Une baisse des taux d’intérêt prévue en 2024

Il faudra cependant surveiller de près le Québec et la situation géopolitique en 2024

Publié: 8 décembre 2023

Une baisse des taux d’intérêt prévue en 2024

La prochaine année devrait apporter un répit à tous ceux qui devront négocier de nouveaux emprunts en 2024. Financement agricole Canada (FAC) et Desjardins font partie des institutions s’étant avancées sur les décisions de la Banque du Canada (BdC) dans les prochains mois. FAC prévoit une baisse du taux réducteur de 0,75% à partir de la 2e partie de l’année, tandis que Desjardins entrevoit une réduction plus importante de 1,25% qui débutera en avril.

La perspective d’une baisse des taux directeurs semble acquise à la lumière des données sur l’inflation et l’emploi au pays. La première a diminué de manière importante, surtout si on la compare au niveau d’il y a un an (6,3 % en décembre 2022). En octobre, l’indice des prix à la consommation est passé à 3,1%, contre 3,8% le mois précédent. La fourchette ciblée de 3% à 1% par la banque centrale est plus près qu’elle ne l’a été depuis plusieurs mois. Le taux de chômage monte également au Canada, un signe que les pressions inflationnistes causées par les salaires ralentissent.

L’économiste principal Graeme Crosbie de FAC souligne que les nouvelles sur le front de l’économie sont toutefois en demi-teintes. L’économie canadienne a ralenti plus que prévu au 3e trimestre. Même si les données pour la 2e partie de l’année ont été révisées à la hausse, elles ne sont pas réjouissantes. Desjardins mise même pour une récession en début de 2024 au Canada, bien qu’on estime qu’elle sera courte et modérée.

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Les économistes pensent donc que la Banque du Canada n’aura d’autre choix que de lâcher du lest en abaissant son taux directeur. Reste à voir à quel rythme se fera la baisse. FAC se prononce pour une baisse de 75 points dans les douze prochains mois à partir de juillet 2024, puis que la cible de 2% de l’inflation sera atteinte plus rapidement que prévu. Pour Desjardins, le ralentissement obligera le gouverneur de la BdC à intervenir plus rapidement. FAC justifie sa position en faisait valoir l’indice de consommation, excluant l’énergie et l’alimentation, qui a augmenté en octobre.

Lors de sa dernière rencontre le 6 décembre, la banque centrale a agi comme prévu en maintenant ses taux à 5%. Elle a cependant surpris en adoptant un ton très prudent et en disant qu’elle serait prête « à augmenter de nouveau le taux directeur si nécessaire ». Les économistes s’attendent à ce que les prochains messages des dirigeants de la BdC indiquent l’approche qui sera adoptée l’an prochain. Les prochaines mises à jour de la politique monétaire auront lieu le 24 janvier, le 6 mars et le 10 avril 2024.

Québec

FAC ne fait pas de prévisions par province, mais questionné par Le Bulletin, Jean-Philippe Gervais, économiste en chef, a indiqué que le marché du travail, alors robuste au Québec, déclinait plus rapidement qu’ailleurs au pays, ce qui entraînerait un ralentissement des dépenses de consommation un peu plus important. En conséquence, « cela pourrait donc générer une croissance du PIB un peu moins élevée au Québec ». L’inflation devrait prendre la même courbe descendante que pour le Canada.

Quoi surveiller

Les perspectives économique s’améliorent, mais pas au même rythme en agriculture. Jean-Philippe Gervais avance que les prix d’alimentation animale devraient demeurer bas dans la première moitié de 2024, ce qui pourrait compenser pour « des prix en production animale qui sont présentement en pente descendante ». Le secteur des grandes cultures serait encore sous pression. « Le coût de production est à surveiller en production végétale. Le prix des intrants demeure élevé et certaines entreprises devront composer avec des taux d’intérêt qui demeureront élevés même si le taux de la Banque du Canada baissera en 2e  moitié de l’année ». 

Mais comme l’ont démontré les dernières années, le contexte économique et politique sont très instables, ce qui fait qu’il ne faut pas écarter l’impact des risques géopolitiques. Jean-Philippe Gervais cite une escalade de la situation en Ukraine ou au Moyen-Orient. Dans ce cas, le prix des matières premières pourrait être poussé à la hausse, comme cela s’est vu au déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022. Une flambée de l’inflation pourrait retarder un relâchement de la politique monétaire. « D’un autre côté, les marchés sont très agressifs en anticipant une baisse de taux aussi tôt que le mois de mars. Si le ralentissement économique au Canada est plus important que prévu, cela pourrait mener à une baisse de taux en accord avec les attentes de marchés financiers », explique Jean-Philippe Gervais. 

À PROPOS DE L'AUTEUR

Céline Normandin

Céline Normandin

Journaliste

Céline Normandin est journaliste spécialisée en agriculture et économie. Elle collabore également au Bulletin des agriculteurs.