Porc : la balle est dans le camp du ministre

Publié: 25 avril 2023

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La Journée Groupe Évolu-Porc du 21 avril 2023 a rassemblé 170 personnes dont 100 producteurs.

Maintenant que les Éleveurs de porcs du Québec et les acheteurs ont convenu d’une nouvelle convention de mise en marché du porc, les producteurs de porcs attendent la réaction du ministre de l’Agriculture, André Lamontagne. Le Bulletin a profité de la Journée du Groupe Évolu-Porc le vendredi 21 avril 2023 à Sainte-Marie, en Beauce, pour demander l’avis de producteurs de porcs et d’intervenants sur la situation du porc au Québec, ainsi que sur la convention collective.

Certains producteurs savent déjà qu’ils continueront la production porcine, alors que d’autres se prévaudront du programme de retrait volontaire et temporaire dont les détails seront divulgués par les Éleveurs de porcs dans environ deux semaines. Mais surtout, il y a beaucoup de questionnements de la part des éleveurs et des intervenants.

« La convention nous fait mal », a dit Yvan Fréchette, premier vice-président des Éleveurs de porcs du Québec, lors d’une allocution. « On a dit au M. Lamontagne : “On a fait notre part. La balle est dans votre camp.” Le ministre Lamontagne s’est engagé à être à l’écoute. » En présence de Julien Santerre, président du comité finisseur des Éleveurs de porcs du Québec, en remplacement de David Duval qui avait un empêchement, Yvan Fréchette a expliqué les faits saillants de la nouvelle convention de mise en marché des porcs annoncée le mardi précédent. « C’est quoi la prochaine étape? C’est le programme de retrait qui sera annoncé d’ici deux semaines », dit-il. Ensuite, plusieurs groupes de travail se pencheront notamment sur l’arrimage du règlement avec la nouvelle convention de mise en marché. « Le gros défi, c’est qu’il faut l’appliquer », dit Julien Santerre. Le travail est donc important pour cette décroissance historique de la production porcine au Québec. 

Yvan Fréchette, 1er V-P Éleveurs de porcs du Québec, et Julien Santerre, président du comité finisseur des Éleveurs de porcs
Yvan Fréchette et Julien Santerre photo: Marie-Josée Parent

René Roy, producteur

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Rencontré à son arrivée à la journée, le président des Éleveurs de porcs de la Beauce, René Roy, s’est montré optimiste à propos de la continuité des activités d’abattage à Valley Jonction. Une semaine plus tôt, le 14 avril, Olymel annonçait la fermeture définitive de l’usine d’abattage de Valley Jonction. Le lundi 17, les Éleveurs de porcs de la Beauce lançaient un cri du cœur lors d’une conférence de presse. « Je suis plus enthousiaste qu’en début de semaine », a-t-il dit vendredi. À la suite de cette conférence de presse, des gens se sont montrés intéressés par le rachat de l’usine. L’autre élément qui donne espoir aux éleveurs de la région est l’ouverture exprimée par le président-directeur général d’Olymel lors de l’annonce de la convention de mise en marché, le mardi 18 avril. René Roy a cependant affirmé qu’il ne pouvait pas en dire davantage pour l’instant.

René Roy, président des Éleveurs de porcs de la Beauce
René Roy photo: Marie-Josée Parent

Denis Champagne, intervenant

L’agronome Denis Champagne, fondateur des Consultants Denis Champagne, déplore l’inaction du ministre de l’Agriculture maintenant que la convention de mise en marché est signée. « Ma plus grosse interrogation, c’est que ça fait trois ans que le ministre Lamontagne nous dit “arrangez-vous”, dit-il. Jeudi, il a passé cinq minutes à nous féliciter (dans son allocution lors du webinaire des Éleveurs de porcs du Québec du 20 avril). Donc, la première étape est faite. La balle est dans son camp. » Il aimerait que le ministre aide le secteur afin de leur donner une lueur positive pour l’avenir. « Il va sauver dans les cotisations de l’ASRA avec le million de porcs en moins, ajoute-t-il. Pourquoi il ne prend pas à sa charge la totalité du programme de retrait? La position du gouvernement, elle est quoi? On ne le sait pas. Je ne peux pas dire aux producteurs quoi faire parce que je ne sais pas tout. C’est urgent! » Il ajoute que plusieurs producteurs n’ont que la production porcine. S’ils cessent leur élevage, ils quittent l’agriculture.

