On me demande souvent si je peux évaluer le rendement du maïs simplement à regarder les épis.
À regret, il m’est impossible de le faire, car il y a trop de paramètres à considérer, tels que la densité de population, le nombre de grains et leur grosseur, le poids spécifique, etc. Cela dit, j’ai souvent observé une relation entre l’uniformité des parcelles expérimentales et un rendement supérieur à la moyenne.
De nos jours, on devrait s’attendre à ce que le maïs soit plus uniforme qu’autrefois, puisque les semences d’un même hybride sont pratiquement des clones. En effet, la plupart des sélectionneurs de maïs utilisent maintenant la technique des lignées haploïdes-doublées.
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Les lignées consanguines issues de ces programmes d’amélioration sont pures et produisent fidèlement le même hybride à tout coup. Pourtant, on observe néanmoins des différences sur la ligne, même si toutes les plantes ont le même bagage génétique.
Certes, il est difficile d’obtenir une levée parfaitement égale dans la culture du maïs. S’ensuivent des retards de croissance qui mènent à une variation de la taille des épis. Cependant, les semoirs modernes offrent une précision de semis qui devrait normalement assurer l’homogénéité du stade de croissance.
Bref, la cause de la variation qu’on observe à l’automne pourrait être toute autre. En effet, le maïs et, dans une moindre mesure les céréales à paille, ont tendance à avoir des phénotypes plus variables en conditions de stress.
Bien que chaque plante exploite son propre microenvironnement, une compétition s’installe entre elles. Eh oui, non seulement doivent-elles compétitionner les adventices, mais elles doivent également le faire entre elles : on parle d’une compétition intraspécifique.
Plusieurs études sur l’évolution du germoplasme du maïs démontrent qu’une partie du rendement supérieur des hybrides modernes provient de leur tolérance accrue à la compétition intraspécifique.
Cependant, si le stress que subit la culture devient trop intense, la variabilité finit par se manifester. Ces stress peuvent être d’ordre hydrique ou être liés aux traitements phytosanitaires, à des peuplements trop denses, à un manque de lumière ou de fertilité.
Malheureusement, une communauté de plantes de maïs ne peut que partiellement compenser les pertes subies par les plantes chétives en permettant une croissance accrue des plantes voisines. C’est pourquoi une variation importante de la grosseur des épis sur la ligne est généralement néfaste au rendement du maïs.
Cela s’explique par le fait que le maïs et les céréales n’ont pas un rythme de croissance linéaire. Au contraire, leur croissance est ponctuée d’une phase d’élongation rapide, la montaison, qui précède la phase reproductive. Quelconque retard de croissance qui s’installe avant la montaison, aussi minime soit-il, sera ultérieurement amplifié, parce que les plantes les plus avancées domineront celles qui accusent un retard.
Par exemple, si votre levée était uniforme, mais qu’au moment de la floraison certains épis déploient leurs soies quelques jours après les autres, un stress est probablement survenu durant la phase végétative.
Notons que la production du pollen par les anthères précède normalement la sortie des soies. C’est donc dire que l’apparition des soies dicte le jour où les grains sont fécondés, s’il y a abondance de pollen. Le temps de la fécondation du maïs est donc un moment propice pour observer l’uniformité du stade de croissance.
D’autre part, si le stade de croissance est relativement uniforme lors de la floraison, mais qu’à la récolte les épis sont de tailles variables, il faut investiguer les causes possibles d’un stress qui serait survenu durant la phase reproductive.
On peut mesurer l’uniformité en faisant le calcul du coefficient de variation (CV) du poids ou du nombre de grains par épi. Idéalement, on pourrait prendre 10 épis consécutifs à trois endroits différents, pour un total de 30 épis.
Selon certaines études, en conditions optimales (peu de stress) le CV se situerait autour de 10%. En stress intense, par exemple, à une densité de semis exagérément élevée, le CV peut atteindre 30%. Vous pouvez consulter Google ou ChatGPT pour connaître la formule qui exprime le CV.