Pas facile d’étudier en médecine vétérinaire au Québec. Sur les quelques 1000 candidatures pour entrer à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, seulement 96 seront admis en première année. La demande est tellement forte dans ce domaine contingenté qu’il en ressort le même nombre cinq ans plus tard. Si des étudiants quittent en cours de route, souvent pour des raisons non planifiées, il y a alors plusieurs candidats pour combler les rares places vacantes. Cela cause beaucoup de déceptions parmi les aspirants au métier, selon les explications de la vice-doyenne responsable de l’admission à la faculté, Marie Archambault.
La semaine dernière, une candidate déçue, Rachèle Tremblay, nous faisait parvenir une lettre dans laquelle elle expliquait toute sa frustration. La lettre était adressée à la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, dans le but qu’elle intervienne pour changer les choses. Cette jeune agronome, détentrice d’une maîtrise en sciences animales et avec plusieurs années de pratiques en agronomie s’est vue refuser l’entrée à la faculté. Dans l’espoir d’entrer dans la catégorie transfert entre universités, elle a débuté à grands frais une formation dans une université américaine. Après une année et demie de formation complétée et 128 000$ de dettes, elle s’est encore fait refuser.
« Le Québec peut-il vraiment se permettre de laisser de côté des talents en raison d’un système rigide et sans considération ? Le milieu vétérinaire est en crise et dans tous ces dédales administratifs, a-t-on pensé à la santé et au bien-être des grands animaux ? Certains souffrent, d’autres décèdent faute de soins vétérinaires », écrit Rachèle Tremblay dans sa lettre.
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Un programme prisé
En entrevue, Marie Archambault explique qu’elle ne peut pas commenter un dossier particulier. « J’ai de l’empathie pour elle et pour les autres 800 à 900 autres candidats qui n’entrent pas cette année », dit-elle. La problématique de la Faculté de médecine vétérinaire, c’est le manque d’espace. Les lieux ne permettent actuellement que l’admission de 96 candidats.
« Notre programme est très contingenté comme le sont les programmes de médecine, de pharmacie, de médecine dentaire et de physiothérapie », dit Marie Archambault. Elle ajoute qu’il s’agit de la seule formation francophone en médecine vétérinaire en Amérique et que l’Université jouit d’une excellente réputation. Parmi les quelque 1000 demandes, tous les dossiers sont très bons, la moitié sont excellents et 200 sont exceptionnels. « J’ai des candidats qui font de deux jusqu’à six demandes avant d’entrer en médecine vétérinaire », ajoute la vice-doyenne.
Marie Archambault explique que le dossier de Rachèle Tremblay a été vérifié par les différentes instances. « C’est un très bon dossier, mais il n’y avait qu’une place pour sept candidats », dit-elle. En faisant le choix de débuter sa formation en médecine vétérinaire dans une autre université accréditée, elle entrait dans la catégorie des gens qui sollicitaient les places qui se libèrent après une année de formation.
Or, il n’y avait que deux places, dont une réservée aux médecins vétérinaires ayant complété leur formation à l’étranger dans une université non accréditée. Ils étaient neuf médecins vétérinaires formés à l’étranger à convoiter cette place. L’autre place était réservée aux étudiants ayant complété leur première année de formation dans une université accréditée. C’est cette place que Rachèle Tremblay convoitait, comme six autres candidats. Selon Marie Archambault, la personne qui a obtenu la place avait une candidature exceptionnelle.
De l’espoir en vue
Il y a toutefois de l’espoir pour les aspirants au métier puisque le nombre d’admissions augmentera bientôt. Il y a un an, la Faculté de médecine vétérinaire annonçait qu’une formation délocalisée à Rimouski verrait le jour en septembre 2024. Ce sont 24 médecins supplémentaires qui seront ainsi formés en débutant les trois premières années à Rimouski et en terminant les deux dernières années à Saint-Hyacinthe. Des fonds de 100 000 millions de dollars ont d’ailleurs été accordés par le ministère de l’Enseignement supérieur pour aménager les installations afin d’accueillir plus d’étudiants. Cette formation délocalisée permettra ainsi l’arrivée de 120 médecins vétérinaires dès 2029, au lieu de 96, et le nombre devrait augmenter jusqu’à 130 étudiants, mais il s’agirait du maximum possible, selon Marie Archambault.
Elle explique que cela s’ajoute à d’autres actions qui ont été prises depuis qu’elle est entrée en poste il y a cinq ans. Des places ont notamment été réservées pour les candidats démontrant de l’intérêt pour la médecine des animaux de ferme. Ce secteur manque davantage de médecins vétérinaires, quoiqu’il en manque partout. Une bonification de la cote R est aussi accordée aux étudiants provenant de zones fragilisées en termes d’offre de service.
Le chemin pour réaliser son rêve de devenir médecin vétérinaire est donc laborieux, mais Marie Archambault souligne toutefois que les aspirants doivent persévérer. « La résilience, ça paie, dit-elle. Certains sont acceptés après cinq ou six demandes. »
Pour Rachèle Tremblay, si elle veut toujours graduer à Saint-Hyacinthe, elle doit compléter ses quatre premières années et espérer réussir à être acceptée pour sa résidence en cinquième année. Mais encore là, les places disponibles dépendent des départs d’étudiants de la Faculté. Elles sont rarissimes.
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