
*Les plantes fourragères pérennes sont souvent prisées pour leur capacité à capter le carbone atmosphérique et à le séquestrer dans le sol. Et si l’impact positif des fourrages sur les émissions de gaz à effet de serre s’étendait au-delà du champ et jusqu’à la mangeoire ?
Les ruminants ont la capacité unique de leur espèce à transformer des fibres indigestes en lait et en viande de haute qualité. Toutefois, les microbes responsables de ce processus de fermentation contribuent également aux émissions de méthane entérique du bétail.
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Les conditions actuelles exigent une grande flexibilité et une prise de décision rapide pour un apport en fourrage suffisant. Voici quelques recommandations de nos experts.
Le méthane entérique est produit dans le rumen lorsque les bactéries méthanogènes transforment le dioxyde de carbone et l’hydrogène provenant de la dégradation des aliments en méthane et en vapeur d’eau.
La production de méthane entérique par les ruminants représente près de 30 % des émissions totales de méthane du secteur agricole. Cette statistique ne doit pas être utilisée pour décourager le rôle incontestable des bovins de boucherie et des vaches laitières dans l’approvisionnement alimentaire de notre pays, mais plutôt pour inspirer des solutions qui réduisent les émissions de méthane dans tous les aspects d’une exploitation, y compris la sélection des fourrages.

Tout comme la qualité et le potentiel de rendement varient d’une espèce végétale à l’autre, la production de méthane entérique varie également d’un fourrage à l’autre. Le fait de donner un type de fourrage plutôt qu’un autre pourrait modifier la fermentation microbienne, réduisant ainsi la production de méthane entérique par le bétail.
Les plantes ont évolué avec les micro-organismes et ont développé des métabolites secondaires pour se défendre contre les attaques microbiennes et d’autres stress environnementaux. Par conséquent, les fourrages et les diverses cultures de couverture pourraient avoir des profils de méthane entérique différents.
En 2022, des chercheurs du Minnesota ont mesuré la qualité des fourrages et la production de méthane entérique de 28 espèces cultivées dans des parcelles de démonstration. Ils ont évalué les fibres de détergent neutre (NDF), la digestibilité des fibres de détergent neutre (NDFD48), les fibres de détergent acide (ADF) et la production de méthane entérique sur 48 heures de matériel végétal séché à l’étuve et récolté au stade du bourgeon ou de la botte.

La plus grande différence entre les espèces observées est que la production de méthane entérique des céréales à grains comme le maïs, le blé et l’avoine a continué à augmenter avec le temps, alors que celle des cultures comme la luzerne, le teff (graminée annuelle) et le millet a chuté après 24 heures. Les pois fourragers et le trèfle incarnat ont produit les taux les plus faibles de méthane entérique.
Il existe peu de recherches sur les métabolites secondaires – tels que les tanins, les phénols et la lignine – qui ont un impact sur la fermentation microbienne, mais on étudie les composés présents dans ces fourrages afin de déterminer comment ils limitent la production de méthane entérique. Cela dit, l’incorporation de fourrages ayant le plus faible potentiel de méthane entérique peut ne pas être pratique ou réalisable dans toutes les fermes.
Dans l’ensemble, l’étude n’a révélé aucune corrélation entre la qualité des fourrages et la production de méthane entérique. Les premières mesures ne peuvent pas être utilisées pour estimer la seconde, et que les seuls moyens de quantifier la production de méthane entérique sont les essais de digestion in vitro ou les mesures directes effectuées par des systèmes d’émission d’aliments pour animaux comme Green Feed (qui est un système mobile permettant de mesurer sur de courtes durées les gaz respiratoires émis par les ruminants).
Source: Hay&forage grower
*Texte réalisé par Christian Duchesneau, en collaboration avec le Conseil québécois des plantes fourragères (CQPF). Les propos exprimés dans le texte ne relèvent toutefois que de l’auteure et n’engagent pas le CQPF.
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