Si le Québec et le Canada veulent atteindre la carboneutralité d’ici 2050, ils auraient intérêt à miser sur une technologie éprouvée, à la portée de tous les agriculteurs : le captage de carbone par la photosynthèse et la séquestration de ce carbone dans la matière organique des sols.
« Si on augmentait de 1% le taux de matière organique dans les sols cultivés de la Montérégie, ça compenserait pour toutes les émissions de carbone au cours d’une année au Québec », a déclaré l’agronome Jacques Nault, vice-président agronomie chez Logiag, lors du Rendez-vous végétal du 13 février dernier.
Alors que les pétrolières investissent des milliards dans le développement de technologies d’injection de carbone dans la croûte terrestre, la séquestration du carbone par de bonnes pratiques agricoles passe sous le radar, a déploré Jacques Nault, qui dirige d’importants projets pour accompagner des agriculteurs québécois dans leur démarche de réduction des émissions de GES.
À lire aussi

Inondation dans les champs: quoi faire selon les cultures
La pluie a causé des siennes dans plusieurs régions mais avant de s’inquiéter, le RAP rappelle quelques informations et conseils sur ce type de situation.
« L’autre jour, j’ai eu la chance de rencontrer mon député dans un cocktail. Je lui ai demandé s’il allait investir dans les technologies de captage qui envoient le carbone dans la croûte terrestre », a-t-il raconté.
« Je lui ai dit : je suis au courant d’une technologie qui a fait ses preuves et qui capte le carbone. Ça existe depuis longtemps, à peu près 100 000 000 d’années. J’ai un groupe que je connais qui utilise ça toutes les années. Ça s’appelle la photosynthèse, puis le groupe, c’est des agriculteurs. »
Les agriculteurs peuvent réduire leurs propres émissions de GES en améliorant leurs pratiques d’élevage ou de culture. Ils peuvent aussi, croit Jacques Nault, contribuer de manière significative au bilan carbone de la société en général en séquestrant du carbone dans le sol.
L’usage de cultures de couverture, l’implantation de prairies et l’application de fumier sont autant de pratiques qui contribuent à augmenter le taux de matière organique dans les sols.
En Montérégie, le taux de matière organique dans les sols agricoles oscille autour de 3 %. Le plan d’agriculture durable du ministère de l’Agriculture du Québec vise 4 % sur toutes les terres cultivées du Québec.
Jacques Nault calcule que l’augmentation de 1% du taux de matière organique sur 30 cm représente 36 tm/ha de matière organique. En générant une tonne métrique ™ de carbone organique dans le sol, on retire 3,67 tm de CO2 de l’atmosphère.
Donc en augmentant le taux de matière organique de 1% sur les 950 000 hectares de terres agricoles en Montérégie, on pourrait retirer 125,5 millions de tm de CO2.
« C’est 1,5 fois les émissions du Québec sur un an, explique Jacques Nault, mais en restant conservateur et en supposant qu’une partie risque de se renverser et de retourner dans l’atmosphère, on arrive à comprendre que l’augmentation de 1% du carbone organique correspond aux émissions du Québec pendant un an. »
Les pratiques qui contribuent à augmenter le taux de matière organique dans le sol sont bénéfiques à plusieurs autres égards, comme la fertilité, le stockage d’humidité et la biodiversité du sol.
Les gouvernements voudront-ils récompenser ces pratiques simples et épouvées, ou miseront-ils plutôt sur les grands projets de stockage géologique dans les profondeurs de la Terre, dont l’efficacité rester à démontrer?