Quatre ans après avoir été confirmée en Ontario, c’est au tour du Québec de relever ses premiers cas de la tache goudronneuse du maïs, une maladie fongique qui attaque les feuilles des plants de maïs-grain. La nouvelle a été confirmée dans le plus récent Rapport d’avertissement phytosanitaire (RAP) sur les grandes cultures.
Tanya Copley, chercheuse en phytopathologie au CÉROM, n’est pas surprise par la nouvelle. « On suivait la progression (de la maladie) depuis plusieurs années. C’était une question de temps avant que ça arrive dans nos cultures », dit-elle.
Depuis la détection en 2015 de la maladie aux États-Unis, elle a progressé tranquillement vers le nord en passant des États de la Pennsylvanie, jusqu’à New York et récemment l’Ontario. C’était une question de temps avant qu’elle soit détectée au Québec puisque les spores peuvent se propager sur de longues distances, soit plusieurs kilomètres, grâce au vent. Tania Copley ajoute qu’il a été confirmé que les spores peuvent hiberner.
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La tache goudronneuse apparaît sous forme de lésions de forme rondes ou ovales noires, surélevées et incrustées dans les tissus des feuilles du maïs, d’un diamètre de moins d’un centimètre. Elles sont souvent entourées d’un halo beige. Le meilleur moyen de la distinguer de la rouille commune ou des excréments d’insectes est de frotter la partie de la feuille présentant des tâches et de la mouiller. Les taches causées par la tache goudronneuse ne se délogent pas et ne laissent pas de traces sur les doigts lorsqu’on les frotte, précisent les experts qui ont rédigé l’avis du RAP.

Le fait de confirmer une nouvelle maladie est loin d’être une bonne nouvelle, mais fait rassurant, elle a peu d’impact à ce temps-ci de l’année. Elle apparait d’ailleurs surtout en fin de saison ou au stade reproductif du maïs.
En apparaissant plus tôt en saison, le champignon peut affecter la photosynthèse de la plante. « La maladie peut affecter les réserves de la plante et on peut voir une réduction de rendement. Dans les cas extrêmes, on peut voir un affaiblissement des tiges. Quand cela arrive en fin de saison, on voit rarement des pertes de rendements », déclare Tania Copley.
La tache goudronneuse a besoin de conditions climatiques favorables pour se développer, ce qui veut dire du temps frais, aux alentours de 15 °C à 21 °C, et d’un taux d’humidité relatif de 75 à 80%. « On retrouve surtout ces conditions en fin d’année », ajoute la chercheuse du CÉROM. Le champignon peut se retrouver partout dans le champ sans exception.

Détecter la tache goudronneuse
La détection demeure le meilleur moyen de contrôler la maladie, assure Tania Copley puisqu’aucun hybride de maïs ne résiste totalement à la maladie et que les seuils économiques restent encore à vérifier. Des tests américains semblent pointer vers des seuils de 20% d’infection d’un champ, mais des vérifications supplémentaires doivent avoir lieu.
La tache goudronneuse est une maladie récente qui cause des dommages économiques depuis 2018 aux États-Unis. Des équipes de chercheurs au Canada se penchent également sur la question. Les hybrides en question ne sont pas disponibles au Québec habituellement. Il faudrait considérer s’y prendre le plus tôt possible pour faire les appels nécessaires aux fournisseurs afin de les commander.
Puisque la maladie peut apparaitre dès juillet, la chercheuse recommande d’inspecter les champs dès les stades R1 jusqu’à R3, les stades à partir desquels les pertes pourraient être plus importantes. Les régions du sud du Québec sont les plus concernées par l’avis du RAP. Les producteurs du Centre-du-Québec, mais aussi de Chaudière-Appalaches, de la Montérégie et de l’Ouest de la province devraient faire preuve de vigilance.
Plusieurs techniques existent pour contrôler la maladie. La rotation est l’une d’elles, ainsi que le travail de sol puisque les résidus de maïs laissés au sol peuvent héberger les spores. Les champs cultivés en semis direct ne sont pas plus affectés par la maladie, souligne par ailleurs Tania Copley. Il existe des fongicides qui peuvent aider, mais comme les seuils économiques d’intervention restent à être évalués, il vaut mieux privilégier d’autres options disponibles, estime la chercheuse.
Pour en savoir plus sur la tache goudronneuse, regardez cette vidéo sur la maladie. Cette dernière a été réalisée avant qu’elle ne soit détectée au Québec.