Une filière laitière biologique très dynamique au Saguenay – Lac Saint-Jean

Publié: 3 novembre 2017

Une filière laitière biologique très dynamique au Saguenay – Lac Saint-Jean

L’agronome Nelson Paradis, conseiller en gestion agricole pour le Groupe multiconseil agricole (GMA) du Saguenay–Lac-Saint-Jean est un témoin privilégié de l’évolution de la filière laitière biologique de la région. « Pendant longtemps, il n’y a eu qu’une seule ferme laitière biologique, la ferme des Chutes de Saint-Félicien, de 1980 à 2006, raconte Nelson Paradis. Le volume n’était pas suffisamment élevé pour justifier le transport. Ils ne recevaient donc pas de prime pour leur lait. » Au début des années 2000, une quinzaine d’entreprises laitières ont choisi de se convertir au bio. Un club lait bio a été formé en 2003. De 2006 à 2016, Nelson Paradis en était le coordonnateur.

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Un lait en demande

Depuis trois ans, le lait nordique biologique connaît un beau succès. Il est maintenant disponible à la grandeur du Québec dans divers supermarchés et magasins d’aliments naturels. En Ontario, il est offert depuis un an et demi dans les marchés spécialisés et les ventes sont en croissance. Maintenant propriété de Nutrinor, la fromagerie Perron a lancé il y a six mois une gamme de fromages certifiés AgroBoreal, juste à temps pour l’arrivée des fromages européens.

«Le lait bio dans notre région, c’est un bel exemple de concertation», dit-il. Le GMA assure la coordination et le suivi économique. Depuis l’an dernier, ce rôle est assumé par Émilie Bouchard. De son côté, Valacta a deux conseillers qui assurent le suivi technique sur une base mensuelle. Côté mise en marché, Nutrinor a sauté à pieds joints dans l’aventure. Elle a mis en marché ce qu’on appelle le lait nordique biologique. Ce lait connaît un beau succès commercial à l’extérieur de la région. «Ç’a été un facteur de motivation», rappelle Nelson Paradis qui montre fièrement un contenant de lait vide rapporté de sa maison.

UNE CERTIFICATION RÉGIONALE

«La certification AgroBoreal a permis à ce produit de se démarquer», explique Nelson Paradis. Le premier directeur de Nutrinor agroalimentaire, Paul Pomerleau, explique que c’est l’alimentation différente des vaches de la région qui confère des particularités au lait de la région. «Au Saguenay–Lac-Saint-Jean, il y a plus d’ensoleillement l’été, environ 35 à 40 minutes de plus par jour comparativement au Centre-du-Québec, explique-t-il. Les nuits sont aussi plus fraîches et les écarts de température entre la nuit et le jour sont plus grands. Ça affecte la photosynthèse.» Les fourrages sont, par conséquent, plus sucrés et le rapport oméga-3 – oméga-6 est amélioré. «Il y a eu des études qui ont fourni suffisamment d’indices pour que le gouvernement du Québec reconnaisse la spécificité de l’agriculture nordique», raconte Paul Pomerleau. Pour obtenir la certification AgroBoreal, une ferme laitière doit d’abord obtenir sa certification biologique et ensuite demander la certification AgroBoreal.

L’alimentation des vaches en régie biologique se fait en grande partie au pâturage et basée sur la consommation des fourrages. Pour la certification AgroBoreal, les fourrages et les grains doivent en plus être essentiellement locaux. En production biologique, les soins aux animaux sont avant tout préventifs. Pour contrecarrer la baisse de production liée à la mise en place de ces contraintes, les producteurs laitiers biologiques reçoivent une prime. L’an dernier, elle a été de 17 $ l’hectolitre. «La prime, c’est dû principalement au fait que la production par vache est moins élevée dans le bio», explique Nelson Paradis. Il en coûte 11 $ à 12 $ de plus l’hectolitre pour produire un lait biologique. Il reste donc de 5 $ à 6 $ de plus dans les poches des producteurs.

Les fermes biologiques sont un peu plus petites que les fermes conventionnelles de la région. Les 54 fermes laitières de la région compilées par le GMA ont en moyenne 76,3 vaches, alors que les 10 fermes laitières biologiques compilées ont 57,6 vaches. En raison de la prime, les employés sont mieux rétribués dans le bio. «La meilleure rentabilité des fermes leur permet d’offrir de meilleures conditions», explique Nelson Paradis. Beaucoup de jeunes producteurs laitiers s’intéressent à la filière bio.

La filière bio régionale permet ainsi à des fermes familiales de vivre de la production laitière. Selon les Producteurs de lait du Québec, sur 306 fermes laitières du Saguenay–Lac-Saint-Jean, 19 sont certifiées biologiques. Ce sont 15 % des fermes qui sont biologiques dans cette région, alors que le Saguenay–Lac-Saint-Jean ne représente que 12 % des fermes laitières de la province (5473 fermes laitières au Québec). «La région est surreprésentée au niveau provincial en production laitière biologique», explique Paul Pomerleau. À la laiterie de Nutrinor, 18 fermes livrent du lait certifié AgroBoreal. Deux seront certifiées sous peu et d’autres sont en cours de processus.

Nelson Paradis est fier du lait nordique biologique de Nutrinor et du travail en filière qui a permis sa mise en marché.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Marie-Josée Parent

Marie-Josée Parent

Agronome et journaliste

Marie-Josée Parent couvre les productions laitière, bovine, avicole et porcine au Bulletin des agriculteurs.