourcentage sera en augmentation jusqu’à 23 avril 2025 où il atteindra 88%.
– Partage des risques et des profits entre les producteurs de porcs et les acheteurs qui implique une plus grande communication entre les parties.
– Olymel continuera l’abattage de 624 000 porcs jusqu’au 14 janvier 2024 sur le total de 1,1 million de porcs qui seront désassignés au 3 juin prochain moyennant un rabais d’environ 20$ par porc pour les Éleveurs.
– Fin de l’entrée des porcs de l’Ontario au Québec.
– Mesure particulière pour les marchés de niche qui sont en croissance, comme le porc biologique et le porc Certified Humane.
– Une collaboration accrue entre les parties.