On entend souvent parler d’El Niño sans toutefois bien comprendre ce que c’est et les impacts possibles sur la météo. On vous démêle ça.
En termes simples, El Niño est un changement de température de la surface de l’océan Pacifique tropical et subtropical. Cela crée un changement des conditions météorologiques. L’océan Pacifique couvre la moitié de notre planète, donc tout changement est susceptible d’avoir un impact ailleurs.

Pour comprendre pourquoi, nous devons réaliser qu’il faut beaucoup d’énergie pour réchauffer l’eau, et inversement, l’eau libère beaucoup d’énergie lorsqu’elle se refroidit. L’eau est comme une batterie qui stocke la chaleur, et le Pacifique est une grande batterie de chaleur.
La météo est le résultat de l’atmosphère qui essaie de corriger les déséquilibres de chaleur. S’il y a trop de chaleur dans un endroit ou trop de froid dans un autre, l’atmosphère essaie de rendre les choses égales en envoyant de l’air froid vers le sud et de l’air chaud vers le nord.
À lire aussi

C’est bientôt la Tournée des grandes cultures
La Tournée des grandes cultures, dont le but est d’évaluer le potentiel de rendement du maïs et du soya, aura lieu cette année le 19 août dans plusieurs régions du Québec.
Les régions tropicales de notre planète voient rarement, voire jamais, de l’air froid se déplacer vers le sud. Si vous vivez dans les régions arctiques, vous voyez ou ressentez rarement, voire jamais, de l’air vraiment chaud se déplacer vers le nord. Nous qui vivons entre les deux, nous ressentons et voyons constamment ce mouvement et nous l’appelons « météo ».
Pour comprendre El Niño et son opposée, connue sous le nom de La Niña, nous devons garder à l’esprit la direction et la force des vents et considérer leur effet sur l’océan Pacifique. Si l’on regarde l’effet du vent sur une étendue d’eau, on peut voir le vent pousser l’eau. Par exemple, un vent fort du nord élèvera le niveau du lac Champlain à l’extrémité sud, et vice versa.
Transférez cette idée à l’océan Pacifique, qui a des milliers de kilomètres de long. Dans les régions tropicales, les vents dans le Pacifique soufflent presque toujours d’Est en Ouest. Cela repousse l’eau loin de la côte ouest de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud et la pousse de l’autre côté du Pacifique.
Lorsque les vents d’Est dans les tropiques soufflent au large des Amériques, ils poussent l’eau de surface. L’eau de surface est remplacée par l’eau d’en dessous. Si vous vous êtes déjà baigné dans un lac, vous savez que l’eau est beaucoup plus froide près du fond qu’en surface. Dans le Pacifique, c’est pareil et l’eau qui monte pour remplacer l’eau repoussée par le vent est froide.
Donc, nous avons maintenant de l’eau froide le long de la côte tropicale et subtropicale de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud et l’eau de surface est poussée à travers le Pacifique et s’accumule de l’autre côté. Pendant que l’eau de surface traverse le Pacifique, elle est chauffée par le soleil. L’eau quand elle arrive de l’autre côté est donc très chaude.
L’eau froide garde l’air au-dessus d’elle plus fraîche, tandis que l’eau chaude garde l’air au-dessus d’elle plus chaude. De plus, l’eau froide ne s’évaporera pas aussi facilement que l’eau chaude. Cela signifie que nous voyons moins de nuages et de précipitations sur les côtes des Amériques où l’eau est froide et plus de nuages et de précipitations de l’autre côté du Pacifique. C’est la situation considérée comme « normale » pour l’océan Pacifique.

Les vents du monde
Lorsque les scientifiques disent qu’un événement El Niño ou La Niña se produit, ce schéma normal de vents et de température de l’océan change. Pour El Niño, nous voyons un réchauffement inhabituel du Pacifique dans des zones qui sont généralement froides, et pendant un événement La Niña, nous voyons un refroidissement du Pacifique sur des zones qui sont généralement chaudes.
Pendant El Niño, l’excès d’énergie ou de chaleur stocké est libéré dans l’atmosphère et doit aller quelque part. Une partie se contente de réchauffer l’air, mais ensuite l’atmosphère veut équilibrer cet air chaud.
Une grande partie de l’énergie thermique provenant du Pacifique se transforme en nuages, précipitations et tempêtes. Ces évènements météorologiques sont une manière efficace pour l’atmosphère de déplacer la chaleur et de l’équilibrer, car plus d’énergie peut être déplacée dans de l’eau chaude que dans de l’air chaud. La plupart de l’énergie est stockée sous forme de chaleur latente qui sera libérée lorsque la vapeur d’eau se condensera.
Ce mouvement global de l’air chaud et des systèmes de tempêtes sur l’océan Pacifique crée un schéma général de la direction des vents à travers le monde.
Si nous changeons la quantité de chaleur sur une grande partie du Pacifique, que ce soit en réchauffant l’océan Pacifique (El Niño) ou en le refroidissant (La Niña), cela perturbe le mouvement général de l’air dans cette région.
Quels sont les impacts d’El Niño et La Niña au Canada et au Québec?
Selon Environnement Canada, le phénomène El Niño affecte le pays surtout en hiver et au printemps. Les hivers et les printemps sont plus doux que la normale dans l’Ouest, le Nord-Ouest et le Centre du Canada. Généralement, El Niño n’a pas d’impact important dans l’Est du Canada, y compris les Maritimes.
Quels sont les impacts de La Niña?
Au Canada, parmi les anomalies climatiques qui sont observées durant les mois d’hiver, on retrouve des précipitations supérieures à la moyenne en Colombie-Britannique, des températures plus froides que la normale dans les Prairies et des précipitations supérieures à la moyenne en Ontario et au Québec. (Source Environnement Canada)
Traduction et adaptation de l’article Understanding El Niño and La Niña publié dans le Manitoba Co-operator.
*Cet article a été écrit par Daniel Bezte, enseignant en géographie, spécialisé en climatologie, de l’Université de Winnipeg, en collaboration avec Yvon Thérien, éditeur du Bulletin des agriculteurs.