L’amarante de Palmer aux portes du Québec

La contamination proviendrait d’une moissonneuse-batteuse achetée aux États-Unis

Publié: il y a 10 heures

Champ en Ontario infesté par l'amarante de Palmer.

Deux ans après avoir été détectée une première fois en Ontario, l’amarante de Palmer a fait l’objet d’un deuxième signalement au début septembre dans la province voisine, cette fois dans le comté de South Glengary, tout près de la frontière avec le Québec.

Les tests du Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP) du MAPAQ ont révélé des résistance aux herbicides des groupes 2 et 9. Celle au groupe 5 pourrait aussi s’appliquer, puisque d’autres mécanismes de résistance que ceux testés sont possibles, déclare le LEDP.

La différence de ce signalement par rapport à celui de 2023 tient à la quantité d’amarante dans le champ, indique Sandra Flores-Mejia, chercheuse en malherbologie au Centre de recherche sur les grains (CÉROM). « Le champ en entier est infesté alors que la dernière fois, il y avait quelques plants qui avaient pu être arrachés à la main, mentionne la chercheuse. Cette fois-ci, il faudra établir une technique d’éradication et un suivi serré puisqu’il n’y a pas beaucoup d’alternatives. »

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L’amarante de Palmer est en effet résistante aux États-Unis aux groupes d’herbicides 2, 3, 4, 5, 6, 9, 10, 14, 15 et 27. Elle se distingue de l’amarante tuberculée par le fait qu’elle soit beaucoup plus agressive, cause plus de pertes de rendement et comme indiqué plus haut, a de très nombreuses résistances aux herbicides. « L’amarante de Palmer doit être prise au sérieux, car elle est très prolifique. Elle peut produire un million de graines. Les pertes de revenus sont estimées à 79% dans le soya et 91% dans le maïs », indique la chercheuse.

Les modélisations des changements climatiques faites aux États-Unis révèlent d’ailleurs que la mauvaise herbe peut maintenant s’adapter aux conditions climatiques du sud du Canada. Les conditions de cet été, marquées par les canicules et la sécheresse, sont aussi propices à son développement. « Elle adore la chaleur. Elle a eu les conditions parfaites pour proliférer cette année. »

Vigilance et biosécurité

L’avis émis par le Réseau d’avertissement phytosanitaire ne veut pas dire qu’il faut céder à la panique. L’amarante de Palmer n’est pas encore au Québec et il s’agit essentiellement d’un avertissement pour les producteurs. « L’avis nous dit qu’il faut garder l’œil ouvert. Les producteurs sont les mieux placés pour surveiller leurs champs puisque ce sont eux qui les connaissent le mieux. Le but est d’être prêt à intervenir si elle arrive au Québec. » Avec les derniers signalements, il n’est pas question de savoir si elle se retrouvera ici, mais quand, signale la chercheuse.

La population trouvée en Ontario est également un rappel à la vigilance quant aux équipements agricoles puisque la contamination proviendrait d’une moissonneuse-batteuse achetée aux États-Unis. La source de l’infestation de l’amarante tuberculée au Québec aurait la même origine.

Sandra Flores-Méjia a mené récemment une étude quant aux résidus se trouvant dans un tel équipement agricole. Après avoir nettoyé une moissonneuse-batteuse qui avait connu un premier nettoyage, son équipe y a tout de même récupéré 34 kg de poussière, dont 6000 graines de mauvaises herbes comprenant des chénopodes, des vergerettes du Canada et des amarantes, prouvant une fois de plus que l’équipement agricole peut être le foyer d’une infestation.

« Tout équipement agricole doit faire l’objet d’un nettoyage approfondi », indique la chercheuse. C’est particulièrement le cas des moissonneuse-batteuses puisqu’elles sont dans le champ au moment critique de maturité des mauvaises herbes et que leur fonction est de séparer les graines des tiges.

Malgré l’arrêt de la subvention pour le suivi et la gestion sur les moyens de contrôler l’amarante dans les champs infectés, de nombreuses ressources existent pour aider les producteurs. Sandra Flores-Méija encourage les producteurs à y avoir recours, que ce soit par le biais du LEDP, les agronomes régionaux du MAPAQ, ou les experts-conseils. De nombreuses fiches explicatives sont aussi disponibles. « C’est grâce à ces outils que les gens peuvent savoir comment reconnaitre l’amarante et savoir quoi faire en cas de doute. »

Pour plus d’information, veuillez consulter les documents suivants :

Le LEDP offre aussi gratuitement un service d’identification et de détection de la résistance aux herbicides pour toutes les espèces d’amarantes

À PROPOS DE L'AUTEUR

Céline Normandin

Céline Normandin

Journaliste

Céline Normandin est journaliste spécialisée en agriculture et économie. Elle collabore également au Bulletin des agriculteurs.