Un projet mené par des chercheurs de l’Université Laval jette un peu plus d’éclairage sur la pertinence d’espacer les rangs de maïs pour faire plus de place aux cultures de couverture.
Les essais ont eu lieu sur deux types de sols à Saint-Augustin-de-Desmaures, près de Québec, de 2021 à 2023. L’analyse des données n’est pas complétée, mais certains constats émergent sur ces « corridors solaires » qui laissent la lumière entrer entre les rangs de maïs.
En augmentant l’espace entre les rangs de 30 à 60 pouces, la baisse de rendement est de 15 %, révèle la chercheuse Caroline Halde. « C’est 15 % moins de rendement, mais ça ne veut pas dire qu’on perd 15 % de la rentabilité. » Ces résultats sont comparables à ceux obtenus dans des essais réalisés dans le Midwest américain, souligne-t-elle.
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À 60 pouces d’espacement, les plants de maïs se sont retrouvés plus proches l’un de l’autre sur le rang, mais le taux de semis (63 000 plants/ha) était inférieur à celui aux 30 pouces (84 000 plants/ha). Il y a donc une économie de 25 % sur la semence.

Le dispositif de recherche comprenait des traitements avec les deux espacements, sans cultures intercalaires, avec du ray-grass seulement et avec un mélange de six espèces en intercalaire. Sans surprise, c’est avec le mélange d’intercalaires que la biomasse de mauvaises herbes était la plus faible.
C’est dans l’espacement aux 30 pouces que les mauvaises herbes ont le moins grandi. Cependant, dans le maïs aux 60 pouces, la production de biomasse aérienne de cultures de couvertures était presque trois fois supérieure. « Les rayons lumineux pénètrent beaucoup mieux entre les rangs, explique Caroline Halde. La croissance des cultures de couverture est vraiment améliorée. »
Les chercheurs ont calculé que la rentabilité était au rendez-vous avec les deux espacements. Cependant, le gain net à passer de 30 à 60 pouces est négatif. Quand on délaisse l’espacement traditionnel, les bénéfices agroenvironnementaux se font aux dépens de pertes économiques immédiates. « Toute politique visant l’incitation à l’utilisation de ces pratiques devrait offrir des mesures compensatoires à une hauteur permettant de couvrir les pertes », préviennent les chercheurs.
Encore beaucoup de recherche est requise, souligne la chercheuse Caroline Halde. « Quels sont les meilleurs taux de semis? Les meilleurs hybrides? Je pense que dans cinq ans, nous en saurons beaucoup plus sur ce système-là. »
60 pouces… par erreur!
En 2022, à Saint-Aimé, près de Sorel, le producteur Ghislain Brouillard s’est retrouvé avec un rang de bouché sur son planteur, de sorte qu’il a semé du maïs aux 60 pouces involontairement sur une petite superficie.
« Du maïs aux 60 pouces avec une intercalaire, c’est complètement incroyable la biomasse qui pousse entre les rangs! » Le rendement est moindre qu’aux 30 pouces, mais plus payant qu’une céréale, estime-t-il. « Il y a un compromis à faire sur le rendement, au bénéfice d’une structure de sol incroyable! »
L’unité de semis en panne a laissé tomber un grain à tous les 40 pieds. Sans voisins immédiats, ces plants avaient chacun deux gros épis pleins. Pour Ghislain Brouillard, il s’agit d’une démonstration du potentiel très élevé des hybrides d’aujourd’hui.
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Du maïs aux 60 pouces, un article sur des producteurs québécois qui ont effectué des essais chez eux