L’intégration de l’enrichissement pourrait permettre aux producteurs d’économiser jusqu’à 10$ par porc, selon une étude de la Chaire de recherche industrielle sur le bien-être porcin du Western College of Veterinary Medicine de l’Université de Saskatchewan.
La chercheuse postdoctorale Martyna Lagoda, impliquée dans le projet, a expliqué lors du Symposium de l’industrie porcine de la Saskatchewan l’automne dernier à Saskatoon que le soutien des comportements naturels du porc profitera à la fois au porc et à l’éleveur.
Elle mène un programme de recherche visant à trouver des moyens d’améliorer le bien-être des porcs et de surveiller efficacement ce bien-être. Le but est de fournir au secteur porcin un aperçu de ce qui fonctionne.
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Attention à la qualité de l’eau!
Malgré une présence de traitement de l’eau dans 55% des fermes laitières d’une étude québécoise récente, 63% d’entre elles présentaient au moins un problème de qualité de l’eau.
«Grâce à ce programme, nous fournissons des preuves scientifiques sur les mécanismes, mais nous évaluons également la faisabilité pour l’industrie, a expliqué Martyna Lagoda. C’est un élément clé de ce travail. Nous voulions être pratiques au niveau commercial.»
1er objectif : gestion des porcelets
Le premier objectif de l’étude était la gestion des porcelets en début de vie, en mettant en œuvre des méthodes telles que l’ajout de matériaux à mâcher, l’augmentation du contact humain et l’offre d’un espace plus grand. Chaque méthode a montré des avantages significatifs.
L’ajout de matériaux à mâcher a favorisé les comportements naturels de morsure et de mastication des porcelets, ce qui a entraîné moins de lésions cutanées et moins de morsures de queue entre les porcelets. Ces résultats pourraient également être attribués au fait d’avoir plus d’espace pour la croissance et de favoriser les comportements sociaux, a noté Martyna Lagoda.
L’augmentation du contact humain a réduit la peur des humains et amélioré la facilité de manipulation.
L’analyse des coûts a montré que ces changements pourraient permettre aux producteurs d’économiser près de 4 dollars par porc. Martyna Lagoda a également expliqué que ces changements ont amélioré les gains moyens quotidiens à la pouponnière.
«Cela suggère que ces porcs sont mieux adaptés au stress du sevrage. C’est peut-être dû aux aliments à mâcher que nous leur avons fournis, ce qui leur a permis de mieux passer à la nourriture solide une fois sevrés.»
2e objectif : le jeu
Le deuxième objectif de la recherche concernait le jeu, un comportement naturel chez les porcs qui devrait être inclus et encouragé pour leur bien-être, a-t-elle expliqué.
Les chercheurs ont mesuré le jeu en utilisant un enclos témoin, un enclos classique avec un enrichissement minimal et un enclos de jeu avec un espace supplémentaire et des enrichissements. L’espace supplémentaire s’est avéré essentiel pour déclencher des comportements de jeu et garantir que l’enrichissement et le jeu sont agréables.
Les chercheurs ont mesuré l’expérience en testant la réponse du système nerveux autonome chez les porcs. Il a été démontré que le jeu favorise la relaxation, ralentit le rythme cardiaque et crée un état émotionnel positif.
Les résultats ont montré que l’utilisation du jeu chez les porcs entraînait moins de lésions cutanées, indiquant de meilleurs comportements sociaux, moins d’agressivité et moins de blessures associées.
«Ils ont moins de lésions, et c’est probablement parce qu’ils ont ces compétences sociales, a expliqué Martyna Lagoda. Ils ont donc pu résoudre leurs conflits avec des combats moins intenses.»
Les «cochons-joueurs» ont également montré une meilleure réponse immunitaire, ce qui se traduit par une diminution de la maladie en cas d’infection. Les porcs infectés ont également montré une plus grande activité et avaient des globules blancs plus forts pour combattre l’infection.
Martyna Lagoda a ajouté que l’analyse des coûts a montré des économies allant jusqu’à 6$ par porc en raison de la diminution des morsures de queue, de la réduction du traitement des maladies et de l’augmentation du gain quotidien.
Quand la plupart des gens pensent à l’enrichissement, ils pensent à quelques jouets disséminés dans la porcherie. Mais il peut s’agir d’un ensemble de stratégies beaucoup plus vaste, a-t-on expliqué au public.
«La plupart des gens pensent que c’est une chose physique, mais il peut y avoir des aspects physiques, sociaux, nutritionnels… il y a différents aspects de ce que nous considérons comme un enrichissement», a expliqué Ken Engele, directeur du transfert des connaissances au Prairie Swine Centre.
Faible utilisation
Le concept d’enrichissement des porcs est bien établi, mais n’est pas pleinement mis en œuvre tout au long de la chaîne de production porcine.
Une enquête menée en 2023 par le Prairie Swine Centre a montré peu de changement dans l’utilisation de l’enrichissement dans certaines parties du système de production par rapport à l’enquête menée cinq ans plus tôt.
Environ 60 % des élevages d’engraissement continuent d’utiliser des équipements d’enrichissement, un chiffre pratiquement inchangé. Les pouponnières ont toutefois connu une croissance de l’utilisation de l’enrichissement. Elle était d’environ 10 % en 2018, mais a augmenté à un peu plus de 50 % en 2023.
On accorde désormais une plus grande importance à l’enrichissement des bâtiments d’élevage à chaque étape de la croissance, notamment parce qu’il est recommandé dans le code de pratiques porcines depuis près de 10 ans.
Plusieurs raisons peuvent expliquer pourquoi les producteurs n’intègrent pas d’enrichissement dans leurs étables. Selon Ken Engele, l’enquête a mis en évidence cinq raisons courantes : le manque de temps, le fait de ne pas croire que c’est nécessaire, le fait de ne pas vouloir faire l’investissement, la crainte d’endommager l’infrastructure de l’étable et la crainte que l’équipement d’enrichissement ne finisse dans la fosse à fumier.
Martyne Lagoda et Ken Engele ont tous deux expliqué que l’enrichissement ne doit pas nécessairement être coûteux et Ken Engele a dit que le niveau de base est «vraiment très bon marché ». Les jouets d’enrichissement commerciaux, suspendus et au sol, pour les opérations de nurserie et de finition ne sont pas les seules options.
Ils ont encouragé l’utilisation de matériaux et d’objets recyclés qui existent déjà dans une ferme, comme des cordes, des chaînes et des tuyaux à suspendre aux chevrons. D’autres options incluent des contenants en plastique, du carton et des balles.
Qu’il s’agisse d’objets commerciaux ou réutilisés, il faut veiller à ce que la taille de l’animal soit adaptée. L’autre aspect essentiel est de veiller à ce que les objets soient bien entretenus. Les cochons ne veulent pas jouer avec quelque chose de sale.
«Si vous mettez une boule de quilles là-dedans, elle se recouvre de fumier. Elle perd un peu son attrait, explique Ken Engele. Il faut donc en faire quelque chose tout le temps et l’entretenir régulièrement pour maintenir l’intérêt des cochons.»
Article de Janelle Rudolph paru dans le Western Producer, traduit et adapté par Marie-Josée Parent.
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