Luxembourg (Luxembourg), 24 juin 2005 – Les ministres européens de l’Environnement ont rejeté la demande de la Commission européenne de lever les interdictions nationales d’OGM, qui portent sur plusieurs variétés de maïs et de colza, bannies selon les cas en Autriche, en Allemagne, au Luxembourg, en France et en Grèce.
C’est la première fois qu’une proposition de la Commission sur les OGM est rejetée par une majorité qualifiée des Etats membres. Au minimum 22 des 25 Etats membres ont voté contre ou se sont abstenus sur les huit propositions de la Commission sur la table, seul le Royaume-Uni votant systématiquement pour, soutenu par les Pays-Bas dans cinq cas et le Portugal sur une mesure.
« Nous avons donné un message clair, net et sans bavure à la proposition de la Commission », a souligné le ministre luxembourgeois Lucien Lux, dont le pays préside l’UE jusqu’à la fin du mois.
Ces cinq Etats avaient décidé entre 1997 et 2000 d’appliquer des « clauses de sauvegarde nationales » pour s’opposer à la mise sur le marché de ces semences génétiquement modifiées, pourtant déjà autorisés dans l’UE.
La législation permet aux Etats de faire jouer une clause d’interdiction temporaire de culture ou de vente d’OGM lorsque des informations scientifiques nouvelles entrent en leur possession, mettant en doute l’inocuité de ces produits.
Les variétés concernées sont les maïs T25 et MON810 (interdites en Autriche), le maïs Bt176 (Autriche, Allemagne et Luxembourg), les colza Topas 19/2 (France et Grèce) et MSI-RF1 (France)
Mais, en juillet 2004, l’Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA) avait estimé que les informations supplémentaires ne modifiaient pas son évaluation selon laquelle ces produits ne représentaient pas un risque pour la santé ou l’environnement. La Commission explique qu’elle était en conséquence contrainte, selon la procédure en vigueur, à proposer la levée de ces clauses.
« La Commission avait l’obligation légale de faire en sorte que la législation sur l’autorisation des OGM soit correctement appliquée », a argué le commissaire à l’Environnement Stavros Dimas. « Le vote d’aujourd’hui envoie un message politique des Etats membres, qui veulent modifier le système », a-t-il ajouté.
Bruxelles pourrait donc faire de nouvelles propositions législatives pour tolérer ces clauses. L’UE doit agir vite car elle est sous la pression d’une plainte à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) des Etats-Unis, de l’Argentine et du Canada qui contestent le maintien de ces clauses de sauvegarde. Un jugement intermédiaire de l’OMC est attendu au mois d’août.
Les associations écologistes se sont réjouies du vote intervenu à Luxembourg. « La Commission doit arrêter de se cacher derrière des procédures technocratiques et respecter les inquiétudes du public sur la protection de santé et de l’environnement », a souligné Eric Gall de Greenpeace.
« Le vote d’aujourd’hui met en question la crédibilité de l’EFSA », ont estimé les Amis de la Terre qui dénoncent les « positions pro-biotechnologies » de l’agence.
M. Lux, dont le pays organise un référendum sur la Constitution européenne à l’issue incertaine le 10 juillet, a dit espérer que ce vote fasse « bouger le scepticisme qui règne encore dans les milieux écologiques, vers un oui franc et massif ».
Les ministres n’ont pas réussi par ailleurs à se mettre d’accord sur une demande d’autorisation à des fins d’alimentation humaine et animale pour un maïs de Monsanto, le MON 863.
Aucune majorité qualifiée n’ayant été atteinte, c’est la Commission qui devra trancher, selon la procédure.
Ce dossier est très controversé en raison d’effets négatifs observés sur la santé des rats de laboratoire nourris par ce maïs.
À lire aussi

Le monde agricole déçu des engagements du gouvernement Legault
Les promesses agroenvironnementales et la tarification carbone ne sont pas à la hauteur des attentes de l’UPA et des Producteurs de grains du Québec. Entrevue.
Source : AFP