Depuis le 1er juin, le Programme des technologies propres en agriculture (TPA), volet Adoption, reçoit de nouvelles demandes.
Instauré il y a deux ans, le programme a déjà accordé du financement à 249 projets au pays, dont 29 seulement au Québec. Parmi les entreprises se trouve Entosystem, de Drummondville, qui fabrique des produits à base d’insectes pour les engrais et aliments pour animaux. Cette dernière a reçu 2 M$, le maximum accordé par le programme, pour l’achat et l’installation de technologies et d’appareils écoénergétiques de pointe. (Article et visite de l’usine ici)
Dans le cadre du TPA, les entreprises agricoles peuvent demander une subvention de 25 000 $ à 2 M$ pour acquérir et installer des équipements pouvant réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) ou présentant d’autres avantages connexes pour l’environnement.
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Le Programme des TPA cible trois domaines prioritaires : l’énergie verte et l’écoénergie, l’agriculture de précision et les solutions de bioéconomie. Pour le prochain volet, dont les demandes sont acceptées jusqu’au 22 juin, la priorité sera accordée à l’écoresponsabilité et aux projets qui se montrent les plus prometteurs à réduire de façon mesurable les émissions de GES et celles liées au méthane et aux engrais.
La ministre de l’Agriculture, Marie-Claude Bibeau, indique que le ministère a été submergé de demandes lors du premier appel. Elle explique la popularité du programme par le fait qu’il soit ouvert à tout le monde, en autant que les critères soient respectés, que ce soit l’achat de technologies vertes ou dans le but de réduction écoénergétique. « Ce peut être un séchoir à grains, l’achat de technologie d’agriculture de précision ou d’un système de chauffage pour un poulailler », explique Marie-Claude Bibeau. Elle ajoute que le manque de demandes du Québec vient peut-être d’un problème de communication, mais appelle les entreprises agricoles à déposer leurs demandes.
La question des engrais
Le ministère de l’Agriculture poursuit de nombreuses cibles en environnement, dont une de réduction des GES émis par les engrais. Le sujet préoccupe les producteurs qui s’interrogent sur leur capacité à s’approvisionner ou à utiliser les engrais. À ce propos, la ministre rappelle qu’il n’est pas question de limiter l’usage d’engrais, mais les GES reliés à ces derniers. Les fertilisants azotés sont surtout dans la mire, indique la ministre. « Ce qu’on vise, c’est de réduire les émissions de GES par la R&D et la mise en oeuvre de bonnes pratiques », dit-elle. Le fédéral, rappelle-t-elle, favorise la science, entre autres par la recherche de fertilisants alternatifs. « Le Canada a un rôle important à jouer sur la scène internationale afin de subvenir aux besoins alimentaires de la population et il n’est pas question de mettre en jeu la rentabilité et la productivité du secteur agricole canadien », ajoute la ministre.
À propos de l’approvisionnement d’engrais au pays, Marie-Claude Bibeau a réitéré que les 34 M$ accordés aux producteurs des provinces de l’Atlantique, du Québec et de l’Ontario, par le biais du programme Action-climat, était la meilleure manière de les compenser pour les dépenses liées à l’achat d’engrais russe, frappés d’une surtaxe par le Canada en 2022. « C’était impossible de verser un remboursement direct. La raison est que les intermédiaires ont appliqué de différentes façons les tarifs, ce qui rendait la tâche extrêmement complexe », explique-t-elle.
Et bien que ce soit dans les recommandations du Comité sénatorial permanent de l’agriculture de favoriser la production d’engrais dans l’Est du pays, la ministre préfère favoriser une solution provenant du secteur privé ou de la R&D.
Développer les marchés internationaux, malgré les embûches
Mme Bibeau était récemment en mission commerciale en Asie où l’ouverture d’un bureau dédié au commerce a été annoncée. Le but est de diversifier et d’agrandir les marchés pour le Canada, indique la ministre, au-delà des États-Unis et de la Chine qui a soumis le Canada à des pressions économiques. Un récent document de Financement agricole Canada démontrait toutefois que les résultats se faisaient attendre, à la suite de la signature de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP). « Ouvrir un marché prend du temps. Il y a de belles opportunités dans la région pour le blé, le porc et le bœuf canadien ».
La ministre sera par ailleurs en Inde bientôt pour une réunion des ministres de l’Agriculture du G20. Elle souhaite poursuivre les discussions quant à une ouverture du marché indien aux denrées canadiennes. « Ce ne sont pas des discussions simples. Il faut le faire de manière respectueuse. Je crois qu’ils ont peur de mettre en péril leur mode de production locale avec nos produits industriels mais je vais profiter de la rencontre des ministres pour aborder ces sujets. »
Mme Bibeau s’est dite également confiante de voir une décision en faveur du Canada dans la question des contingents tarifaires des produits laitiers. Les États-Unis ont demandé une deuxième fois groupe spécial de règlement des différends de l’Accord Canada?États-Unis?Mexique (ACEUM) de se pencher sur les pratiques du Canada. Une première décision du groupe avait donnée raison aux États-Unis. Elle dit parler régulièrement à son vis-à-vis américain, Tom Vilsak. « On suit les procédures. On fait les choses bien. Les États-Unis souhaiteraient plus de flexibilité sur les acheteurs de quotas de la part des transformateurs, pour que ce soit des détaillants comme Loblaw, mais on respecte les quotas fixés dans l’entente.»
L’entreprenariat au féminin
Finalement, la ministre a présenté la semaine dernière un programme d’un peu plus de 2M$ aux Agricultrices du Québec afin de favoriser l’entreprenariat féminin en agriculture, ici et ailleurs au Canada. « L’association est la plus structurée et de loin au pays. On souhaite favoriser un environnement entrepreneurial pour les femmes et la relève. » Elle se dit encore estomaquée de voir les garçons privilégiés comme relève au détriment des filles. Elle vise donc à fournir du mentorat et un accès à des services financiers pour celles qui ont moins d’opportunités de bien s’entourer, parce qu’elles ont aussi, entre autres, le fardeau de la famille. « C’est une question de représentativité. C’est prouvé qu’une entreprise diversifiée est mieux gérée. C’est donc gagnant-gagnant ».