De façon général, Denis Champagne ajoute que le ministre de l’Agriculture doit être en phase avec ses propos. Alors qu’il dit que la relève est importante, le programme de prime à l’établissement n’a pas changé depuis des années. Un autre exemple est le programme bien-être animal de 2018. Les jeunes établis depuis cinq ans n’y ont pas eu accès. Denis Champagne accompagne les producteurs de porcs depuis 46 ans.

Denis Champagne, agronome et fondateur des Consultants Denis Champagne
Denis Champagne photo: Marie-Josée Parent

Jean-François Grenier, producteur

Le producteur de porcs Jean-François Grenier de Saint-Léon-de-Standon déplore le manque d’informations. « Ça fait un an qu’on a commencé avec la baisse de 40$ par porc, dit-il. Je suis déçu. Je me serais attendu à plus que ça. » La conversion vers le bien-être animal de son élevage de type naisseur-finisseur est complétée. Alors, oui, il va continuer même s’il sait que les deux prochaines années seront difficiles pour le secteur. « Il n’y a personne qui a vécu une décroissance, dit-il. Même si la convention est signée, ça amène de l’incertitude. »

Jean-François Grenier, producteur de porcs naisseur-finisseur, Saint-Léon-de-Standon
Jean-François Grenier photo: Marie-Josée Parent

Bruno Bélanger, intervenant

L’agronome Bruno Bélanger, copropriétaire des Consultants Denis Champagne, dit que plusieurs producteurs de porcs se questionnent sur leur avenir. Ils se demandent s’ils vont appliquer le programme de retrait temporaire ou s’ils continuent. « Les producteurs de porcs sont des gens résilients, dit-il. Ils recherchent des solutions et nous approchent. Ils ont une bonne approche car ils demandent de l’aide. »

L'agronome Bruno Bélanger, copropriétaire des Consultants Denis Champagne
Bruno Bélanger photo: Marie-Josée Parent

Denis Dion, producteur

Le producteur de lait, de porcs et de grandes cultures Denis Dion de la Ferme Denis et Louise Dion de Saint-Narcisse-de-Beaurivage se prévaudra du programme de retrait volontaire des Éleveurs de porcs du Québec. De ses huit porcheries, les plus récentes seront louées et les plus anciennes seront tout simplement fermées. L’entreprise possède 485 hectares en cultures variées (maïs, soya, blé, orge, avoine, seigle). « L’agriculture est en éternel changement », dit Denis Dion qui délaisse la production porcine, mais pas l’agriculture. Ça fait déjà 50 ans qu’il œuvre en agriculture.

Denis Dion, producteur de lait, de porcs et de grandes cultures
Denis Dion photo: Marie-Josée Parent

Martin Grenier, intervenant

Le directeur des relations d’affaires Martin Grenier de Financement agricole Canada, qui œuvre dans la région de Chaudière-Appalaches, explique que beaucoup des clients sont touchés par la réduction de la production porcine. « Nous, on est là pour les accompagner, dit-il. C’est à chacun de décider ce qu’il veut faire. On va continuer à en manger du porc. » Il ajoute que l’aspect santé mentale est très important et que les conseillers dans son équipe ont tous fait la formation sentinelle. 

À PROPOS DE L'AUTEUR

Marie-Josée Parent

Marie-Josée Parent

Agronome et journaliste

Marie-Josée Parent couvre les productions laitière, bovine, avicole et porcine au Bulletin des agriculteurs.