Étude de 30 ans lancée au Québec sur l’apport des cultures pérennes

La recherche portera sur les valeurs des services écosystémiques des cultures pérennes et de couverture

Publié: il y a 1 jour

La ferme expérimentale de Saint-Lambert-de-Lauzon.

Les recherches de longue durée sur les pratiques culturales ne courent pas les rues au Québec. L’IRDA aura la chance d’en mener une à la ferme expérimentale de 42 hectares qu’elle exploite à Saint-Lambert-de-Lauzon, en Chaudière-Appalaches.

Une équipe dirigée par la chercheuse Christine Landry mènera une recherche de 30 ans sur les valeurs des services écosystémiques des cultures pérennes et de couverture, ceci dans le cadre d’une gestion durable des systèmes agronomiques.

Dans les faits, le projet bénéficie des terres de la ferme expérimentales sur laquelle différents systèmes sont pratiqués depuis plusieurs décennies, dont les prairies fertilisées selon différentes méthodes. Un projet de quatre ans, débuté cette année, viendra donc se greffer à ce qui est déjà en place afin de comparer ces systèmes à un autre utilisant la fertilisation minérale et les cultures de couverture dans un système de rotation comprenant le maïs. C’est là que l’apport des recherches de longue durée prennent tout leur sens, surtout qu’il n’en existe que deux ou trois au Canada, ajoute Christine Landry.

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« Actuellement, dans le contexte actuel de l’agriculture du Québec, on trouvait intéressant de couvrir les cultures de couverture, puisque ce n’est pas tout le monde qui va faire des prairies. Il y en a de moins en moins, si on compare il y a 40 ans. On en a profité pour ajouter cet l’aspect culture de couverture ou engrais verts », mentionne la chercheuse.

Le projet va intégrer de manière annuelle des prairies dans des parcelles qui n’en n’ont jamais cultivées afin de vérifier leur apport au niveau rendement et santé des sols. Les rotations comprennent du blé-soya-maïs, une autre une céréale grainée suivie de deux années de prairies et du maïs, ainsi qu’une rotation de deux années de céréales, suivies de deux années de maïs. « L’idée est qu’une année sur quatre soit cultivée en maïs pour comparer les rendements et le potentiel azoté du sol, puisque c’est une plante exigeante (…) Ce sera intéressant de suivre la fertilité intrinsèque du sol et son évolution et la dépendance à l’engrais », ajoute-t-elle.

La quinzaine de chercheurs pourra mesurer et analyser différents paramètres, dont la qualité de l’eau, les émissions de GES, le microbiome du sol, le stockage de carbone, la fertilité du sol et les rendements entre les différents systèmes. « C’est une chance de pouvoir mesurer toutes ces variables et d’avoir le financement pour le faire », note Christine Landry, qui mentionne que le projet a bénéficié d’une subvention de 300 000$ du gouvernement.

L’équipe comprend Philippe Constant, chercheur en microbiologie à l’Institut nationale de la recherche scientifique (INRS), Jérôme Dupras, chercheur en économie écologique à l’Université du Québec en Outaouais, Patrick Brassard, chercheur en génie agroenvironnemental de l’IRDA et le Conseil québécois des plantes fourragères (CQPF).

La relation entre fertilité et rendement

Au terme des quatre années, le projet pourrait être renouvelé pour une durée similaire, ce qui pourrait vraiment permettre de comparer les effets des cultures pérennes. La chercheuse de l’IRDA s’attend d’ailleurs à ce que les effets sur la fertilité et le rendement soient notables à partir de quatre ans et d’une manière plus significative à partir de six à huit ans. « Avec l’inclusion annuelle de culture de couverture, on s’attend à une amélioration à moyen terme de certains paramètres de qualité, dont au niveau carbone ».

Cela faisait quelques années que l’IRDA attendait l’occasion pour pouvoir faire un projet d’envergure. Les recherches en agriculture, comme dans n’importe quel secteur, connaissent des cycles, ce qui fait que les priorités changent, mentionne la chercheure. « À une certaine époque, ça pouvait sembler caduque de vouloir s’entêter à comparer des prairies ou non en rotation. La roue tourne et ça redevient visionnaire. Après des années d’agriculture intensive, on retrouve l’importance de la qualité des sols, de maintenir les sols couverts et réintroduire des engrais verts et des plantes pérennes. »

L’apport des prairies dans une rotation a sans doute été sous-estimé. « On s’en doutait mais on ne réalisait pas à quel point ce serait drastique ». Le centre réalise une cote de santé des sols et de rendement et les résultats indiquent un rendement quasi comparable entre les sols avec historique de prairie sans aucun apport d’azote et le sol qui est en fertilisation minérale avec la pleine dose d’azote depuis 40 ans.

Les résultats mettent en lumière à quel point le potentiel de rendement est affecté si l’azote est lessivé. « Il ne d’agit pas seulement de la dépendance à l’engrais, mais aussi le rendement qu’il est possible d’atteindre quand les besoins sont comblés, un rendement que tu n’atteindras pas même si tu mets tout l’azote que tu veux dans le sol. »

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À PROPOS DE L'AUTEUR

Céline Normandin

Céline Normandin

Journaliste

Céline Normandin est journaliste spécialisée en agriculture et économie. Elle collabore également au Bulletin des agriculteurs.